Le France débat sur le « hidjab de running ». Aux Etats-Unis, l’escrimeuse Ibtihaj Muhammad, qui porte le hijab sous son masque d’escrime, est célébrée par Nike. / FABRICE COFFRINI / AFP

Après une journée de controverse et de pressions en France, Decathlon a renoncé, mardi 26 février, à commercialiser son « hidjab de running ». Déjà vendu au Maroc, il devait prendre place dans les rayons des Decathlon de France dans les prochaines semaines. Mercredi, la ministre de la justice a regretté « qu’on a[it] beaucoup hystérisé le sujet », rappelant que le choix initialement fait par Decathlon était légal. Le débat n’a pas échappé à la presse anglosaxonne, qui y a vu l’éternel retour de l’obsession française pour l’habillement des musulmanes.

Le quotidien britannique The Guardian souligne ainsi qu’il ne s’agit pas de la première « tempête politique sur les vêtements des femmes musulmanes en France », habituée à ce genre de débats depuis 2010, quand « le gouvernement de Nicolas Sarkozy a interdit le port de la burqa en France et a été accusé de stigmatiser les femmes musulmanes ».

« La question de l’habillement des femmes musulmanes en public a souvent suscité la controverse en France », note aussi la BBC, qui relève que le fabricant d’équipements sportifs Nike commercialise un hidjab de sport en France depuis 2017, disponible en noir, gris et blanc. Sans que cela ne pose de problème.

Pour la chaîne australienne ABC, cette controverse entourant le hidjab de course n’a rien d’étonnant. « En fait, l’entreprise elle-même a admis qu’elle avait soupçonné que le déploiement du produit allait faire “réagir” », note la chaîne, qui rappelle que « la France a été le premier pays européen à interdire ouvertement la burqa et le niqab dans les lieux publics ».

Comme le Guardian, la BBC revient sur les principes applicables en France en matière de signes religieux – des standards bien éloignés de la culture anglo-saxonne. Le Guardian rappelle que le port du voile est interdit dans les écoles publiques depuis 2004. Et les agents de la fonction publique ne peuvent pas porter de voile ou de symboles religieux extérieurs au travail, car ils doivent être considérés comme neutres. L’occasion aussi de se remémorer la polémique qui avait agité la France en 2016, lorsque des dizaines de maires de villes côtières françaises avaient interdit aux femmes musulmanes de porter des « burkinis » ou maillots de bain complets sur la plage.

Dans le registre « mélodramatique »

Pour le Washington Post, la France sombre dans le registre « mélodramatique de ce que peuvent, ou ne peuvent pas porter les femmes de confession musulmane ». Le quotidien revient sur ce qui a commencé comme « la tempête habituelle sur Twitter avant de devenir une affaire d’Etat, avec des responsables politiques se sentant obligés de prendre position sur ce vêtement prétendument offensant ».

Pour souligner cette « hystérisation » du débat français, le quotidien le met en regard avec la diffusion par Nike, dimanche pendant la cérémonie américaine des Oscars, d’une nouvelle campagne de publicité intitulée « Dream Crazier » (« Rêvez avec plus de folie ») qui met en vedette plusieurs athlètes féminines qui ont brisé des barrières et qui ont été traitées de « folles » pour avoir osé le faire. Parmi celles-ci, l’escrimeuse Ibtihaj Muhammad, médaille de bronze par équipes aux championnats du monde en 2011, 2012 et 2013 et médaille de bronze par équipes lors des Jeux olympiques 2016 de Rio de Janeiro, au Brésil. Elle a été la première athlète américaine à participer aux Jeux olympiques avec un hidjab. Plutôt que de susciter la polémique, le spot de pub a été bien reçu par le public américain.