Norme WLTP : l’heure du grand ménage dans les flottes
Norme WLTP : l’heure du grand ménage dans les flottes
Par Jean-Pierre Lagarde
L’arrivée fin 2019 du nouveau protocole de mesure, plus proche de la réalité en matière d’émissions de CO2, oblige les entreprises à recomposer leur flotte, avec des véhicules plus propres, moins nombreux, mais aussi une utilisation optimisée.
Julie Guillem
Faut-il prolonger les contrats de location actuels en attendant d’y voir clair sur la fiscalité applicable en 2020 ou bien accélérer le renouvellement du parc ? » Pour Jean-Loup Savigny, directeur commercial et marketing de LeasePlan, comme pour la plupart des flottes d’entreprise, l’heure est au questionnement. Avec l’arrivée du nouveau protocole d’homologation des véhicules Worldwide Harmonized Light Vehicles Test Procedures (WLTP) en fin d’année, les entreprises se retrouvent devant le même dilemme qu’en 2018.
Plus proche de la réalité en matière de consommation et de rejets, et donc plus pénalisant pour le calcul des émissions de CO2 des véhicules (et de ce fait des malus et taxes), le nouveau protocole WLTP les pousse soit à anticiper le renouvellement de leur parc, soit à repousser en fin d’année leurs achats pour profiter de nouveaux modèles plus adaptés. En 2018, les pouvoirs publics avaient cependant décidé de marquer une étape dans l’application des nouvelles mesures d’homologation. Un protocole intermédiaire baptisé « NEDC Corrélé » a ainsi été mis en place en septembre pour que les niveaux de CO2 des véhicules neufs ne progressent pas brutalement. En moyenne, lors de l’entrée en vigueur de ce NEDC Corrélé, une augmentation de 9,5 g/km de CO2 s’est appliquée aux modèles homologués. Mais désormais, en 2020, ce sont en moyenne 23 g/km supplémentaires qui s’ajouteront au calcul des émissions de CO2 des véhicules neufs.
L’exemple de la Finlande, passée au WLTP en 2018, donne un aperçu du changement qui attend les flottes d’entreprise. Cette analyse réalisée par Jato Analytics et publiée par les loueurs du Sesamlld (Syndicat des entreprises des services automobiles en LLD et des mobilités) montre, par exemple, qu’une petite Citroën C3 1.2 essence va voir son malus passer de 0 € à 540 € et sa TVS (taxe sur les véhicules d’entreprises) grimper de 508 € à 864 €. Un SUV Peugeot 3008 en version BlueHDi 130 va, lui, voir son malus exploser de 0 € à 1 740 € et sa TVS suivre la même ascension passant de 486 € à 1 885 €.
Pas de doute, les flottes vont devoir recomposer leur parc automobile. « Nous nous attendons à des hausses d’émissions de CO2 de plusieurs dizaines de pourcents se traduisant pour nos clients par des difficultés et un appauvrissement dans le choix de leurs voitures en parc, constate Ferréol Mayoly, directeur général d’Arval France. Car la règle d’acceptation des véhicules dans une flotte dépend des niveaux de CO2 des modèles. Sauf à revoir ces critères de sélection des voitures, le nombre de véhicules proposés va être réduit et le choix plus restreint pour les collaborateurs des entreprises. Certains de nos clients transforment cette difficulté en opportunité. Ils s’interrogent désormais sur la nécessité de détenir autant de véhicules de fonction et sur la possibilité de passer au crédit mobilité ou de recourir à l’autopartage. »
Une nécessaire remise à plat
La transformation du parc des entreprises, LeasePlan l’encourage également. « Notre conseil aux flottes est de reposer la discussion sur le TCO [coût total d’usage] et la consommation des véhicules. Et d’optimiser le parc selon l’utilisation des véhicules et non plus selon les catégories d’attribution, affirme Jean-Loup Savigny. Un responsable commercial qui parcoure 20 000 km n’a pas forcément le même besoin de véhicule que celui qui en fait 40 000 ; idem pour les options attachées à la fonction du collaborateur. » Pour le directeur commercial et marketing du loueur LeasePlan, ce questionnement dépasse désormais le cadre de l’application du WLTP. « Les flottes doivent protéger les budgets et se préserver des hausses des coûts de détention et de la fiscalité. Nos clients doivent retravailler leur car policy pour s’orienter vers des modèles essence ou électriques. Cela passe par la nécessité de scanner le parc de l’entreprise, c’est le bon moment. »
Si la plupart des loueurs s’accordent pour recommander à leurs clients une remise à plat de leur parc, Gérard de Chalonge, directeur commercial et marketing d’Athlon, estime, pour sa part, que « les décisions du gouvernement sont également à prendre en compte. Si les pouvoirs publics adaptent la fiscalité au WLTP comme ils l’ont fait l’année dernière, celui-ci aura moins d’impact ». Reste qu’il est trop tôt pour le savoir. En attendant, pour ce loueur, il paraît évident que ce sont les modèles haut de gamme qui vont être le plus touchés par l’impact du WLTP. « Plus le véhicule de fonction est haut de gamme, plus le collaborateur à qui il est attribué choisit des options et plus il sera impacté par le WLTP. »
De son côté, Laurent Petit, directeur du marketing et du business développement d’Alphabet rappelle que « le prérequis pour l’introduction du WLTP était : pas de revenus supplémentaires pour les Etats. Et cela a été le cas l’an passé. Cette neutralité fiscale nous permet de rassurer nos clients. Mais nous leur posons la question : êtes-vous certains que ce que vous proposez correspond bien à l’usage de vos collaborateurs ? » Le passage au WLTP, Laurent Petit l’envisage comme une opportunité: « C’est l’occasion de redistribuer les cartes et de prendre de la hauteur sur le parc automobile. A nous de faire des propositions et de conseiller, là où c’est réalisable, le passage aux véhicules électriques ou aux modèles essence. »