Les animaux de compagnie consomment des ressources et polluent, comme leurs maîtres. / NATHALIE SEROUX/ PLAINPICTURE

LA LISTE DE LA MATINALE

Qui soupçonnerait la boule de poils endormie sur le tapis de plomber le bilan carbone du foyer ? Chiens et chats se font oublier dans la mobilisation écologique en cours. Pourtant, les animaux de compagnie consomment des ressources et polluent, comme leurs maîtres.

La France est particulièrement concernée : championne d’Europe de la possession de compagnons à quatre pattes (42 % des foyers en ont), il faut y nourrir 13,5 millions de chats et 7,3 millions de chiens, selon la Fédération des fabricants d’aliments. Si l’on tient compte des 3,4 millions de petits mammifères, 5,8 millions d’oiseaux et d’une flopée de poissons, la moitié des foyers abrite au moins un animal.

Du nombre naît l’impact environnemental. Rien que dans l’Hexagone, 1,2 million de tonnes de produits d’alimentation sont vendues chaque année, et des centaines de milliers de tonnes de déchets générées.

Oublierait-on, ingrats, que le chat fait office de bouillotte l’hiver, que le chien pousse à l’activité physique, que tous deux apaisent, brisent la solitude, réduisent rythme cardiaque et consommation d’anxiolytiques ? Certes. Mais un chien, par exemple, consomme en moyenne 164 kg de viande par an (et 95 kg de céréales).

Une prise de conscience s’impose. Bonne nouvelle : les pistes sont nombreuses pour réduire leur impact sur la planète.

Niveau débutant : acheter autrement

Dog with Tennis Ball / Radius Images / Photononstop / Radius Images / Photononstop

– Adopter votre animal en refuge. Et veiller à sa stérilisation. Point n’est besoin d’accroître encore la population animale domestique.

– Eviter les accessoires neufs. Une fois lavé et débarrassé des odeurs rémanentes, le matériel de seconde main (bac à litière, panier, sac de transport, arbre à chat, gamelle…) chiné chez Emmaüs ou Leboncoin fera l’affaire. Idem pour les jouets, à moins que vous n’optiez pour ceux fabriqués avec des matériaux recyclés et recyclables, ou que vous ne les fabriquiez. Et vive la vieille balle de tennis !

– Privilégier la nourriture déshydratée (croquettes) pour les chiens, moins encombrante dans le transport de marchandises. Les sacs de grande contenance évitent de multiplier les emballages, mais le mieux est d’acheter en vrac, comme proposé dans certaines épiceries bio, animaleries, boutiques spécialisées (Day by Day) et cabinets vétérinaires. « Même pour les chats, qui sont de petits buveurs, les repas humides ne s’imposent plus depuis que la composition des croquettes a évolué pour éviter les problèmes de calculs urinaires », assure le Pr Grandjean, de l’Ecole vétérinaire de Maisons-Alfort. Si toutefois vous tenez aux pâtés et terrines, résistez aux charmes marketés des mini-barquettes et sachets individuels, suremballés, pour revenir aux boîtes de conserve.

– Opter pour une litière naturelle. Comme un chat en nécessite une trentaine de kilos par an, ce sont plus de 400 000 tonnes qui sont annuellement jetées dans les poubelles en France ! En abandonnant la litière minérale, produite à partir de ressources non renouvelables (et souvent traitées chimiquement), au profit de la végétale, l’impact écologique du matou décroît. Cette litière naturelle, achetée, récupérée ou même fabriquée, peut être constituée de copeaux ou de granulés de bois (on peut utiliser de la sciure ou les pellets de poêle à bois), de résidus de maïs, de blé, de soja ou de coquilles de noix, de papier journal recyclé, ou encore de sable et bicarbonate de soude.

– Pour les soins et traitements antiparasitaires, virer au vert. L’ONG Générations futures a démontré la persistance de résidus de ces pesticides chimiques (fipronil, perméthrine, tétraméthrine) dans l’habitat et même sur les maîtres. Les shampoings et traitements antiparasitaires ont des alternatives naturelles qui fonctionnent bien, en prévention du moins… L’enseigne Botanica propose toute une gamme, comme Biogance, ou les marques Anibio, Neo Lupus, Biovetol, Naturly’s, Phyto Compagnon…

– Ramasser les crottes de votre chien, en vous munissant de sacs en plastique recyclé et/ou biodégradable. Au-delà du désagrément pour les passants, elles risquent avec la pluie de tomber dans les caniveaux, puis les collecteurs d’eaux, et de polluer les cours d’eau.

Niveau intermédiaire : réduire les déchets

– Ne plus jeter la litière à la poubelle. Vous tendez vers le zéro déchet ? Il est temps d’intégrer le chat dans cette réflexion. Car comme les autres, la litière végétale biodégradable est incinérée ou mise en décharge. A petites doses, vous pouvez pourtant jeter crottes et litière agglomérée par l’urine dans les toilettes. Mais surtout, vous pouvez composter la litière : pour Jean-Jacques Fasquel, auteur de Composter en ville (Rustica éd.), le compostage de la litière est possible si ces déchets disposent d’un composteur à part, s’ils y demeurent au moins deux ans et si le compost produit est réservé aux fleurs et fruitiers. En revanche, les litières végétales d’herbivores (lapins, cobayes…) peuvent sans risque être versées au compost domestique. D’ici à 2023, précise Zéro Waste France, toutes les communes seront tenues d’organiser la collecte séparée des biodéchets. Il sera alors possible de jeter toutes les litières végétales dans la poubelle à compost.

– Opter pour des croquettes de qualité. Contrairement à la poudre de cornes, sabots, plumes et sciure de bois encore contenue dans certains aliments bas de gamme, des matières premières très digestibles diminueront la quantité d’excréments, et les rendront plus faciles à ramasser. De nombreuses marques proposent désormais des croquettes sans OGM ni pesticides, et même labélisées bio, pour les produits secs comme humides, pour les chiens, les chats et les lapins : Yarrah, Nestor bio, Canichef, Felichef, Almo nature, Lily’s Kitchen, Edgard & Cooper, Préférence, Schesir, Biofood, Gasco Cot & Co…

– Habituer le chaton à se passer de litière s’il a accès à un jardin. Il suffit d’installer une chatière. Il est aussi possible de le rééduquer s’il est âgé, en déplaçant peu à peu cette litière vers l’extérieur.

Niveau confirmé : bien choisir l’animal, changer ses habitudes

– Troquer le chien contre un lapin ou… une poule. Deux universitaires néo-zélandais, Robert et Brenda Vale, ont calculé que l’empreinte carbone d’un chien de taille moyenne était deux fois supérieure à celle d’un SUV parcourant 10 000 km par an. Ils en ont tiré, en 2009, un livre au titre provocateur : Time to Eat the Dog ? (« Faut-il manger le chien ? », (Thames & Hudson). Ils y suggèrent de n’adopter, en zone urbaine, qu’un animal pouvant se manger en fin de vie. Et végétarien, de préférence : un lapin, un hamster, un cochon nain ou, encore mieux, une poule, seule productrice de protéines à partir de végétaux.

Young woman showing cat flower / Clarissa Leahy/Cultura / Photononstop / Clarissa Leahy/Cultura / Photononstop

– Protéger la biodiversité. En limitant les sorties nocturnes de ce redoutable prédateur qu’est votre chat, ce sont des dizaines d’oisillons, petits mammifères et reptiles qui seront épargnés. Les chercheurs anglais imputent ainsi aux neuf millions de félins insulaires la mort de 55 millions d’oiseaux par an. Lors des promenades avec le chien dans les zones fragiles, il faut limiter son impact sur la faune et la flore.

– Craquer pour les croquettes aux insectes. Cette solution entomophage permet d’éviter qu’humains, chats et chiens ne se disputent les produits de l’agriculture et de l’élevage. Depuis un an, deux Françaises, Madeleine Morley et Paola Teulières, vendent sur Internet leurs croquettes pour chiens (et bientôt pour chats) Tomojo à base de farine d’insectes, sans céréales ni conservateurs. Les protéines proviennent de larves de mouches soldat noir. Elles sont en outre plus digestes et de meilleure qualité nutritionnelle que les abats et sous-produits carnés. Quelque 20 mètres carrés suffisent pour élever un million d’insectes, nourris aux biodéchets locaux et ne nécessitant que peu d’eau. Depuis le démarrage de la start-up (4,5 tonnes vendues et des chiens qui vident la gamelle), plusieurs concurrents européens ont débarqué, dont l’anglais Yora.

– Composer vous-même les repas. Cela limitera la production industrielle et ses nuisances. Si vous avez le temps, préparez des « rations ménagères » avec des légumes de saison locaux, des céréales bio, et le minimum nécessaire de viande ou de poisson (certains commerçants donnent des restes), en vous appuyant sur des recettes validées par les vétérinaires. L’important est de respecter les besoins nutritionnels de l’animal, dont le système digestif est fragile, et d’éviter tout changement brusque. « Pour les chiens comme les chats, il faudra adjoindre à la ration un complément minéral vitaminé », précise le Pr Grandjean. Quant à donner les restes, rien n’est interdit, selon lui, « mais on ne peut pas nourrir l’animal uniquement de cette façon sans réduire son espérance de vie, les graisses très cuites abîmant le foie des carnivores ».

– Rendre son animal flexitarien ? Le chien est carnivore à tendance omnivore. On peut diminuer sa ration de viande si ses besoins en acides aminés sont couverts. Ce qui n’est pas simple… « Evidemment, il est possible d’adapter les quantités de viande et de poisson au chien. On peut les limiter pour le yorkshire d’appartement s’il n’est pas vieillissant, pas pour le chien de traîneau. Et surtout, on ne passe ni les chiens ni les chats au régime végétarien ou végan, sous peine de les tuer », alerte le Pr Grandjean. 

Le matou, lui, est un carnivore strict. Il ne vous reste qu’à devenir végétarien puisque lui ne le peut pas. Vous donnez votre part au chat ?