Jean-Dominique Senard, lors de l’assemblée générale des actionnaires de Renault à Paris, le 12 juin. / REUTERS TV / REUTERS

C’est un Jean-Dominique Senard combatif qui a animé mercredi 12 juin sa première assemblée générale en tant que président de Renault, devant quelque 900 porteurs de parts. Celui-ci a défendu la stratégie qu’il a mise en place depuis sa nomination en janvier, confirmant vouloir donner la priorité au partenariat avec les constructeurs automobiles japonais Nissan et Mitsubishi. « Il n’y aura pas de réussite du groupe Renault sans réussite de l’alliance » avec les deux sociétés, a affirmé M. Senard, poursuivant :

« Aujourd’hui, l’alliance prend un nouveau départ et elle est et doit rester plus que jamais à la fois un pilier et un moteur du développement de chacun de ses membres. »

Mariage avorté avec Fiat

M. Sénard est également revenu sur sa tentative infructueuse de faire fusionner le groupe Renault avec Fiat-Chrysler (FCA), en raison des réticences de Nissan et de l’Etat français, premier actionnaire de Renault. Il a indiqué que l’idée lui avait été suggérée par le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, et a profondément regretté la décision de l’Etat de finalement ne pas mettre la proposition de fusion au vote du conseil d’administration le 5 juin. « Dans ma vie d’industriel j’ai rarement vu une fusion qui pouvait apporter autant de synergies positives et qui mettait au passage à l’honneur les plates-formes Renault », a-t-il affirmé.

M. Senard a reconnu que le délai avec lequel Nissan à été prévenu du projet avec FCA « était court mais qu’il était impossible de faire autrement. L’ensemble du conseil à l’exception d’un vote contre l’avait approuvé avec enthousiasme, a-t-il poursuivi, et les représentants de Nissan s’étaient abstenus de façon très positive. Tout ceci ouvrait la voie à la validation de l’accord dans sa première étape. Malheureusement les représentants de l’Etat ne partageaient pas cette analyse et le vote n’a pas pu avoir lieu, ce qui, je vous le dis franchement, me désole. »

Le spectre de l’affaire Ghosn

Applaudi régulièrement par les porteurs de titres – notamment lorsqu’il fustigeait le traitement médiatique du mariage avorté avec Fiat –, M. Senard a obtenu lors d’un vote de confiance près de 91 % des voix de l’assemblée générale approuvant sa nomination pour quatre ans au conseil d’administration de Renault.

Il s’agissait de la première AG depuis la chute de Carlos Ghosn, embourbé dans une affaire de malversations présumées au Japon. Le feuilleton judiciaire, qui a démarré par son arrestation au Japon en novembre, a miné la confiance au sein du partenariat franco-japonais. Renault a annoncé récemment qu’il envisageait des poursuites contre M. Ghosn pour avoir engagé 11 millions d’euros de dépenses suspectes au sein d’une filiale commune avec Nissan, sise aux Pays-Bas.

L’affaire Ghosn aura aussi coûté cher aux actionnaires de Renault. Depuis l’arrestation de l’homme d’affaires, architecte de l’alliance avec Nissan et Mitsubishi qu’il a hissée au premier rang automobile mondial, l’action du constructeur français évolue à ses plus bas niveaux, aux alentours de 55 euros. En un an, le titre Renault a perdu un tiers de sa valeur.

Certes, le groupe au losange souffre comme l’ensemble du secteur d’une conjoncture internationale morose et des bouleversements technologiques qui imposent de lourds investissements dans les motorisations électriques, sans garantie de rentabilité. Le constructeur français a affiché en 2018 un résultat net de 3,3 milliards d’euros, en recul de plus d’un tiers par rapport à l’année précédente, notamment à cause des difficultés de Nissan, dont Renault détient 43 % du capital. Et 2019 s’annonce bien plus difficile.