Coupe du monde féminine : l’Allemagne croit en son collectif
Coupe du monde féminine : l’Allemagne croit en son collectif
Par Adrien Pécout (Montpellier, envoyé spécial)
Après des victoires serrées (1-0) sur la Chine et l’Espagne, un facile succès contre l’Afrique du Sud (4-0) permet à la Mannschaft de finir en tête du groupe B et d’éviter la route des Etats-Unis en huitième de finale.
Titulaires et remplaçantes allemandes après le troisième but, lundi 17 juin à Montpellier. / JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS
Tout va bien, merci pour elles. Voilà le message des Allemandes. Pour fêter son but de la tête face aux Sud-Africaines, Alexandra Popp a d’abord fait mine de décrocher le combiné d’un téléphone. L’attaquante et capitaine voulait imiter « E.T. », l’extraterrestre du cinéma. Un geste « pour ma famille, pour mes amis qui suivent cette Coupe du monde à la maison. »
Résumons l’essentiel : lundi 17 juin, à Montpellier, l’Allemagne a de nouveau gagné. Cette fois contre l’Afrique du Sud (4-0), après des victoires plus ardues (1-0) contre la Chine et l’Espagne. Un sans-faute pour finir en tête du groupe B, et donc surtout pour éviter les Etats-Unis au tour suivant, cinq jours plus tard : le calendrier proposera un huitième de finale soit contre le Nigeria, soit contre la troisième équipe du groupe C ou D. « Peu importe qui vient », coupe la défenseuse Giulia Gwinn, l’air de dire qu’il faudra de toute façon gagner tous les matchs, et que son équipe en aura les moyens.
Pour en revenir à Alexandra Popp : après le coup de fil fictif à ses proches, la joueuse a entrepris une course, bien réelle, vers le banc de touche. « Je trouvais important de montrer que nos remplaçantes comptent aussi, il n’y a pas que les onze joueuses sur le terrain. »
Un semblable esprit de corps pouvait déjà s’observer quelques jours plus tôt, et des centaines de kilomètres plus au nord, à Valenciennes. Le 12 juin, après un match que l’Espagne aurait tout autant mérité de gagner, les Allemandes avaient tenu à rester en cercle plutôt que de regagner illico leur vestiaire. La sélectionneuse, Martina Voss-Tecklenburg, voit « beaucoup de solidarité » dans ce groupe : « Nous avons des joueuses qui ont un grand esprit d’équipe. »
C’est une chance, en de telles circonstances. L’Allemagne, en effet, doit se débrouiller depuis deux matchs sans sa meneuse de jeu. L’une de ses meilleures joueuses, si ce n’est la meilleure, la plus technique. Dzsenifer Marozsan souffre d’une fracture d’un orteil depuis la rencontre à Rennes, contre la Chine. « Impossible malheureusement de pronostiquer le moment où elle pourra rejouer, selon Martina Voss-Tecklenburg, qui gardait encore espoir, lundi soir. On suit la situation jour après jour. Dieu merci, on a encore quelques jours avant notre huitième de finale. »
Le traumatisme de l’Euro
Bon courage à Birgit Prinz, qui accompagne cette année l’équipe en qualité de préparatrice mentale. L’ancienne capitaine de la sélection a passé son diplôme de psychologie à l’université Goethe de Francfort-sur-le-Main. « Elle joue un rôle précieux, elle nous donne beaucoup de conseils », apprécie l’attaquante Svenja Huth. Dans son parcours de joueuse, elle a eu beaucoup de succès, elle a l’expérience des compétitions. »
Prinz, 41 ans, a fait rêver toute une génération de footballeuses : 214 matchs en équipe nationale, 128 buts, et, surtout, les deux titres des Allemandes en Coupe du monde (2003 et 2007). Sa présence souligne, par contraste, l’inexpérience du groupe actuel. Sur les 23 joueuses de la sélection, 15 disputent leur première Coupe du monde. « Les nouvelles joueuses rendent les choses plus intéressantes, assure Alexandra Popp, 28 ans, déjà en équipe nationale depuis 2010. Elles apportent leur plaisir de jouer, je trouve les jeunes pleines d’entrain. »
Ce renouvellement correspond aussi à une période transitoire, après le traumatisme de l’Euro 2017 : élimination (contre le Danemark) dès les quarts de finale du tournoi - que les Allemandes avaient gagné huit fois - un an après leur médaille d’or olympique à Rio de Janeiro.
A Montpellier, les supporteurs allemands présents au stade de la Mosson semblaient croire à un renouveau. Affluence totale : quelque 15 000 spectateurs, soit des tribunes à moitié pleines (ou moitié vides, question de perspective) pour ce match déséquilibré, entre une Allemangne prétendante au titre et une Afrique du Sud encore novice dans la compétition et défaite à chacun de ses trois matchs.
Lina Magull a contribué à l’agitation. La milieu de terrain a inscrit le quatrième but du match, le seul de la seconde période. Alors autant le savourer un peu : « En Allemagne, on aime bien la critique et on a parfois du mal à faire des compliments. »
Un article du tabloïd Bild, par exemple, a décrit le récent succès sur les Chinoises comme « une vilaine victoire » seulement acquise « grâce à la plus jolie de nos joueuses ». Le quotidien a justifié cette formulation par le fait que la capitaine Alexandre Popp avait déjà complimenté Giulia Gwinn pour son apparence, dans une interview publiée avant le début de la compétition.
Gwinn fêtera ses 20 ans le 2 juillet, à cinq jours de la finale de la Coupe du monde. « Je crois aujourd’hui que huit ou neuf équipes ont le potentiel pour gagner la compétition », estime sa coéquipière, Svenja Huth. Avant cette précision qui s’impose : « Bien sûr, l’Allemagne en fait partie ! »