Pollution : la circulation différenciée sera automatique en région parisienne en cas de pic
Pollution : la circulation différenciée sera automatique en région parisienne en cas de pic
Par Stéphane Mandard
A la veille d’un épisode de pollution à l’ozone, le ministre de la transition écologique annonce que les véhicules les plus polluants seront interdits de circulation.
Sur l’autoroute A1, près de Paris, pendant un épisode de pollution en juillet 2018. / GERARD JULIEN / AFP
Nouvelle étape dans la chasse aux voitures polluantes. La circulation différenciée sera désormais automatiquement activée en cas de pic de pollution en région parisienne. Le ministre de la transition écologique et solidaire, François de Rugy, l’a annoncé mardi 25 juin alors qu’Airparif, l’organisme de surveillance de la qualité en Ile-de-France, prévoit un épisode de pollution à l’ozone à partir du 26 juin.
Concrètement, dès que le seuil d’alerte (qui concerne l’ozone mais également les particules et le dioxyde d’azote) sera atteint, les véhicules qui ne sont pas classés Crit’Air 0, 1 ou 2, c’est-à-dire les diesels de plus de huit ans et les essences de plus de treize ans seront interdits de circulation. Jusqu’ici, seuls les critères 4 et 5 et les véhicules non éligibles à la fameuse vignette faisaient l’objet de restriction de circulation.
Les pics, partie émergée du problème
Lors de la canicule meurtrière de 2003, l’ozone aurait provoqué environ 380 décès (sur un total de 15 000), selon les estimations de Santé publique France, et son exposition chronique serait responsable chaque année de près de 500 décès pour causes respiratoires. Les émissions d’oxydes d’azote (NOx) issus du trafic routier contribuent à la formation de l’ozone en conditions de fort ensoleillement.
A chaque pic de pollution, la préfecture de police attendait que celui-ci s’installe dans la durée avant d’activer la circulation différenciée, souvent en fin d’épisode. A la Mairie de Paris, on salue cette évolution. « Nous avions demandé l’automaticité de ce type de mesure au gouvernement précédent et à Ségolène Royal », rappelle Christophe Najdovski, adjoint chargé des transports. En vain. La Mairie de Paris, qui a mis en place le stationnement gratuit dès aujourd’hui, demande à ce que la préfecture de police instaure la circulation différenciée dès mercredi.
A Airparif, on estime qu’on peut aller encore plus loin : « Avec le niveau de prévisions météorologiques et de pollution atmosphérique, nous pourrions anticiper et éviter ces pics en activant la circulation différenciée de manière préventive. »
En outre, les pics de pollution ne sont que la partie émergée du problème. Ils restent rares en Ile-de-France et la circulation différenciée ne reste qu’un dispositif d’urgence. C’est à la pollution chronique, responsable de plus 60 000 morts par an en France, qu’il faut s’attaquer, s’accorde les professionnels de santé. C’est l’objectif des zones dites « à faibles émissions » (ZFE) qui visent, elles, à interdire de façon permanente et progressive, les voitures les plus polluantes.
Une zone à faibles émissions à l’échelle du Grand Paris
A partir du 1er juillet, ce sera au tour des véhicules classés Crit’Air 4 d’être interdits de circulation dans les rues de Paris. Dans le viseur, les diesels immatriculés avant 2006. Les Crit’Air 3 – diesels d’avant 2011 et essences d’avant 2006 – sont en sursis jusqu’en 2022, selon un plan d’éradication progressif qui prévoit la fin du diesel dans la capitale l’année des Jeux olympiques (2024) et celle des motorisations essence à l’horizon 2030.
Autre nouveauté, le 1er juillet, ces restrictions s’appliqueront pour la première fois au périphérique et au-delà, avec la mise en place d’une zone à faibles émissions (ZFE) au niveau de la métropole du Grand Paris, dans le périmètre de l’anneau formé par l’A86.
Soucieux, à moins d’un an des municipales, de ne pas braquer des administrés plus attachés (et dépendants) à leurs voitures que les Parisiens dans leurs déplacements quotidiens, les élus de la métropole ont décidé de commencer doucement avec la ZFE. Dans un premier temps, seuls les Crit’Air 5 et les véhicules non éligibles à la fameuse vignette (diesels d’avant 2001 et essences d’avant 1997), déjà interdits dans Paris intra-muros depuis deux ans, sont concernés. Ils représentent un peu moins 32 000 véhicules dont 26 particuliers, soit à peine 1 % du parc roulant dans le périmètre de l’A86.
Et que les récalcitrants se rassurent, la métropole est « pour une écologie acceptée et non imposée ». Comprendre, il n’y aura pas de verbalisation avant la fin de 2021 – et l’extension de l’interdiction aux Crit’Air 4 à toute la zone – mais « des contrôles aléatoires et pédagogiques » pour « expliquer ce qu’est la ZFE et comment être financièrement accompagné pour changer de véhicules ». Un ménage non imposable qui souhaiterait troquer sa vielle Crit’Air 5 contre une hybride ou une électrique neuve pourra ainsi bénéficier d’une aide de 5 000 euros de la part de la métropole. Coup de pouce cumulable avec le bonus écologique (6 000 euros) et la prime à la conversion (5 000 euros).
Malgré toutes ces précautions, sur les 78 communes (hors Paris) concernées par la ZFE, une trentaine de maires refusent encore de signer l’arrêté nécessaire à son application sur leur territoire.
« Drame sanitaire »
Pour le président de la métropole, Patrick Ollier, il s’agit de faire face à un « drame sanitaire ». Le maire de Rueil-Malmaison rappelle les données de l’agence Santé publique France : 6 600 décès sont liés chaque année à la pollution de l’air à l’échelle de la métropole. Selon Airparif, 1,3 million de Franciliens – dont un Parisien sur deux – sont exposés à des niveaux de dioxyde d’azote (NO2) qui dépassent la limite annuelle (40 microgrammes par mètre cube) fixée par l’Union européenne (UE), ce qui vaut à la France d’être poursuivie devant la Cour de justice de l’UE. Le NO2 est un gaz toxique émis majoritairement par le trafic routier et principalement par les motorisations diesel.
Selon les calculs d’Airparif, la mise en place de la ZFE devrait permettre de réduire les émissions de NO2 de 3 % mais également de particules fines, les plus dangereuses pour la santé, dans les mêmes proportions, dès la première étape d’interdiction des Crit’Air 5. Conséquence : la part d’établissements recevant du public dit « sensible » (crèches, écoles, hôpitaux) soumis à des dépassements de NO2 diminuerait de 6 %. Elle chuterait même de 27 % à 1,5 % en étendant la ZFE aux Crit’Air 3.