Le Tour à la voile veut redonner davantage de place aux coureurs amateurs
Le Tour à la voile veut redonner davantage de place aux coureurs amateurs
Par Véronique Malécot
Quatre équipages seulement sur vingt-trois concourent cette année au classement « amateurs ».
L’équipage amateur Grégory Lemarchal-Sable d’Olonne termine cinquième des stades nautiques aux Sables d’Olonne et est leader, ce 14 juillet au classement amateurs du Tour Voile 2019.(Photo : Jean-Marie LIOT / ASO) / Jean-Marie LIOT / ASO / Jean-Marie LIOT / ASO
Les organisateurs l’affirment, les amateurs ont toujours leur place sur le tour de France à la voile. Pourtant, ils ne sont que quatre équipages, cette année, à briguer le « spi vert » de leader du classement « amateurs ». Quatre sur vingt-trois équipes. En 2016, ils étaient dix sur vingt-quatre à concourir dans ce classement, six en 2017 et, déjà, quatre l’année passée.
« Le Tour de France à la voile a été créé, en 1978, par la voile amateur. Je pense qu’il n’y avait plus d’amateurs sur l’épreuve les dernières années avant l’apparition du Diam 24, en 2015 », rappelle Vianney Ancelin. Le concepteur et le seul constructeur du Diam 24, conçu à l’origine - avant même qu’il soit choisi comme support du Tour- pour les amateurs aguerris, est catégorique : « Nous n’avons jamais raisonné pour les professionnels. Aujourd’hui, on perd les amateurs et je trouve cela dommage. Le bateau convient à la fois aux deux. Il n’y a pas de raison pour que l’on ait un Tour que de professionnels ».
Autre son de cloche chez Amaury Sport Organisation (ASO), organisateur de l’épreuve. « Je pense qu’il y a de la place pour tout le monde, professionnels et amateurs, déclare Jean-Baptiste Durier, le directeur du Tour Voile. Aujourd’hui, la catégorie amateur est définie par la World Sailing ».
En l’occurrence, pour la fédération internationale de voile, les amateurs sont des concurrents « qui courent uniquement pour leurs loisirs », contrairement aux professionnels qui ont « un intérêt financier dans le sport ou qui sont payés pour courir ».
Dans son avis de course qui précise les règles de l’épreuve, ASO ajoute une condition supplémentaire : pour être classé amateur, il faut non seulement répondre à la définition de la World Sailing mais aussi qu’un membre de l’équipage ait plus de 26 ans au 1er janvier de l’année en cours.
« Poser tous les congés et mettre entre parenthèses vie professionnelle et sentimentale »
« Il faut redéfinir qui est amateur, souligne Christophe Gaumont, le directeur de course du Tour. Les professionnels sont payés et des jeunes amateurs très talentueux sont intégrés dans les équipes professionnelles. Il y a donc un transfert entre les classements jeunes et amateurs ».
Par exemple, l’équipage Dunkerque Voile, composé d’étudiants de 17 et 19 ans, à l’exception d’un équipier âgé de 26 ans, est inscrit chez les amateurs. A l’inverse, l’équipage de Groupe Atlantic, où tous étudiants qui le composent ont moins de 26 ans, est inscrit dans le classement jeunes.
« Le niveau a incroyablement monté depuis le début du Diam 24 sur le Tour, en 2015, rappelle Christophe Gaumont. Il y a des professionnels et des jeunes très, très bons. Ces équipages s’entraînent à l’année, ou au moins pendant les six mois que dure le circuit Diam 24. Ainsi, à force d’entraînement, ils acquièrent une maîtrise technique de très haut niveau, et une routine. »
Une des explications à la raréfaction des amateurs, est peut-être leur disponibilité. « La voile demande beaucoup d’implication », explique Emeric Dary, le skippeur de Grégory Lemarchal-Sables d’Olonne, actuel leader au classement « amateur », et présent sur l’épreuve depuis 2015. « Cette année, notre équipage est composé d’équipiers qui acceptent de poser tous leurs congés et de mettre entre parenthèses leur vie professionnelle et sentimentale ».
L’équipage a pu s’entraîner une semaine pour chacune des six régates d’avant-Tour, ce qui lui permet de naviguer aujourd’hui dans le top 10 du Tour. Malgré cela, on reste loin de la centaine de jours d’entraînement annuel des équipages professionnels.
Créer un package « hébergement, transports »
Autre facteur qui joue en défaveur des amateurs, la logistique. « Courir le Tour sur deux semaines au lieu de trois peut se traduire par un véritable marathon pour des équipes amateurs, parfois moins étoffées », explique Vianney Ancelin. A chaque étape, les concurrents doivent monter et démonter leurs bateaux, effectuer les transferts, du jour au lendemain. Une logistique vite énergivore lorsque l’équipe est très réduite.
« Tout le monde met la main à la pâte pour monter et démonter le bateau », confirme Titouan Jestin un des skippeurs de Dunkerque Voile, une équipe composée de quatre navigants et un seul préparateur. Ce handicap peut se traduire sur l’eau par des résultats moindres alors que les équipages disposant de moyens plus importants à terre ont plus de temps pour récupérer.
Pour accroître la présence des amateurs, les organisateurs évoquent plusieurs pistes. Selon Vianney Ancelin, l’une d’elles serait la création « d’un grand prix amateur lors de la première et la dernière étape du Tour ». Autrement dit, on permettrait aux amateurs de ne courir que deux week-ends, ce qui desserrerait leur planning sportif.
D’autres pistes, comme la création d’un package « hébergement, transports », sont à l’étude du côté d’ASO pour alléger la logistique des équipages. Une idée pourrait être aussi d’abaisser la limite d’âge.
Dans tous les cas, « les amateurs ont toujours leur place sur le Tour et il en faut, c’est une des forces du Tour, insiste Christophe Gaumont. Il faut une épreuve qui fait rêver et soit accessible tant aux jeunes qu’aux amateurs ». Le Tour reste une « aventure, l’accomplissement de rêves de jeunesse », résume un amateur qui, comme d’autres, apprécie de pouvoir se frotter aux meilleurs.