Sélection expo : Bertrand Lavier à la Galerie Almine Rech
Sélection expo : Bertrand Lavier à la Galerie Almine Rech
Par Philippe Dagen
Pour sa nouvelle exposition parisienne, l’artiste platicien aborde frontalement la question de la peinture et de la sculpture.
BERTRAND LAVIER / AVAILABLE IMAGES FOR PRESSPaysages aixois, 2015Acrylic on traffic sign / Acrylique sur panneau de signalisation140 x 240 cm - 55 1/8 x 94 1/2 inches© Bertrand LavierCourtesy of the Artist and Almine Rech GalleryPhoto:Rebecca Fanuele | © Bertrand LavierCourtesy of the Artist and Almine Rech GalleryPhoto:Rebecca Fanuele
Les travaux récents de Bertrand Lavier vérifient l’idée selon laquelle on reconnaît les œuvres réussies au fait qu’elles suscitent des réflexions multiples, imprévues, incertaines.
Ses trois monochromes n’en sont pas vraiment, obtenus en peignant la photographie d’une peinture qui, à l’état premier, n’était pas non plus vraiment monochrome. Les effets de matière et de couleur sont si présents que l’on pourrait soutenir que ces toiles sont des extraits de paysage.
Les deux abstractions géométriques à fond blanc ont leur origine dans Le Journal de Mickey et sont passées par le stade de l’impression et celui du recouvrement à l’acrylique. On est loin de Malevitch, et il est impossible de ne pas penser à lui, Arp, Klein et leurs héritiers. Cézanne, lui, se glisse dans une peinture d’après un panneau autoroutier vantant les « paysages aixois », Sainte-Victoire comprise. Voici donc ce qui reste du célèbre peintre : une signalétique à reconnaître à 130 km/h. Par ailleurs, ce sont de très beaux tableaux, mais que signifie « beau » aujourd’hui ? Et sculpture ? Le mot ne convient pas aux deux colonnes de grès dans lesquelles Lavier incruste le feu arrière d’une Ford pour l’une, d’une Lancia pour l’autre. Deux époques, deux matériaux, deux états du monde s’interpénètrent. Ils devraient ne pas pouvoir s’allier. Leur rencontre se passe si bien que les fragments d’automobile semblent avoir trouvé là leur meilleure place, telles des pierres précieuses sur un reliquaire. Mais on a aussi entendu des spectateurs avouer voir dans ces œuvres une symbolique sexuelle. Celle-ci semble pourtant plus présente dans La Vénus d’Amiens, l’un des chefs-d’œuvre de l’artiste : l’agrandissement aux dimensions d’un nu antique d’une statuette préhistorique retrouvée cassée près d’Amiens, en 2014. On tourne autour de cette statue à la fois monumentale et grossière, gravettienne et actuelle. Un objet artistique non identifié.
« A cappella », Galerie Almine Rech, 64, rue de Turenne, Paris 3e. alminerech.com. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 15 avril.