En Gambie, Yahya Jammeh soupçonné d’avoir détourné plus de 50 millions de dollars
En Gambie, Yahya Jammeh soupçonné d’avoir détourné plus de 50 millions de dollars
Le Monde.fr avec AFP
La justice gambienne a gelé les comptes bancaires de l’ancien président, qui vit en exil en Guinée équatoriale.
La justice gambienne a gelé, lundi 22 mai, les biens de l’ancien président Yahya Jammeh, soupçonné d’avoir détourné plus de 50 millions de dollars (plus de 44 millions d’euros) avant son départ en exil, a annoncé le ministre de la justice, Abubacarr Tambadou.
« Yahya Jammeh a personnellement ou indirectement procédé au retrait illégal d’au moins 50 millions de dollars de la Banque centrale » de fonds appartenant à l’Etat, a déclaré le ministre, citant notamment l’opérateur public de téléphonie mobile. « Nous avons obtenu aujourd’hui une décision de justice gelant ou saisissant les biens connus dans le pays du président Jammeh et les sociétés qui lui sont associées », a ajouté M. Tambadou lors d’une conférence de presse.
Collection de voitures de luxe
C’est la première fois que le nouveau gouvernement évalue officiellement les avoirs retirés selon lui des caisses de l’Etat par le président gambien avant qu’il ne quitte le pays, en janvier, pour la Guinée équatoriale. Juste après son départ, son successeur, Adama Barrow, avait accusé M. Jammeh d’être parti en vidant les caisses du pays.
« Au moment où nous prenons en main le gouvernement, la Gambie est en détresse financière », avait affirmé M. Barrow dans une déclaration lue à Dakar par son conseiller, Mai Fatty, l’actuel ministre de l’intérieur. « En l’espace de deux semaines, 500 millions de dalasi [environ 9,4 millions d’euros] ont été retirés » par Yahya Jammeh, avait-il dit.
Mais ces accusations n’avaient pu être vérifiées à l’époque à Banjul. Il était même apparu que M. Barrow avait accepté de laisser M. Jammeh emporter tous les biens qu’il souhaitait, y compris sa collection de voitures de luxe.
Trois cousins inculpés de vol
La décision annoncée lundi concerne 88 comptes bancaires au nom de M. Jammeh ou de ses associés, ainsi que quatorze sociétés liées à lui, a affirmé M. Tambadou. Elle vise à empêcher « une liquidation ou une disparition des biens » de l’ancien président, a ajouté M. Tambadou, selon lequel elle ne concerne que ses possessions en Gambie.
Le président Barrow a limogé il y a une dizaine de jours le gouverneur de la Banque centrale et ses deux adjoints. Aucun motif n’a été rendu public, mais une source gouvernementale a affirmé à l’AFP qu’il serait lié à la découverte de la disparition de millions de dollars.
M. Jammeh contrôlait en Gambie des activités allant de la boulangerie à l’agriculture et était régulièrement accusé de mettre la main sur des secteurs commerciaux florissants. La semaine dernière, trois cousins de M. Jammeh ont été inculpés de vol pour avoir vendu du bétail lui appartenant.
La Gambie a été dirigée d’une main de fer pendant vingt-deux ans par M. Jammeh, un ancien militaire. Lors de l’élection présidentielle du 1er décembre 2016, M. Jammeh, battu par M. Barrow, a refusé de reconnaître sa défaite. Il s’est finalement résolu à quitter le pouvoir à la suite d’une intervention de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et d’une ultime médiation guinéo-mauritanienne.