TV : « Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé »
TV : « Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé »
Par Josyane Savigneau
Notre choix du week-end. Le documentaire de Jérôme Prieur redonne une voix à celle qui tint son journal avant de mourir en déportation (dimanche 18 juin, à 19 h 20, sur Arte).
Hélène Berr, une jeune fille dans Paris Occupé
Durée : 03:05
Ceux qui ont été bouleversés par le Journal d’Hélène Berr (Points Seuil, 2009) seront émus par le beau film de Jérôme Prieur. Les autres, on l’espère, auront envie de lire le livre. Hélène Berr a maintenant une voix, celle, délicate et juste, de Céline Sallette. Mais son visage reste celui, immobile, lumineux, des photos. Il ne s’agissait pas pour Jérôme Prieur de réincarner Hélène Berr. Seulement de faire revivre le texte, avec des documents d’archives.
Hélène commence son journal le 7 avril 1942. Elle a eu 21 ans le 27 mars. Elle ne sait pas qu’elle n’a plus que deux ans à vivre, mais elle sait que la menace est là, « comme dans un mauvais rêve ». Etudiante brillante, elle ne peut pas passer l’agrégation d’anglais, car elle est juive, et que le statut des juifs vient d’être promulgué. Elle doit porter l’étoile jaune. Ses réflexions sur cette stigmatisation sont accompagnées d’images prises dans les rues, qui font honte. Il y a là une certaine horreur française, dans l’abstention, dans le consentement à ce statut des juifs, à la « brutalité de la discrimination » dont parle Hélène Berr. On s’arrête un moment sur ce panneau : « Parc à jeux. Réservé aux enfants. Interdit aux juifs. » Pas même un graffiti pour rayer cette mention.
« Fous et aveugles de rester »
En dépit de l’arrestation du père, le 23 juin 1942 – il sera libéré –, de la rafle du Vél’d’Hiv, les Berr décident de ne pas écouter ceux qui les pressent de se rendre en zone libre. Ils restent à Paris. Hélène tombe amoureuse de Jean Morawiecki, rencontré à l’université. Ils vont passer une journée dans la maison de campagne de la famille, à Aubergenville (Yvelines). Les photos montrent des jeunes gens heureux, ultime image de bonheur.
Hélène Berr. | TOUTE L’HISTOIRE
Après un an d’interruption, Hélène reprend son journal le 10 octobre 1943. De plus en plus de connaissances sont déportées. Paris est sinistre, sombre. Hélène se demande s’ils n’ont pas été « fous et aveugles de rester ». « Je reviendrai, Jean, tu sais, je reviendrai », écrit-elle, comme pour s’en persuader. Le 8 mars 1944, Hélène et ses parents sont arrêtés et déportés le 27 mars, le jour de ses 23 ans. Tous mourront en déportation, Hélène en avril 1945, à Bergen-Belsen, quelques jours avant la libération du camp. Battue à mort par une gardienne parce qu’elle ne s’était pas réveillée, ce matin-là.
Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé, de Jérôme Prieur (Fr, 2013, 95 min).