L’un des cadres d’Air France, Pierre Plissonnier, chemise arrachée, tente d’escalader un grillage le 5 octobre 2015 à Roissy. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Les images avaient marqué les esprits : deux cadres d’Air France, chemise arrachée pour l’un, torse nu pour l’autre, escaladant des clôtures le 5 octobre 2015. Diffusées dans les médias et sur la Toile, elles étaient devenues le symbole des difficultés de dialogue entre les syndicats et le patronat français.

Elles seront de nouveau d’actualité à partir de lundi 12 mars, date d’ouverture du procès en appel de douze salariés et ex-salariés de la compagnie aérienne, jusqu’au 20 mars, dernier jour du procès. Les prévenus, pour la plupart membres du syndicat CGT (Confédération générale du travail), doivent répondre de violences et de dégradations commises le 5 octobre 2015. Quatre des anciens salariés qui ont été licenciés comparaîtront pour violences. Trois d’entre eux avaient été condamnés à trois et quatre mois de prison avec sursis en première instance, à la fin de novembre 2016 à Bobigny. Le quatrième avait été relaxé mais le parquet a fait appel. Les huit autres prévenus, qui avaient été condamnés à 500 euros d’amende, seront rejugés pour des dégradations commises sur le portail d’accès au siège.

Pour rappel, le jour des faits, le 5 octobre 2015, une manifestation contre un projet de restructuration menaçant plusieurs milliers d’emplois avait dégénéré à l’aéroport de Roissy. Violemment pris à partie alors qu’ils exposaient le plan, Xavier Broseta, directeur des ressources humaines d’Air France à l’époque, et Pierre Plissonnier, ex-responsable du long-courrier, désormais retraité, avaient dû fuir sous les huées des salariés, torse nu pour le premier, la chemise en lambeaux pour le second.

« Regrets que le procès se poursuive » pour Air France, appel aux soutiens pour la CGT

Avant l’audience d’appel, par voie de communiqué transmis à l’Agence France-Presse, Air France a dit « regretter que ce procès se poursuive, imposant à toutes les victimes de se replonger dans ces événements, qui ont été choquants pour tous ». La société estime que le jugement donné par le tribunal de Bobigny était « mesuré » et qu’il aurait dû « permettre de tourner la page du triste épisode des violences » du 5 octobre 2015, a-t-elle ajouté.

De son côté, comme elle l’avait fait en première instance, Me Lilia Mhissen, qui défend dix des prévenus, entend dénoncer un « dossier monté totalement à charge à partir de vidéos qui ont fait l’objet de montages et de ralentissements », tandis que d’autres, susceptibles de disculper ses clients, ont été écartées de la procédure.

La CGT a, de son côté, écrit dans un communiqué que Manuel Valls « avait mis une grosse pression sur la direction d’Air France ainsi que sur les forces de l’ordre et de la justice pour que des salariés soient condamnés sévèrement ». Le syndicat ajoute avoir « bon espoir, maintenant que la pression médiatique est retombée, de faire jaillir la vérité, c’est-à-dire l’innocence de nos camarades ». Il appelle au soutien de ses sympathisants.

Depuis les faits, la direction a pris plusieurs fois la précaution de « délocaliser » à Paris des séances de négociation avec les syndicats, par crainte de nouveaux débordements. Une situation que la CGT a l’intention de dénoncer lors d’un rassemblement qui se tiendra à midi, avant l’ouverture de l’audience.

Une grève en parallèle du procès

Ce nouveau procès s’ouvre dans un contexte particulier : la compagnie a sensiblement redressé sa situation financière, renouant avec les bénéfices.

En conséquence, les syndicats qui manifestaient en 2015 contre un éventuel plan social, se mobilisent aujourd’hui pour réclamer leur « part du gâteau ». Ils exigent une revalorisation des grilles salariales de 6 % et une large intersyndicale appelle à une grève le 23 mars. Un mois après un précédent mouvement qui a entraîné l’annulation d’un quart des vols.