TV – A la question « Peut-on rire de tout ? », Yves Riou apporte une réponse sommaire
TV – A la question « Peut-on rire de tout ? », Yves Riou apporte une réponse sommaire
Par Sandrine Blanchard
Pour répondre à cette interrogation qui ne cesse d’être ressassée, le réalisateur se contente de compiler des sketches et des interviews parcellaires (sur France 3 à 20 h 55).
Desproges Peut on rire de tout ?
Durée : 09:21
Trente ans après sa mort, Pierre Desproges est devenu le mètre-étalon de l’humour. « Etonnant, non ? », aurait pu rétorquer l’intéressé. En se demandant avec brio « peut-on rire de tout ? », dans sa célèbre plaidoirie du « Tribunal des flagrants délires », sur France Inter, face à Jean-Marie Le Pen, cet « intellectuel » de l’humour a posé une question qui ne cesse d’être ressassée à l’heure où les réseaux sociaux s’enflamment à la moindre saillie jugée « politiquement incorrecte ». « L’atmosphère plus anxiogène pousserait-elle les humoristes d’aujourd’hui à devenir plus frileux ? », se demande le réalisateur Yves Riou.
« Eh bien non, affirme-t-il, de manière surprenante, dès les premières minutes de son documentaire. Les plus délurés continuent de s’attaquer aux tabous comme le faisait auparavant Desproges. » Quel dommage que ce postulat soit posé dès le départ ! Car se questionner sur l’évolution du rire et sur la manière dont il aborde les sujets qui fâchent aurait mérité davantage. Mais ce long programme (115 minutes) se borne à accumuler un nombre déraisonnable d’extraits de sketches et des interviews bien trop parcellaires d’humoristes, parmi lesquels François Rollin, Anne Roumanoff, Christophe Alévêque, Yassine Belattar, Haroun, Blanche Gardin, François Morel, etc.
Une conclusion un peu courte
Pour appuyer sa démonstration selon laquelle rien n’a changé depuis Desproges, Yves Riou a découpé son sujet en sept chapitres : racisme, homophobie, antisémitisme, politique, attentat, sexualité, religion. Soit. Il aurait pu ajouter : handicap, armée, femmes. Sur chaque thème, tout est effleuré et rarement analysé. Pourtant, comme le dit Anne Roumanoff, « le curseur change suivant les époques ». L’humour, résume Alex Vizorek, « est un rebond de la société : quand elle évolue, l’humour évolue ».
La peur de la procédure judiciaire, l’engagement politique, l’impact de l’affaire Dieudonné, l’émergence du stand-up, le poids de la religion, l’audace grandissante des femmes humoristes, sont quelques exemples de sujets qui auraient mérité d’être creusés.
« Sentinelles de nos libertés, les humoristes sont salutaires pour notre démocratie, souligne le documentaire. Tant que nous pourrons poser la question “peut-on rire de tout ?”, tout ira bien. » C’est un peu court comme conclusion…
Peut-on rire de tout ?, d’Yves Riou (Fr., 2018, 115 min).