Marie U., 24 ans, étudiante en master 1 de biologie animale et éthologie, en Suède. / La ZEP

Voix d’orientation. Le Monde Campus et La ZEP, média jeune et participatif, s’associent pour faire témoigner lycéens et étudiants de leurs parcours d’orientation. Cette semaine, Marie U., 24 ans, étudiante en master de biologie animale, en Suède.

« J’ai toujours eu envie de travailler avec les animaux. Comme de nombreux enfants, je voulais devenir vétérinaire. En première, je choisis donc la filière scientifique dans l’idée de partir en prépa BCPST (biologie, chimie, physique et sciences de la Terre). Mais mes notes en mathématiques dégringolent. Consciente que mon dossier n’est pas suffisant pour la prépa, j’envisage une licence de biologie. Malheureusement pour moi, mon professeur principal de terminale, c’est mon prof de maths. Et il me voit comme une incapable, en raison de mes résultats (catastrophiques, je dois l’admettre) dans sa matière. A chaque conseil de classe, il explique aux autres professeurs pourquoi je ne serai pas capable de suivre en licence de biologie malgré de bons résultats en SVT et corrects en physique-chimie. Idem lors des réunions parents-profs ou lors de nos entretiens.

Malgré le soutien de ma prof de SVT, je suis jeune et influençable, et je finis par me décourager.

Je ne sais plus quoi faire. Je n’ai jamais vraiment réfléchi à une alternative. Je prends le temps de regarder mes résultats dans chaque matière, persuadée que mes notes sont plus importantes pour mon orientation que mes propres envies. J’ai de bonnes notes en histoire, ainsi que dans les matières littéraires (français et philo). J’envisage donc une filière littéraire ou une licence d’histoire, mais cela signifie pour moi d’abandonner complètement le côté scientifique. Alors que j’aime ça !

Je choisis donc l’archéologie : un mélange d’histoire, d’anthropologie et de paléontologie. Pour avoir ma dose de sciences.

Mais, arrivée en première année de licence, je m’ennuie. J’ai envie de quitter ce cursus et de partir en biologie. Mais les voix de mes professeurs de lycée résonnent toujours dans ma tête : je ne suis pas faite pour les sciences, je n’ai pas un esprit fait pour le raisonnement scientifique. Alors je me résigne, je me dis que peut-être la deuxième année se passera mieux et que je développerai plus d’intérêt. Mais à la fin de l’année, même constat.

J’en parle à ma mère : “Je pourrais peut-être partir en géographie ?” (toujours impossible pour moi de partir en biologie, je suis trop nulle en maths !!). Elle me dit qu’il ne me reste qu’un an pour valider ma licence, que je devrais faire l’effort de terminer. Et puis, en troisième année de licence, nous avons finalement des cours de paléontologie et un peu de paléoenvironnement (de la biologie quoi). Mais non, une fois de plus, c’est la déception. Je ne me vois pas d’avenir dans cette discipline. Même les stages sur les chantiers de fouilles sont d’un ennui mortel : creuser le sol pendant des heures à la recherche de fragments de céramique... non, très peu pour moi. Je ne vois pas vraiment l’intérêt de ce que j’étudie. En quoi devenir archéologue ferait de moi une personne utile ? J’ai envie d’exercer un métier qui a du sens, si possible dans la protection de l’environnement et de la biodiversité. Je réfléchis, je reconsidère ce que mes profs m’ont dit au lycée et je décide de tenter ma chance en biologie. Quitte à rater ma première année et à repartir faire un master en archéologie.

C’est décidé. J’y vais et… je ne surmonte pas mes difficultés en maths. Mais le coefficient est tellement faible que je me concentre sur la zoologie, l’éthologie, la botanique… Et je valide ma L1 ! Je reprends confiance en mes capacités. Mes profs de lycée avaient tort, semble-t-il.

En L2, je travaille plus, mon niveau d’anglais est bon et j’entends parler d’Erasmus. Je dépose un dossier et bingo, je pars en échange universitaire en Suède pour ma troisième année. En même temps, je commence à penser à mon master (chose que je ne pensais même pas possible en rentrant en L1) : quel domaine de la biologie ? Zoologie ? Ethologie ? Oui, mais les débouchés sont faibles, c’est difficile de se faire une place dans le milieu.

Peut-être mais je me suis déjà restreinte parce que j’ai écouté les conseils d’autres personnes. Je ne ferai pas la même erreur deux fois. J’envisage un master à l’étranger, d’autant plus qu’avec la nouvelle loi, entrer en master d’éthologie en France semble compliqué : il faut avoir fait des stages, avoir de l’expérience dans le domaine, etc…

Je suis actuellement en M1 et je pars en Espagne dans quelques mois pour mon projet de master. Je vais étudier le comportement alimentaire des tortues marines à l’Oceanogràfic de Valence, le plus grand aquarium d’Europe.

Tout ceci peut sembler peu pour certains, mais c’est beaucoup pour moi. Pour l’élève qui se faisait rabaisser par son prof à chaque fois qu’elle rendait une copie : “toujours aussi nulle”, “aucun progrès comme d’habitude”, “c’est à se demander comment on a pu te laisser entrer en S”, et j’en passe. C’est beaucoup pour une élève qui était considérée comme incapable juste parce qu’elle avait des difficultés en maths. »

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