Parcoursup : l’heure de vérité
Parcoursup : l’heure de vérité
Par Séverin Graveleau
Mardi 22 mai en fin de journée, lycéens et étudiants en réorientation recevront les premiers résultats d’admission dans l’enseignement supérieur. La réforme de l’accès aux études supérieures face à l’épreuve du réel.
Page d’accueil du site Parcoursup, avril 2018. / LIONEL BONAVENTURE / AFP
Plusieurs centaines de milliers de candidats, 6 millions de vœux, une loi historique et une nouvelle procédure d’affectation dans l’enseignement supérieur. Mais aussi des contestations. Mardi 22 mai, à 18 heures, la plate-forme d’entrée dans l’enseignement supérieur, Parcoursup, donnera ses premières réponses aux lycéens et aux étudiants en réorientation. Cette date est aussi le baptême du feu pour la nouvelle procédure d’accès à l’enseignement supérieur incarnée par cette plate-forme, Parcoursup, qui remplace l’ancien système, Admission post-bac (APB).
810 000 candidats
Au total, ce sont 810 000 candidats qui se connecteront mardi à Parcoursup pour savoir s’ils ont reçu, ou non, une proposition d’admission correspondant à un ou à plusieurs de leurs vœux. Cela représente un chiffre record, bien supérieur aux 761 650 de 2017. La raison est, entre autres, l’arrivée dans les études supérieures des enfants du boom de l’an 2000, mais aussi une augmentation du nombre de jeunes choisissant de continuer leurs études dans le supérieur. Au total, ce sont un peu plus de 6 millions de vœux qui ont été enregistrés.
Les réponses qui commenceront à tomber mardi 22 mai sont le résultat d’une procédure inédite introduite par la loi orientation et réussite des étudiants (ORE), promulguée le 8 mars. Cette réforme de l’accès aux études supérieures, et plus particulièrement à l’université, repose sur deux piliers principaux. D’abord, l’instauration d’un examen des dossiers des candidats pour accéder aux licences universitaires, qui étaient jusqu’ici non sélectives. Mais aussi la mise en place de cette nouvelle plate-forme, Parcoursup, remplaçant Admission post-bac, qui présidait depuis plus de dix ans aux destinées des lycéens dans le supérieur.
D’APB à Parcoursup
Ce sont les déboires de cette plate-forme APB, à l’été 2017, qui avaient permis à la toute fraîchement nommée ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, de lancer sur les chapeaux de roue cette réforme promise par le candidat Macron durant la présidentielle. En cause : les centaines de milliers de jeunes qui n’avaient encore reçu, au début de juin 2017, aucune proposition d’admission. Mais le gouvernement a surtout su s’appuyer sur le « scandale » de l’utilisation du tirage au sort à l’entrée des filières universitaires en tension (sports, psychologie, etc.) pour faire aboutir sa réforme, en un peu plus de six mois.
Cette réforme a la particularité d’avoir été en partie appliquée avant son adoption définitive par le Parlement, en février. Dès le mois de décembre, les équipes pédagogiques des universités ont fait remonter au ministère la liste des compétences « attendues » dans leur formation. En janvier, alors que les candidats étaient déjà invités à entrer leurs vœux sur Parcoursup, les universitaires ont dû détailler les « critères » qu’ils souhaitaient prendre en compte pour vérifier que les candidats qui postulent à leurs formations ont bien ces compétences : notes de terminale, avis du conseil de classe, activités extrascolaires, etc.
Une procédure contestée
Alors que l’opposition à la réforme, accusée de mettre en place la sélection à l’entrée de l’université, n’avait mobilisé que faiblement à la fin de l’année 2017, celle-ci devient plus prégnante en mars et en avril. Outre certaines équipes universitaires qui refusent de participer à l’examen des dossiers des candidats et à les « classer », les blocages de facultés se multiplient.
A la fin de mars, à l’université de Montpellier, l’évacuation violente d’un amphithéâtre occupé par des étudiants opposés à la loi ORE porte l’attention médiatique sur une mobilisation étudiante jusqu’alors invisible. Elle lui sert aussi de catalyseur. Pendant tout le mois d’avril et jusqu’à la mi-mai, une quinzaine d’universités (sur soixante-dix), pas toujours les mêmes, voient leur fonctionnement perturbé par des blocages partiels ou totaux. Face à la fermeté du gouvernement, et à l’incapacité du mouvement à faire descendre massivement les étudiants dans la rue, le blocage des examens devient un moyen d’action.
Parcoursup, à l’épreuve du réel
Aujourd’hui, le mouvement de contestation est en fort recul, et les commissions d’examen des vœux ont terminé leur travail. Le ministère de l’enseignement supérieur insiste sur le fait que le 22 mai n’est pas une date « fatidique » dans la mesure où elle ne correspond qu’aux premiers résultats de Parcoursup.
Il multiplie à cet égard les messages aux candidats leur expliquant qu’ils ne doivent pas s’inquiéter s’ils n’ont pas tout de suite une réponse à leurs vœux, que la procédure est maintenant « progressive ».
En effet, à l’occasion de cette réforme, le choix a été fait de ne pas demander aux candidats de classer leurs vœux par ordre de préférence. Auparavant, ce classement permettait à l’algorithme d’APB de leur proposer automatiquement une seule formation, la plus haute possible. Dorénavant, ils recevront des réponses pour chacun de leurs vœux — « oui », « oui si », « en attente », et « non » pour les filières sélectives —, auxquelles ils devront à leur tour répondre dans un temps imparti pour libérer des places.
Un grand nombre de candidats devraient donc recevoir des réponses « en attente » mardi soir, les meilleurs d’entre eux monopolisant, au moins dans un premier temps, de nombreuses places. De la rapidité avec laquelle ils libéreront ces places dépendra l’efficacité de la procédure. De la capacité à donner une place dans l’enseignement supérieur à tous ceux qui le souhaitent, comme la ministre l’a souvent promis face aux contestations, dépendra l’acceptation de la réforme. Réponse d’ici à quelques semaines.