En Allemagne, 50 000 personnes à un concert contre « la haine » d’extrême droite
En Allemagne, 50 000 personnes à un concert contre « la haine » d’extrême droite
Les organisateurs entendaient faire en sorte « que les gens de Chemnitz ne se sentent pas seuls » face à la xénophobie.
Cet événement avait pour but de faire en sorte « que les gens de Chemnitz ne se sentent pas seuls » face à l’extrême droite. / HANNIBAL HANSCHKE / REUTERS
« Nous sommes plus nombreux. » Quelque 50 000 personnes ont assisté, lundi 3 septembre au soir, à un concert rock contre la xénophobie dans la ville de Chemnitz, théâtre cette semaine de plusieurs rassemblements de l’extrême droite.
Les organisateurs n’en attendaient pas tant : ils avaient prévu entre 20 000 et 30 000 spectateurs pour ce concert gratuit, où se sont produits des groupes de la scène locale et nationale. « Il ne s’agit pas ici d’une bataille gauche contre droite mais d’une évidence, et ce peu importe votre couleur politique : s’opposer à une foule d’extrême droite qui devient violente », a dit Campino, chanteur vedette du groupe Toten Hosen, très célèbre en Allemagne. Qui a expliqué sa présence « en tant que citoyen » et non chanteur :
« Il est très important que nous arrêtions ce mouvement tant que c’est encore une boule de neige et avant que cela ne devienne une avalanche. »
Manifestations de la droite ultra
L’événement, prévu depuis une semaine, avait pour vocation de faire en sorte « que les gens de Chemnitz ne se sentent pas seuls » face à l’extrême droite. Cette semaine, plusieurs manifestations contre les étrangers ont en effet été organisées par l’extrême droite dans cette petite ville de Saxe.
Samedi, ils étaient 8 000 à dénoncer la mort d’un Allemand de 35 ans, tué de plusieurs coups de couteau dans la rue. La justice a arrêté un demandeur d’asile irakien de 22 ans, soupçonné du meurtre, et un Syrien, complice supposé dans cette affaire.
En marge de ce rassemblement, des violences ont éclaté, faisant une vingtaine de blessés, dont un Afghan de 20 ans roué de coups par des hommes masqués, des militants du Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD) et une équipe de télévision. Des actes vivement condamnés par le gouvernement lundi.
Une foule de 50 000 personnes s’est pressée pour voir les concerts gratuits. / HANNIBAL HANSCHKE / REUTERS
« Il nous faut quitter nos divans douillets »
« Ce à quoi nous avons malheureusement assisté au cours des derniers jours — y compris lors du week-end, ces marches d’extrémistes de droite et de néonazis prêts à la violence — n’a rien à voir avec le deuil d’un homme » mais vise « à lancer un message de haine contre les étrangers, les responsables politiques, la police et la presse libre », a déclaré le porte-parole de Mme Merkel, Steffen Seibert.
Une prise de parole qui faisait suite aux propos du ministre des affaires étrangères appelant les Allemands à redoubler de vigilance face à l’extrême droite. « Il nous faut quitter nos divans douillets et prendre la parole », a déclaré le responsable social-démocrate Heiko Maas ce week-end. Lundi, les habitants de Chemnitz ont aussi été invités sur les réseaux sociaux à participer à une « manifestation aux fenêtres » en reprenant ce mot d’ordre et en suspendant à leur balcon des messages de tolérance.
L’AfD en progression
L’extrême droite, portée par le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD), première force d’opposition à la chambre des députés à Berlin, s’est saisie de cet homicide de Chemnitz pour relancer ses critiques contre les migrants et la politique d’Angela Merkel à leur égard. La chancelière est accusée d’avoir fait grimper l’insécurité dans le pays en accueillant en 2015 et en 2016 plus de un million de demandeurs d’asile.
L’extrême droite, portée par le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD), est la première force d’opposition à la chambre des députés à Berlin. / HANNIBAL HANSCHKE / REUTERS
L’AfD mène aussi depuis des mois campagne au sujet du meurtre d’une adolescente de 15 ans à la fin de 2017 dans une supérette de la ville de Kandel, dans le sud-ouest du pays, près de la frontière française. Son ancien petit-ami, Abdul D., un demandeur d’asile disant venir d’Afghanistan, a été condamné lundi pour ces faits à huit ans et demi de prison. Il devrait être expulsé au terme de sa détention.
La mobilisation contre les migrants porte en tout cas ses fruits électoralement à l’extrême droite : selon les derniers sondages, l’AfD est en progression dans les intentions de vote, à environ 16 %, et en troisième position, juste derrière le Parti social-démocrate, qui n’est, lui, qu’à 17 %.