« Le Chant du loup » : aventures nucléaires entre l’Europe et la Russie
« Le Chant du loup » : aventures nucléaires entre l’Europe et la Russie
Par Thomas Sotinel
Le réalisateur Antonin Baudry immerge le spectateur dans le monde des sous-marins lanceurs d’engins.
Le long prologue du Chant du loup ramènera les spectateurs les plus âgés au temps des bandes dessinées patriotiques de l’ère gaulliste, quand Michel Tanguy ou Rémi Herphelin défendaient la force nucléaire française contre les menées factieuses. Cette fois, les héros sont submergés. A bord d’un sous-marin, au large de la Syrie, le commandant Grandchamp (Reda Kateb) et son second D’Orsi (Omar Sy) dépendent de l’ouïe fine de Chanteraide (François Civil), un jeune officier chargé de décrypter les bruits captés par les appareils du submersible. Leur mission est de retrouver des nageurs de combat partis à terre pour quelque opération secrète.
Pendant que Chanteraide trie les signatures sonores des moteurs (chalutier, vaisseau ennemi, faune marine…), les officiers parlent un langage si crypté qu’on est obligé de croire à sa véracité (attestée par des experts indépendants) : un terme sur trois est un chiffre, un autre tiers du vocabulaire est fait d’acronymes, il faudra se contenter du reste pour essayer de suivre. La situation se tend, l’intervention d’un mystérieux sous-marin (non, ce n’est pas le retour du capitaine Nemo) manque de faire capoter la mission, qui se termine par un haut fait d’armes, avant que tout le monde ne retourne à Brest.
Arrivé sur l’île Longue, Le Chant du loup change de nature. Il ne s’agit plus d’encourager les jeunes gens à voir du pays en épiçant le quotidien de la Royale de quelques aventures. Le scénario d’Antonin Baudry (auteur de la bande dessinée Quai d’Orsay, qui fait ici ses débuts de réalisateur) imagine un pic de tension entre l’Europe et la Russie, et Grandchamp se voit confier le commandement d’un sous-marin nucléaire lanceur d’engins au moment où Moscou vient d’envahir le sud de la Finlande.
Ludique et sérieux à la fois
L’ambition d’Antonin Baudry est admirable, sans doute excessive. Après tout, pour se tirer d’une problématique similaire, Stanley Kubrick avait choisi la voie de la satire dans Docteur Folamour. Antonin Baudry est à la fois plus ludique et plus sérieux. Pour arriver à placer le commandant Grandchamp devant le dilemme le plus terrible que puisse affronter un être humain (risquer l’extinction de l’espèce pour sauver son pays), le récit se fragmente en une suite d’épisodes et de coïncidences tirés par les cheveux. Impossible d’en évoquer la philosophie (car c’est bien d’une question fondamentale qu’il retourne) sans les dévoiler, et mieux vaut préserver les surprises que peut réserver Le Chant du loup que le disséquer.
Le réalisme des procédures (on apprendra au moins ce qui nous sépare de l’apocalypse – quelques formulaires abscons) et des décors (la marine nationale n’a pas été chiche dans son appui) ne suffit pas à dissimuler ces artifices, pas plus que les efforts des acteurs. Reda Kateb et Omar Sy prennent le parti de la façade d’impassibilité sur fond fébrile. Même Mathieu Kassovitz (l’amiral), qui ne manque pourtant pas d’expérience géopolitique, semble dépassé par ces enjeux.
Le Chant du Loup - Bande-annonce Officielle HD
Durée : 01:41
Film français d’Antonin Baudry. Avec Reda Kateb, Omar Sy, Mathieu Kassovitz, François Civil (1 h 55). Sur le Web : pathefilms.com/film/lechantduloup