Attention : cet article, écrit après l’épisode 4 de la saison 8 de Game of Thrones, contient autant de spoilers que de comparaisons politiques hasardeuses. C’est-à-dire beaucoup trop.

« Je suis désolé, mais tu ne comprends rien : Game of Thrones est avant tout une série politique. » La remarque, cinglante, a volé à l’occasion d’une réunion éditoriale. Et c’est vrai. Derrière ses heaumes et ses dragons, la pépite audiovisuelle de HBO est fondamentalement un House of Cards maquillé d’heroic-fantasy, une série sur les coulisses et les manigances du pouvoir.

L’épisode 4 de la saison 8 en a fait une longue démonstration : négociation d’alliances, clans qui se fissurent, discussions en coulisses, ambitions qui s’affichent… Alors que se profile l’ultime bataille pour savoir qui va conquérir le Trône de fer pendant les deux derniers épisodes (l’épisode 5, diffusé le 12 mai, puis l’épisode 6, le 19 mai), Pixels décidé de traiter la fin de Game of Thrones comme une élection un peu musclée, avec des politiques mal lavés, mais pas moins ambitieux. Tour d’horizon.

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Arya Stark (Parti starkiste, non candidate). La Nicolas Hulot de Westeros. Consensuelle et plébiscitée, avec un talent unique pour se concentrer sur les causes à la fois les plus vitales et les plus ardues – écologie, roi de la nuit, même combat –, elle sait aussi se défausser au moment où l’on voudrait s’en remettre entièrement à elle. Sera forcément approchée par un ou une des candidats, tant elle conserve naturellement un important réservoir de voix.

Bran Stark (Parti starkiste, non candidat). Abstentionniste, ne se prononce pas.

Brienne de Torth (Parti starkiste, non candidate). Prise dans des frasques sentimentales, elle s’est éloignée du jeu politique, dont elle n’était déjà pas très proche.

Cersei Lannister (Les Lannisteriens, candidate). La locataire actuelle du Trône de fer se sait en position de force et n’entend céder en rien. Sa manière de prendre de haut sa principale rivale rappelle l’attitude de François Mitterand face à l’ambitieux Jacques Chirac en 1988 : de l’indifférence, puis juste ce qu’il faut de morgue et d’assurance pour paraître intouchable. Sa tendance à prendre le concept d’assassinat politique au pied de la lettre pourrait toutefois lui jouer des tours.

Daenerys Targaryen (Parti targaryen, candidate). La favorite plafonne dans les sondages. Certes, son volontarisme séduit les électeurs réformistes, mais l’électorat populaire semble moins enclin à lui faire confiance qu’avant. Dans le pool de journalistes politiques qui la suivent au quotidien, plusieurs évoquent par ailleurs des prises de décisions hâtives, et son peu d’écoute pour ses conseillers. La fatigue accumulée de la fin de campagne ? Peut-être. A sa décharge, celle-ci a été endeuillée par plusieurs accidents funestes et un drame familio-reptilien.

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Euron Greyjoy (Les Lannisteriens, non candidat). Le roi des Iles de Fer n’est pas populaire et il n’en a cure. Un poste de premier ministre est promis au porte-flingue du gouvernement sortant en cas de victoire dans les urnes, et cela lui suffit. Intraitable sur les questions marines, il a tué un dragon, mettant en difficulté Daenerys Targaryen. Mais attention : si celle-ci passe, il peut probablement dire adieu à sa carrière politique.

Gendry Baratheon (Parti starkiste, non candidat). Daenerys Targaryan lui a promis un ministère. Il est content. A échoué à encarter Arya Stark. Un peu moins content.

Ghost. Loup abandonné, a priori pas candidat. En le quittant sans lui donner une papouille sur sa tétête, Jon Stark a probablement définitivement perdu les voix des amis de la SPA.

Jaime Lannister (Les Lannisteriens, non candidat). Le Manuel Valls de Westeros : bien malin celui qui saura dire quel est son parti d’attache. Après avoir été l’homme de main de sa sœur Cersei Lannister, il a pris ses distances et adhéré au Parti starkiste, ce qui ne manque pas d’ironie eu égard à son passé avec le PS. Mais à une semaine du premier tour, dans une nouvelle volte-face, il vient de rendre sa carte.

Jon Snow (Parti targaryen, non candidat ; commence à être connu aussi sous le nom d’Aegon Targaryen). Ira, ira pas ? Bien que crédité d’excellents scores dans les sondages, l’ancien roi du Nord se refuse, pour l’instant, à se porter candidat, au nom de son pacte passé avec Daenerys. Problème : les partisans du Parti targaryen semblent de plus en plus douter des capacités de leur candidate officielle à parvenir au pouvoir, et la frange snowiste se fait de plus en plus pressante. Avec le risque d’un éparpillement des voix qui profiterait à la présidente sortante…

Missandei (Parti targaryen, non candidate). Rayée des cartes électorales.

Lord Varys (Parti targaryen, non candidat). L’eunuque estime qu’il faut un pénis pour gouverner. Selon toute logique, il ne devrait pas se porter candidat. Par contre, il pousse pour que le Parti targaryen fasse de Jon Stark son nouveau champion.

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Sansa Stark (Parti starkiste, candidate). Troisième des sondages, la reine du Nord est surtout occupée à surveiller la campagne de Daenerys, avec qui sa rivalité n’est pas que politique. Lorgne-t-elle véritablement le Trône de fer ? Sa divulgation du contenu d’un document secret-défense est-elle une erreur, ou une manigance pour mettre en difficulté ses adversaires ? Pour cette ancienne petite candidate qui a pris une place inattendue dans les sondages, cette troisième place est déjà une victoire. Manifestement, elle prépare l’après.

Tormund (Parti starkiste, non candidat). Parti briguer le renouvellement de son mandat local aux municipales de Sauvageons-les-Flots.

Tyrion Lannister (Parti targaryen, non candidat). Jacques Attali de Westeros, il a été le conseiller de presque tous les dirigeants. Aujourd’hui directeur de campagne de Daenerys, il se démène sur tous les fronts, y compris lors d’un débat télévisé qui l’a opposé à la candidate adverse, sa sœur Cersei Lannister, durant lequel il a tenté de jouer la corde sensible – en vain. Alors que l’aile snowiste gagne en importance, il incarne le courant loyaliste du parti targaryen. L’avenir dira s’il a choisi le bon camp.