Faut-il acheter le PlayStation VR, le casque de réalité virtuelle de Sony ?
Faut-il acheter le PlayStation VR, le casque de réalité virtuelle de Sony ?
Par Damien Leloup, William Audureau
La rédaction de Pixels a testé le nouveau périphérique phare de la PlayStation 4. Les délices des paradis artificiels, au prix de quelques nausées...
Le PlayStation VR (PS VR), le casque de réalité virtuelle de Sony, sort jeudi 13 octobre sur PlayStation 4, au prix de 400 euros - 500 euros en comptant l’indispensable caméra et les contrôleurs supplémentaires. Attendu comme le chaînon manquant entre des casques très puissants mais très coûteux et des expériences bon marché mais moins immersives, le PS VR réussit en partie son pari, sans parvenir à s’affranchir des lourdeurs liées jusqu’à aujourd’hui à l’expérience de la réalité virtuelle – problèmes de nausées notamment.
L’installation
Le PlayStation VR et ses « quelques » câbles et accessoires. | Le Monde
Installer le PS VR, c’est se lancer dans un « moment Ikea ». Heureusement, les pièces, au nombre d’une demi-douzaine, sont numérotées tant il est facile de s’y perdre. Avec un peu de flair – ou une lecture attentive du mode d’emploi, bien fichu ; mais qui lit le mode d’emploi d’une console ? –, on finit par comprendre.
Ainsi, le câble HDMI reliant la console à la télé doit désormais être dérivé à travers un boîtier, qui possède lui-même son alimentation indépendante, et se connecte au casque grâce à un long double fil. Une petite caméra instable doit quant à elle se brancher à l’arrière de la console, et se poser tant bien que mal devant le joueur. Vous êtes perdu ? C’est normal.
Autre inconvénient : les fils. Partout, dans tous les sens. Ça pend, ça s’emmêle, ça déborde et ça zigzague, dans une soirée échangiste de serpentins électriques aussi envahissants que disgracieux. On voudrait dégoûter son colocataire ou son conjoint de la laideur des appareils de nouvelle technologie qu’on ne s’y prendrait pas autrement. A moins que tant d’inélégance esthétique n’ait qu’une fonction : pousser le joueur à vite enfiler le casque pour ne plus voir l’état de son séjour.
Les nostalgiques de la caméra de reconnaissance de mouvement de la Xbox 360, Kinect, retrouveront quelques vieux réflexes similaires, comme le besoin de se positionner précisément face à la caméra avant chaque partie. Un calibrage fastidieux et relativement aléatoire, puisque le dispositif de reconnaissance optique ne tient pas en équilibre, et que la synchronisation du signal dans le casque répond à une logique inconnue d’un terrien normalement constitué.
Résultat : dans certains jeux, l’écran de menu de la PlayStation 4 n’apparaît qu’en baissant son regard, casque sur les yeux, au niveau de ses pieds, tandis que pour une partie de Batman, la console nous a suggéré de nous mettre debout sur le canapé pour jouer. OK, l’homme-chauve-souris est un chevalier de la nuit, mais perché, debout, à l’aveugle, au milieu de son salon pour jouer, on se sent plus flamand rose égaré que superhéros redoutable.
Le casque
Le PlayStation VR. | LE MONDE
Première bonne surprise : le PS VR est confortable, on sent très peu son poids… dans un premier temps. Au bout d’une heure de jeu, on finit par le ressentir. Surtout, si vous avez serré trop fort, ça tire sur l’arrière du crâne… Les fils des écouteurs ont aussi une fâcheuse tendance à se prendre dans le câble, qui lui-même ne rechigne pas à tenter quelques croche-pattes sur son innocent utilisateur.
La mise en ligne n’est pas forcément très intuitive, d’autant qu’il faut allumer indépendamment la console et l’appareil, contrôler la PS4 dans les menus ou dans le casque, et naviguer selon les cas à la manette classique ou aux PS Move, deux manettes à reconnaissance de mouvement lancés par Sony en 2010 et réexploitées pour l’occasion. Clairement, l’expérience n’a rien de la simplicité d’utilisation de la Wii, ou juste d’une PlayStation 4 standard.
L’expérience
Une fois le PS VR allumé, on plonge enfin dans les délices des paradis artificiels. Le casque est bien englobant, l’image est conforme à ce qu’on peut attendre d’un casque à mi-chemin entre le très haut de gamme et les téléphones portables.
Le CD de démonstration fourni avec le périphérique donne le ton : comme le disque de démonstration de la première Playstation, c’est parfois un peu laid quand on s’attarde sur les détails, mais on sent le potentiel de ce qu’il sera possible de vivre. En fonction des jeux, on oscillera entre le très beau (Batman), le très moche à l’ancienne (Battlezone) et le très flou (Drive).
En fonction des jeux et des préférences, le PS VR se pratique assis ou debout, à la manette ou avec les Playstation Move. Ce qui influe grandement sur les sensations ressenties : assis dans un cockpit, on est tout de suite à l’aise. Debout dans la peau de Batman, il faut un peu plus de temps pour s’habituer.
Surtout, les jeux les plus riches en sensation fortes et les plus ambitieux n’y vont pas avec le dos de la cuillère : Eve Valkyrie, qui vous propulse dans l’espace aux commandes d’un vaisseau de chasse, a provoqué une sensation de nausée quasi immédiate chez l’un de nos testeurs. De même, RIGS, qui vous permet de prendre le contrôle d’un exosquelette de combat dans une sorte de match de basket avec des armes, est beau, nerveux, et rapide… Mais donne très vite le mal de mer, peu aidé par son système de visée (il faut regarder sa cible et donc tourner souvent la tête).
Cet abat-jour Ikea, vétéran de plusieurs déménagements, n’a pas survécu à l’entraînement au batarang d’Arkham VR.
Avalé visuellement par le monde virtuel, il devient également très difficile de se repérer dans la réalité. Où sont les accoudoirs du canapé ? Ou ai-je posé mon verre de sirop menthe ? Si je bouge un peu la tête, est-ce que je ne risque pas de me prendre l’étagère ?
Semblable à n’importe quel casque de réalité virtuelle, le PS VR s’apparente à une partie de Colin Maillard hautement risquée. Dans la meilleure hypothèse, un conjoint, un ami, ou un colocataire, sera là pour vous avertir d’un éventuel danger – non sans réfréner un petit rire sarcastique insolent. Dans la moins optimiste, seul dans l’intimité de votre chambre ou de votre studio, vous finirez peut-être, comme nous, par éclater un plafonnier ou par vous cogner le bras à une poutre.
Jouer en réalité virtuelle change le rapport à l’espace, mais aussi au temps : on ne joue pas à un jeu de tir avec le PS VR comme sur un écran classique. Ne prévoyez pas de faire des sessions de jeu de quatre heures avec vos amis en ligne : au-delà d’une heure, le cerveau et la nuque fatiguent rapidement. L’expérience peut être intense, elle se déguste plutôt par petites sessions, avec des pauses régulières.
Les jeux
C’est, en pratique, le principal problème du PS VR : les titres vendus au lancement le desservent, avec beaucoup de jeux qui présentent des problèmes importants. Menus peu intuitifs (presque tous), problèmes de calibration, commandes parfois absconses, jeux qui ne font rien pour éviter les nausées chez les personnes sensibles… Sans oublier leur prix, parfois prohibitif (20 € pour Batman Arkham VR, dont le scénario se finit en une heure).
Paradoxalement, certains des jeux les plus réussis sont ceux qui essayent le moins d’en mettre plein la vue du joueur, comme Wayward sky, un magnifique jeu d’aventure et de puzzles, ou PlaysStation VR World, avec ses expériences simples et bien calibrées.
Dans le reste des titres disponibles au lancement, certains ont su anticiper les limitations de la réalité virtuelle et y ont trouvé de bonnes solutions : Battlezone avec ses commandes simples, Batman avec ses choix radicaux (on ne peut pas se déplacer autrement qu’en allant à des endroits prédéterminés).
Mais plusieurs jeux essayent de faire trop de choses en même temps : Until Dawn : Rush of Blood mélange rail shooter et horreur sans réussir vraiment à bien faire les deux, Eve Valkyrie propose des batailles spatiales nerveuses mais semble avoir oublié que tous les joueurs n’ont pas l’oreille interne d’un pilote de chasse…
Les futures sorties sur le PS VR rattraperont-elles le tir ? En juin, au Salon E3 de Los Angeles (Californie), Pixels a pu tester plusieurs titres encore en cours de développement, avec leur lot de bonnes et de moins bonnes surprises. Ainsi Eagle flight d’Ubisoft, qui vous permet de voler comme un oiseau au-dessus de Paris, proposait une expérience vraiment amusante, tandis que la version en réalité virtuelle de Resident Evil 7 provoquait des nausées quasi immédiates, la faute à des mouvements de caméra trop brusques dans la version de démonstration.
Faut-il acheter le PS VR ? Certains défauts sont agaçants, comme l’encombrement ou le paramétrage laborieux de la caméra, sans être bloquants. La véritable question est surtout l’intensité de la nausée ressentie, qui varie d’une personne à l’autre, dépend des jeux, et de l’état de fatigue du moment – voire du menu du repas précédent. Elle s’amenuise avec l’habitude, mais reste le principal point de blocage pour qui voudrait franchir le pas – un essai avant achat est fortement recommandé.
En bref
On a aimé :
- Le design du casque, élégant et confortable
- L’effet « wahou » à certains moments
- L’immersion dans des univers imaginaires
On n’a pas aimé :
- L’installation compliquée et envahissante
- La nausée, très prononcée dans certains jeux
- Le côté stressant de ne plus rien voir de la réalité
- Le calibrage hasardeux et contraignant
C’est plutôt pour vous si…
- Vous n’êtes pas sujet au mal de mer
- Vous avez un grand salon sans meubles
- Vous aimez les expériences originales
- Vous avez déjà le Virtual Boy de Nintendo
- Vous avez toujours rêvé d’écraser votre chat sans faire exprès
Ca n’est plutôt pas pour vous si…
- Vous êtes malade quand vous lisez en voiture
- Vous avez des enfants en bas âge autour de vous…
- … Ou un micro-ondes en flammes (ça arrive)
- D’une manière générale, vous aimez savoir où vous êtes
- Et que votre salon ne ressemble pas à un capharnaüm
- Vous recherchez des expériences ludiques réalistes
La note de Pixels :
1 anti-vomitif trois fois par jour