« Tempête de sable » : dix ans de vie et 22 jours de tournage
« Tempête de sable » : dix ans de vie et 22 jours de tournage
M le magazine du Monde
Il aura fallu dix ans à la cinéaste israélienne Elite Zexer pour mener à terme cette histoire d’amour et de mariage forcé chez les Bédouins de la région du Néguev, en salle ce mercredi 25 janvier.
Elite Zexer a démarré le projet « Tempête de sable » à 26 ans. | DR
Depuis des mois, la cinéaste israélienne Elite Zexer n’a pas défait sa valise : son premier film, Tempête de sable, a été sélectionné au Festival de Berlin, a remporté le Grand Prix au Festival de Sundance ainsi que six Ophirs (l’équivalent israélien des Césars), dont ceux du meilleur film et de la meilleure réalisatrice. Déjà, son premier court-métrage, Take Note, sur son expérience dans l’armée, comme son deuxième, sur des pompiers dans un quartier ultra-orthodoxe au nord de Tel-Aviv, avaient fait sensation.
Pour Tempête de sable, la réalisatrice s’est inspirée des souvenirs de sa mère qui partait photographier les femmes bédouines du Néguev. « Elle revenait chargée d’histoires incroyables qui m’ont donné envie de l’accompagner. » Un jour, elles rencontrent une jeune femme victime d’un mariage forcé. « Quand elle a dit : “Cela n’arrivera jamais à ma fille”, j’ai su, au plus profond de moi, que j’allais faire un film de cette histoire », se souvient Elite.
« Raconter l’histoire de l’intérieur »
Tempête de sable commence le jour où un homme épouse sa deuxième femme. Alors que sa première épouse, Jalila, ravale son humiliation, elle découvre que leur fille aînée, Layla, a une relation avec un de ses camarades d’université, et se persuade que son père la laissera l’épouser.
« Tempête de sable, c’est quasiment dix ans de ma vie », explique la réalisatrice de 36 ans, exigeante et déterminée. Déjà quatre ou cinq ans rien que pour écrire le scénario : « Je ne voulais absolument pas qu’on entende ma voix, ni qu’il y ait un quelconque soupçon de jugement, je voulais raconter l’histoire de l’intérieur. »
Layla (Lamis Ammar), héroïne de « Tempête de sable » (ici l’affiche israélienne), est une étudiante bédouine qui lutte pour prendre son destin en main. | 2-Team Production
Elite passe du temps à recueillir des témoignages, à prendre des notes. « Je voulais que le film soit le plus juste possible et, en même temps, qu’il soit universel, qu’apparaissent les questions majeures : un premier amour, des parents séparés, les relations père-fille, mère-fille. » Le financement trouvé, arrive l’étape cruciale du casting : « Je savais dès le début que je ne pourrais pas faire jouer des femmes de la région dont parle le film. Il est en effet impossible pour elles d’être filmées et de se montrer en images devant un public sans nuire à leur réputation. Nous avons donc décidé de travailler avec des actrices professionnelles arabes, qu’il a fallu coacher afin qu’elles apprennent le dialecte bédouin. »
Dix ans de vie, et, in fine, vingt-deux jours de tournage : « Les meilleurs de ma vie », confie-t-elle dans un large sourire. Le dernier jour, Elite Zexer se souvient encore avoir marché pendant trois quarts d’heure dans un Tel-Aviv, fait suffisamment rare pour être noté, ruisselant de pluie. Trois quarts d’heure à pleurer, d’émotion, de joie, et à se demander à quoi ressembleraient désormais ses matins. Pour son deuxième long-métrage, elle a déjà une idée : « J’ai trouvé une autre obsession ! »
« Tempête de sable », d’Elite Zexer. Avec Lamis Ammar, Ruba Blal, Hitham Omari. En salle le 25 janvier.
TEMPÊTE DE SABLE Bande Annonce (Film Israélien - 2017)
Durée : 02:01