« L’opposition veut provoquer un coup d’Etat », dénonce le pouvoir togolais
« L’opposition veut provoquer un coup d’Etat », dénonce le pouvoir togolais
Propos recueillis par Christophe Châtelot (Lomé, envoyé spécial)
Le ministre de la communication Guy Lorenzo défend la réforme constitutionnelle en cours qui permettrait au président Gnassingbé de se représenter en 2020 et en 2025.
Devant le siège de l’ONU, à New York, le 19 septembre 2017, manifestations d’opposants au régime de Faure Gnassingbé, au pourvoir depuis 2005 après avoir succédé à trente-huit années de règne de son père. / COREY SIPKIN/AFP
Guy Lorenzo est le ministre de la communication, de la culture, des sports et de la formation civique. Formé en France, ancien cadre de la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface), il a été nommé au gouvernement togolais après la réélection, en 2015, de Faure Gnassingbé, pour un troisième mandat de cinq ans.
L’opposition demande le départ du président et boycotte les débats au Parlement sur la réforme constitutionnelle proposant la limitation des mandats et une élection à deux tours. Comment sortir de l’impasse ? Par un référendum ?
Guy Lorenzo Soit on constate le blocage et le texte revient vers le gouvernement qui peut faire d’autres propositions, soit on le soumet à référendum, ce que ne veut pas l’opposition parce qu’elle considère que le fichier électoral n’est pas fiable.
L’opposition veut provoquer un scénario à la Burkina Faso. Que les manifestations dérapent. Mais que ce soit la rue ou les militaires, dans les deux cas, cela s’appelle un coup d’Etat. Ceux qui parlent au nom du peuple parlent au nom d’un certain peuple. Le président a été élu en 2015 avec 65 % des voix. L’opposition se dit qu’elle perdra ce référendum et que la seule solution est la rue en espérant que ça dégénère pour attirer la sympathie de la communauté internationale.
On reproche au président d’avoir attendu dix ans pour mener les réformes. Mais une réforme ne se mène pas toute seule. Il faut du temps. Elle ne se fait pas par décret. Nous sommes obligés de nous mettre autour de la table.
Le point de crispation porte sur le fait que la réforme constitutionnelle autoriserait le président actuel à se représenter alors qu’il est en poste depuis douze ans et après avoir succédé aux trente-huit années de règne de son père ?
C’est cela qui fait peur. Mais veut-on changer la Constitution pour chasser le président du pouvoir juste pour que d’autres personnes le remplacent ? L’opposition doit comprendre que le président veut limiter le nombre de mandats. Certes, Faure a contre lui son nom et sa lignée.
Dimanche, la Conférence des évêques a également demandé « urgemment » l’application des réformes. N’est-ce pas le signe que le front d’opposition au régime s’élargit ?
L’Eglise jette de l’huile sur le feu, elle est sortie de son rôle. Mais elle pèse un poids. Sur le fond, tout le monde veut aller aux réformes, mais l’Eglise, avant de remonter cette opinion, aurait dû demander au pouvoir et à l’opposition de se mettre d’accord. Il y a encore une place pour le dialogue si l’opposition le veut. Mais cette crise passera, comme toutes les crises. Ce soubresaut est un signal pour le gouvernement d’aller plus loin et plus vite. Bougez !