Carles Puigdemont n’a pas de mots assez dur contre Madrid. Le président du gouvernement catalan destitué a affirmé, mardi 7 novembre, avoir décidé de partir en Belgique parce que le gouvernement espagnol « préparait une vague de violence » dont il les aurait tenus pour responsables.

Dans une interview à Catalunya Radio, M. Puigdemont a assuré que son gouvernement avait décidé de se diviser : lui-même et quatre de ses « conseillers » sont partis pour la Belgique afin d’internationaliser leur cause ; les autres ont répondu à la convocation de la justice, qui les a placés en détention provisoire.

« Je crois que nous ne nous sommes pas trompés. Je suis absolument convaincu que l’Etat espagnol avait préparé une vague de répression très dure, de violence dont il nous aurait tenus tous pour responsables », a insisté l’homme politique, qui estime représenter un « gouvernement en exil ».

En revanche, M. Puigdemont n’a pas expliqué comment son départ en Belgique aurait évité la violence qu’il accuse Madrid d’avoir planifiée.

« Loin de la pratique démocratique »

Soupçonnés, comme l’ensemble du gouvernement catalan destitué par Madrid, de « rébellion, sédition et détournement de fonds publics », M. Puigdemont et ses quatre ministres sont visés par un mandat d’arrêt européen émis par justice espagnole. La justice belge a toutefois décidé de les laisser libres sous conditions, en attendant qu’une autre juridiction belge examine le mandat d’arrêt, le 17 novembre.

Lundi, M. Puigdemont s’est appuyé sur les décisions différentes des juridictions belges et espagnoles pour accuser l’Espagne d’être « loin de la pratique démocratique » en emprisonnant « injustement » huit anciens membres du gouvernement indépendantiste catalan. Il a également souligné qu’il avait été laissé « libre et sans caution », en référence à Santi Vila, le ministre des entreprises catalans, libéré sous caution par la justice espagnole pour avoir démissionné avant le vote de l’indépendance.

« En Belgique, ils nous donnent la liberté sans caution, tandis qu’en Espagne nous serions emprisonnés », avait renchéri Meritxell Serret, l’une des anciens ministres à avoir suivi de Carles Puigdemont à Bruxelles.

« Instrumentaliser la crise catalane »

En Belgique, l’affaire n’a pas manqué de provoquer des remous au sein du gouvernement fédéral, au sein duquel les nationalistes flamands de la N-VA (Alliance néo-flamande), sont très favorables à la cause catalane. Le ministre des affaires étrangères, Didier Reynders, a appelé lundi à « laisser la justice belge et la justice espagnole faire leur travail », loin des considérations politiques.

En effet, depuis l’arrivée de M. Puigdemont à Bruxelles, la tension monte dans la classe politique belge, et entre responsables politiques flamands et espagnols. Dimanche, le ministre de l’intérieur, Jan Jambon, issu de la N-VA, a déclaré qu’il « se posait des questions » sur le fait que le gouvernement espagnol puisse « aller aussi loin » dans la répression en Catalogne. « Si la même chose se passait en Hongrie et en Pologne, je pense qu’on aurait des réactions très différentes », a-t-il poursuivi.

Le député européen espagnol Esteban Gonzalez Pons, membre du parti conservateur, au pouvoir en Espagne, a vivement répliqué. « M. Jambon appartient à un parti qui a collaboré avec l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale, un parti xénophobe qui n’est un allié recommandable pour personne », a-t-il lancé, accusant les nationalistes flamands d’instrumentaliser la crise catalane.

Mardi, environ 200 maires indépendantistes catalans ont prévu de se rendre à Bruxelles pour y « expliquer » la situation en Catalogne.