Mini-série sur Numéro 23 à 20 h 55

Oliver Twist - BBC Title by Peter Anderson Studio
Durée : 01:00

Sa mère, sans mari connu, est morte en couches en lui donnant naissance. Il sera élevé dans une « ferme à bébés »avant d’être placé, pour ses 9 ans, dans l’atelierde filasse de l’hospice.Lui et ses camarades y vivent si affamés qu’un jour, Oliver demande une portion supplémentaire de leur gruau quotidien, en une requête restée célèbre pour tout Britannique : « Please, sir, I want some more » (« S’il vous plaît, monsieur, j’en veux encore »). Ce qui lui vaut une claque, le renvoi de l’orphelinat et un placement chez le croque-mort.

S’ensuivent la fuite vers Londres et la rencontre de The Artful ­Dodger, passé maître en vol à la tire pour le compte du grand Manitou de la choure, Fagin. Voilà pour le début d’Oliver Twist, roman de Charles Dickens que la BBC revivifia en 2007 en commandant une adaptation pour le public du XXIe siècle : sombre mais pas démesurément misérabiliste, fidèle aux personnages mais sans stéréotypes ni caricatures.

Une parfaite immersion dans l’époque

Le scénario, confié à Sarah Phelps, ainsi que la réalisation de Coky Giedroyc restituent donc la dureté des aventures d’Oliver Twist sans aller jusqu’au gothique noir. Ils visent très probablement une possible identi­fication du jeune public actuel en faisant d’Oliver une figure plus ­rebelle que ne l’était le jeune orphelin victime des institutions et vivant à l’époque victorienne – Oliver Twist a d’abord été publié sous forme de feuilleton, entre 1837 et 1839.

Le rythme parfois discordant du récit tient à la construction que la BBC avait prévue pour cette minisérie : un épisode de soixante minutes suivi de quatre épisodes de trente minutes, que le montage français a transformés en deux épisodes de quatre-vingt-dix minutes chacun. L’un des atouts de cette adaptation tient à ses décors, costumes et maquillages qui, comme souvent avec les Anglais, donnent immédiatement l’impression de nous immerger dans une autre époque, avec sa boue, ses dentitions non soignées ou ses intérieurs peu éclairés. Mais le plus grand plaisir que procure cette minisérie vient de sa troupe d’acteurs, choisis parmi les meilleurs du pays.

William Miller incarne  Oliver Twist / MIKE HOGAN / ©BBC 2007

Le personnage de Fagin, par exemple, vieux juif à la tête d’un gang de pickpockets, a été confié au formidable Timothy Spall (Winston Churchill dans Le Discours d’un roi, primé à Cannes pour son interprétation dans Mr. Turner). Un rôle moins pervers et effrayant que dans des adaptations plus anciennes, mais pour lequel Timothy Spall a adopté un accent peu British qui rappelle combien les juifs pouvaient être considérés comme des étrangers, tout en étant nés sur le sol anglais. Autre superbe interprétation, celle de Tom Hardy en Bill Sikes, le vicieux criminel de la bande de Fagin.

En écrivant l’histoire de cet enfant persécuté dans un hospice pour pauvres – avant qu’il soit recueilli par de charmantes bonnes âmes –, Dickens entendait donner la parole aux sans-voix (« Je suis si jeune, monsieur, explique Oliver à M. Bumble. Si abandonné, monsieur, si complètement abandonné »). Et mener une attaque contre les institutions anglaises, leurs usages et leurs abus. La persécution ne tenant pas tant à la classe des nantis, dans son roman, qu’à un « un système continuel d’inhumanité ».

Oliver Twist,minisérie de Coky Giedroyc d’après Charles Dickens. Avec William Miller, Timothy Spall, Gregor Fisher, Tom Hardy, Sophie Okonedo (R.-U., 2007, 2 × 90min).