Désormais lobbyiste, Barroso garde ses entrées à la Commission européenne
Désormais lobbyiste, Barroso garde ses entrées à la Commission européenne
LE MONDE ECONOMIE
L’ancien président du collège européen s’était engagé à ne pas exercer d’activité de lobbying auprès des commissaires au profit de son nouvel employeur.
Prétendument interdit de séjour au Berlaymont, le siège de la Commission européenne, José Manuel Barroso n’aura pas tardé à y faire son retour. Enfin, presque : c’est dans un hôtel — le Silken Berlaymont — sis à cinquante mètres de son ancien bureau, que l’ancien président du collège européen, devenu lobbyiste pour la banque d’investissement Goldman Sachs, a rencontré le Finlandais Jyrki Katainen. Celui-ci est vice-président en titre de la Commission, chargé de la compétitivité, de la croissance et de l’emploi. Il avait été membre de la Commission Barroso 2 durant les derniers mois de celle-ci.
De quoi les deux hommes ont-ils devisé le 25 octobre 2017 ? De « commerce et de défense », à en croire l’ancien premier ministre de la Finlande. Difficile à vérifier : l’entretien a eu lieu en tête à tête, n’a pas été enregistré, et M. Katainen n’aurait pris aucune note durant celui-ci, ce qui empêche toute demande d’accès à son contenu réel.
Interrogé mardi 20 février, le porte-parole de la Commission a expliqué que M. Katainen avait respecté toutes les règles en vigueur en consignant, dès le lendemain, son entrevue dans un registre officiel. Le rendez-vous est certes mentionné, ainsi que le nom de la banque américaine, mais pas celui de M. Barroso, qui s’était engagé à ne pas exercer d’activité de lobbying auprès des commissaires au profit de son nouvel employeur. C’est dans une lettre adressée, le 31 janvier 2018, à l’ONG Corporate Europe Observatory, qui l’interrogeait, que le commissaire a mentionné le nom du superemployé de Goldman Sachs.
« Pas judicieux »
L’embauche de M. Barroso avait défrayé la chronique en 2016, étant donné l’implication de la banque d’affaires dans la crise financière grecque, qui a très largement occupé les institutions européennes durant des années. Devant le tumulte, Jean-Claude Juncker, successeur de M. Barroso à Bruxelles, s’était résolu à saisir le comité d’éthique de l’Union européenne. Lequel estimait mollement, en novembre 2016, que le choix du Portugais — officiellement « conseiller pour le Brexit » — n’était certes « pas judicieux », mais n’enfreignait pas les règles éthiques en vigueur.
Un avis discutable, d’autant que ses auteurs écrivaient que les nouvelles fonctions de M. Barroso auraient « certainement » un lien avec son ex-mandat de président. Une pétition dénonçant le « pantouflage » de l’ancien président avait récolté 150 000 signatures. Pas de quoi impressionner la Commission, qui soulignait le respect par son ancien dirigeant de la période dite « de refroidissement » — dix-huit mois — entre la fin de ses fonctions officielles et son recrutement par Goldman. Mardi, elle maintenait que ses règles étaient parmi « les plus strictes au monde ».