De Brocéliande au Gévaudan, cinq escapades en terres de légende
De Brocéliande au Gévaudan, cinq escapades en terres de légende
Par François Bostnavaron
Chaque dimanche, « La Matinale du Monde » vous invite au voyage. Cette semaine, partez à la recherche du Graal ou faites-vous peur chez Barbe-Bleue : le mystère n’est qu’à quelques heures de route.
LES CHOIX DE LA MATINALE
Surnaturel, histoires sombres, parfois romancées, phénomènes inexpliqués et parfois inexplicables, nos régions ont toutes leur part de mystère et d’énigmes. De la Bretagne au pays cathare, de la Vendée à la Provence, voici cinq idées de destinations légendaires. Et pour rester dans un univers magique, des hébergements insolites et originaux à proximité, dénichés grâce au site abracadaroom.com.
Croiser Merlin dans la forêt de Brocéliande
Inutile de vous plonger dans une carte ni de tenter diverses graphies sur votre GPS dans l’espoir de trouver votre itinéraire, la forêt de Brocéliande n’existe sur aucun plan ! Mais alors, où aller sur les traces du roi Arthur, de Merlin l’Enchanteur, de la fée Morgane, de Viviane et des chevaliers de la Table ronde ? Où retrouver le fameux tombeau de Merlin et la fontaine de Jouvence ? La réponse à cette énigme qui date du XIIe siècle sera finalement tranchée au… XIXe : Brocéliande se trouve… dans la forêt de Paimpont (Ille-et-Vilaine).
Depuis Paimpont, donc, vous pourrez construire votre voyage au Moyen Age. Un arrêt au hameau La Folle Pensée, puis à pied, une – petite – randonnée à travers bois pour atteindre la fontaine enchantée de Barenton. Une fontaine dont on dit qu’elle a abrité les amours de Merlin, alors conseiller du roi Arthur, et de la fée Viviane…
Autre lieu magique, celui du tombeau de Merlin, curieux édifice pour quelqu’un censé être immortel et, à quelques mètres de là, la fontaine de Jouvence. Les inconditionnels de la Table ronde apprécieront la visite du château de Comper et son Centre de l’imaginaire arthurien à Concoret, en bordure du lac de la fée Viviane. Cette année, le centre – qui ouvrira le 18 mars – fête ses trente ans d’existence.
Où dormir ? Le domaine de Kervallon propose yourte, roulotte, cabane sur pilotis à partir de 65 € la nuit.
Visiter : Tourisme-broceliande.bzh, Centre-arthurien-broceliande.com
Traquer la Bête du Gévaudan
Dessin de la bête du Gévaudan (1765). / ARCHIVES DEPARTEMENTALE DE L'HERAULT
On lui attribue entre 88 et 124 victimes… Des agressions souvent mortelles, survenues entre juin 1764 et juin 1767 dans la région du Gévaudan, qui correspond grossièrement aujourd’hui à l’actuelle Lozère et à une partie de la Haute-Loire. Qui est le coupable ? En deux siècles et demi, toutes les hypothèses ont été avancées : un loup, un chien, un animal exotique, un singe, un ours, un loup-garou et, enfin, un homme.
Pour se forger une opinion, direction Auvers (Haute-Loire) et la Maison de la Bête. En été, vous y rencontrerez peut-être Bernard Soulier, président de l’association Au pays de la Bête du Gévaudan, auteur de plusieurs ouvrages sur la Bête, qui est intarissable sur le sujet ! Depuis quarante ans qu’il s’intéresse à l’animal, ce natif de la région s’est forgé sa conviction : la Bête était un hybride de chien et de loup.
Deux autres visites s’imposent : à Saugues (Haute-Loire), d’abord, à une demi-heure d’Auvers, au Musée fantastique de la Bête du Gévaudan ; en vingt-deux scènes, vous trouverez résumée ici l’histoire de la Bête et de ses exactions. Puis direction Saint-Léger-de-Peyre (Lozère), pour enfin voir de vraies bêtes, au parc Les Loups du Gévaudan. Troublant.
Où dormir ? Les lodges insolites Collinéa bénéficient d’une vue panoramique sur le village historique de Saint-Urcize (Cantal) et sur le plateau de l’Aubrac. Des hébergements troglodytiques à partir de 85 € la nuit.
Visiter : Labetedugevaudan.com/aupaysdelabete, Musee-bete-gevaudan.com, Loupsdugevaudan.com
Chercher le Graal en pays cathare
Les ruines de l’ancienne forteresse de Montségur (Ariège). / ADAM BAKER / FLICKR / CC BY 2.0
Le château de Montségur (Ariège) est accroché à un piton calcaire, un pog en occitan, à 1 207 mètres de hauteur. Haut lieu du catharisme, cette citadelle que l’on croyait imprenable fut, à partir de 1232, le siège de l’Eglise hérétique, que le pape Grégoire IX qualifiait de « Synagogue de Satan ».
Pas moins de 600 personnes vivaient là, religieux, soldats, civils, dans un village fortifié pensant être à l’abri des attaques des croisés. Mais à l’hiver 1244, un siège mit fin à cette occupation : plus de 6 000 soldats s’attaquèrent au pog et les cathares furent contraints à la reddition. Plus de 200 d’entre eux ayant refusé d’abjurer leur religion furent livrés au bûcher en contrebas de l’édifice.
Il faut compter une vingtaine de minutes pour se rendre au sommet, pas toujours aisément, mais le jeu en vaut la chandelle ! Arrivé là-haut, on bénéficie d’une vue incroyable sur les montagnes et la vallée ariégeoises.
Le siège a donné lieu à moult rumeurs : l’une dit que certains cathares seraient partis en Lombardie avec leur trésor, une autre assure que le Graal y serait caché. Un archéologue allemand du nom d’Otto Rahn aurait même convaincu le dignitaire nazi Heinrich Himmler que le Graal était bien là… Une anecdote dont s’inspira Steven Spielberg pour le scénario d’Indiana Jones et la dernière croisade. Enfin, on dit que la communauté cathare y rendait un culte au soleil car, à l’occasion du solstice d’été, ses rayons traversent le donjon de part en part. Pas étonnant que, chaque 21 juin, plusieurs dizaines de curieux se massent en haut pour profiter du spectacle.
Où dormir ? Les cabanes perchées dans les arbres de Sainte-Camelle, à Saint-Victor-Rouzaud (Ariège), entre 50 € et 80 € la nuit pour trois personnes.
Visiter : www.montsegur.fr
Se faire peur au château de Barbe-Bleue
Le château de Tiffauges (Vendée). / BENOIT BALON / CC BY-SA 3.0
A Tiffauges, en Vendée, le château qui se dresse sur ce piton de granit, au pied de la Sèvre, a peut-être accueilli deux illustres locataires : Gilles de Rais et son légendaire double romanesque, imaginé par Charles Perrault, Barbe-Bleue…
La vie de Gille de Rais, c’est un peu l’histoire d’une déchéance après une jeunesse brillante : né en 1404, il prend part à la guerre de Cent Ans ; compagnon de Jeanne d’Arc, il est fait maréchal de France à 25 ans. Les honneurs lui ont-ils tourné la tête ? Quoi qu’il en soit, il se met alors à donner des fêtes somptueuses et dépense sans compter, ce qui le mènera rapidement à la ruine. Plutôt que d’emprunter pour se refaire, ce qui n’était pas l’usage à l’époque, il se tourne vers un alchimiste italien qui se fait fort de lui trouver la pierre philosophale, seul moyen connu de transformer le plomb en or… Mais l’alchimiste lui demanda quelques sacrifices humains de jeunes enfants pour enfin retrouver la fortune. Arrêté sur ordre de l’évêque de Nantes, il fut finalement pendu et brûlé en 1440.
Les infanticides de Gilles de Rais auraient fait entre 180 et 200 victimes. Barbe-Bleue, le personnage de Perrault, s’en prenait plutôt à ses épouses, ce qui fait plus penser à Henri VIII qu’à Gilles de Rais. Qu’importe, depuis l’époque romantique, le château est devenu celui de Barbe-Bleue. Il se visite, mais surtout propose plusieurs spectacles médiévaux en costumes et assure des démonstrations de machines de guerre impressionnantes.
Où dormir ? A une demi-heure de Tiffauges (Vendée), aux Epesses, un hôtel de charme insolite et écologique qui propose des chambres à partir de 70 €.
Visiter : Sitesculturels.vendee.fr/Chateau-de-Tiffauges
Chasser les esprits des Templiers à Montfort-sur-Argens
Le château de Templiers à Montfort-sur-Argens (Var). La croix de l’Ordre des Hospitaliers, au dessus de la porte d’entrée, a remplacé celle de l’Ordre du Temple. / SOMBRESANGLIER / CC BY-SA 3.0
Après le trésor des cathares, celui des Templiers… Le château de Montfort-sur-Argens est situé en pleine Provence verte, à une dizaine de kilomètres au nord de Brignoles, dans le Var.
Les légendes qui entourent les lieux ne manquent pas : le site renfermerait ainsi un trésor caché et, les Allemands auraient mené, pendant la seconde guerre mondiale, des investigations, sans succès. Une autre dit que les oiseaux qui pénètrent dans le château perdent leur sens de l’orientation et que les avions auraient pour instruction de ne pas survoler les lieux… Mieux, dans son livre L’Ordre vert, écrit en 1969, l’écrivain de science-fiction Jimmy Guieu raconte qu’il se dégage de la crypte sinistre du village des vibrations et des bourdonnements provenant d’un caisson de métal aux propriétés de lévitation.
On raconte aussi que, chaque 15 août à minuit, les Templiers reviennent prendre possession des murs. Et que chaque fois qu’un habitant d’Argens est sur le point de mourir, il entend des bruits étranges venant de la commanderie, des bruits… d’esprits. Si le château, aujourd’hui privé, ne se visite pas, le centre de ce petit village médiéval et la région alentour valent vraiment une visite.
Où dormir ? Le Domaine des Bruguières, situé à Entrecasteaux (Var), à un quart d’heure en voiture de Montfort, propose des lodges entre vignes et oliviers centenaires à partir de 70 € la nuit.