TV – « Noma au Japon : réinventer le meilleur restaurant du monde »
TV – « Noma au Japon : réinventer le meilleur restaurant du monde »
Par Renaud Machart
A voir aussi ce soir. Un documentaire a suivi l’ouverture de la délocalisation éphémère du restaurant danois de René Redzepi (sur Canal+ Décalé à 21 heures).
NOMA AU JAPON Bande Annonce (Le MEILLEUR RESTAURANT du Monde - Documentaire 2017)
Durée : 02:14
Le Noma, à Copenhague, est l’une des tables les plus réputées du monde. Son chef, René Redzepi, 40 ans, Danois d’origine albanophone de Macédoine, s’y est illustré par une cuisine qui porte à son comble le raffinement du processus culinaire en alliant la rareté – et parfois l’excentricité – des produits et une haute technicité.
L’addition est salée, mais cela ne décourage pas les clients. Alors qu’il délocalisait pour la première fois son établissement au Japon, début 2015, 58 000 personnes étaient inscrites sur liste d’attente. Pendant le mois et demi de résidence du Noma dans un grand hôtel de Tokyo, seules 3 000 personnes ont pu être servies.
Cette délocalisation a été filmée par le réalisateur néerlandais Maurice Dekkers. Son documentaire, sorti au cinéma en avril 2017, est diffusé sur Canal+ Décalé. Le film suit, pas à pas, la préparation hautement minutieuse de la nouvelle carte, gérée d’abord par les sous-chefs, partis en avance sur place, puis par Redzepi lui-même, quinze jours avant l’ouverture de ce restaurant éphémère.
Pesant et sérieux
Autant le dire d’emblée : ce que montre le documentaire semble terriblement pesant et sérieux, comme s’il s’agissait d’un conclave international de sages. Le tout souligné par une musique de fond angoissante. Et l’on s’agace de ce qui paraît vite comme une folle prétention. D’ailleurs, ainsi que le dit malencontreusement un membre de cette brigade de beaux hipsters (les filles y sont rares), tatoués et sportifs : « Une personne normale ne comprend pas ce que nous faisons. » Il veut sûrement dire : « Nous devons avoir l’air de fous » ; mais on comprend : « Circulez, ceci n’est pas pour vous. »
Redzepi n’arrange pas les choses en prononçant des maximes qui tombent parfois à plat pour qui n’est pas dans la révélation du génie et gourou danois : « En cuisinant on ne fait pas que cuisiner, on cherche à comprendre ce que l’on fait et pourquoi on le fait. » Et Dieu dans tout ça ?
Heureusement, le chef fait parfois montre d’un sens de l’humour qui tempère ce redoutable esprit de sérieux. Alors qu’un commis lui présente un champignon gluant qu’il vient de cueillir en forêt, Redzepi lui lance : « Tu viens d’éternuer dessus ? »
Le chef danois René Redzepi dans le feu de l’action. | URBAN DISTRIBUTION
La caméra, comme dans tous les documentaires filmant un grand cuisinier parti à la conquête d’une terre étrangère, suit la brigade à la recherche des produits locaux : en forêt, où l’on goûte, suce et mâchonne à peu près tout, aux marchés de poissons et de légumes. On s’amusera de voir la tête du maraîcher à qui l’on réclame des fraises blanches avant maturité quand on lui assure que, cuisinées, elles sont délicieuses…
Tout est d’une complexité délirante qui, évidemment, respecte le produit et cherche la simplicité. On croira sur parole Redzepi quand il s’extasie sur le glaçage d’un canard à base d’une réduction d’eau, de pain de seigle et de champignons.
Mais on se serait passé de la séquence où une tortue a la tête tranchée vive pour confectionner une soupe. Ladite soupe n’étant pas du goût du maître, la recette est abandonnée et la tortue jetée à la poubelle. Sacré plusieurs fois « Meilleur restaurant du monde », le Noma n’a toujours pas décroché sa troisième étoile Michelin.
Noma au Japon : réinventer le meilleur restaurant du monde, de Maurice Dekkers (P.-B., 2017, 78 min).