On a testé… un projecteur 4K à prix mesuré pour cinéphiles
On a testé… un projecteur 4K à prix mesuré pour cinéphiles
Par Nicolas Six
Facturé 1 300 euros, le Viewsonic PX727, le moins cher de tous, produit-il vraiment les images nettes, profondes et naturelles qui rendraient vraiment justice à la 4K ?
Cela fait maintenant six ans que les publicitaires nous vendent la résolution 4K UHD comme un saut qualitatif vers plus de finesse et de naturel. Mais les vidéos 4K ont beau être objectivement truffées de pixels – quatre fois plus que les vidéos classiques – la différence n’est perceptible que sur des téléviseurs énormes aux tarifs effrayants… ou sur d’immenses écrans de projection. Les vidéoprojecteurs 4K les moins chers coûtaient encore 5 000 euros en 2015, mais récemment, dix modèles sont passés sous la barre des 2 000 euros. Une aubaine pour les cinéphiles.
Nous avons choisi de tester le nouveau Viewsonic PX727-4k parce qu’à 1 300 euros, il s’agit du moins cher de tous.
Un réalisme troublant
Le vidéoprojecteur ViewSonic à côté du projecteur Full HD de comparaison, le Benq W1210st. / Nicolas Six/LE MONDE
Lorsqu’on est habitué aux images des vidéoprojecteurs, le Viewsonic frappe d’emblée par sa finesse. Les décors soignés du film Blade Runner 2049 sont restitués avec une précision étonnante. Branché à côté d’un projecteur Full HD de bonne qualité, les images du Viewsonic sont frappantes de profondeur. Les deux vidéoprojecteurs sont pourtant branchés sur le même lecteur.
Dans ce détail d’une scène de « Blade Runner 2049 », l’image full HD paraît plate tandis que l’image en 4K donne une belle sensation de relief. / Nicolas Six / Sony Pictures
Les images du Viewsonic paraissent plus naturelles. L’avalanche de pixels donne vie aux habits, les textiles et les cuirs deviennent palpables. Les visages paraissent plus marqués, la texture de la peau est reproduite de façon impitoyable, soulignant la moindre petite cerne, la moindre ridule autour des yeux. La finesse des images est telle que parfois, au détour d’une image, l’envers du décor apparaît crûment. Un panneau en bois peint cherchant à passer pour du métal fait illusion en Full HD, pas toujours en 4K.
Sur ce tout petit détail de l’image, les rides et les veines dans le blanc de l’œil sont bien plus définis en 4K. / Nicolas Six / Sony Pictures
Les matières sont-elles plus palpables qu’au cinéma ? Difficile de le vérifier, mais seuls 10 % des cinémas français sont dotés d’un projecteur 4K. Les autres se contentent d’un simple projecteur 2K dont la résolution avoisine celle des modèles grand public Full HD.
C’est avec brio que le vidéoprojecteur 4K de Viewsonic passe notre test visuel. Mais pour en tirer le meilleur, les cinéphiles devront être déterminés et persévérants.
Les vidéos 4K digne de ce nom sont rares
Nos tests ont été menés avec les meilleures images 4K possibles, celles d’un lecteur Blu-ray de nouvelle génération estampillé « 4K UHD », une platine disque de bonne qualité fabriquée par Panasonic et vendue 400 euros. Les platines Blu-ray 4K UHD premier prix démarrent à 180 euros. Le ticket d’entrée de projection 4K monte donc à 1 500 euros, câble HDMI 2.0 compris.
Les matières sont bien plus palpables en 4K. / Nicolas Six / Sony Pictures
Encore faut-il dénicher quelques Blu-ray 4K UHD d’excellente qualité. Avouons-le, les films qui rendent justice à la 4K sont suffisamment rares pour refroidir l’enthousiasme des cinéphiles. Certains n’ont tout simplement pas vocation à être réalistes et naturels : leur réalisateur s’est bien gardé de soigner leur netteté. D’autres souffrent de leur budget trop modeste qui nuit à la qualité des images. Beaucoup sont tout simplement décevants : même tournés en 4K, ils sont ensuite convertis en résolution inférieure pour être embellis, et le cas échéant, enrichis d’effets spéciaux. Une fois reconvertis en 4K, leur finesse a beaucoup souffert.
Dénicher les meilleurs films 4K UHD est un véritable travail d’enquêteur qui impose la visite de sites spécialisés comme hdnumerique.com ou ultrahd.highdefdigest.com. Il existe heureusement quelques titres hautement recommandables comme Blade Runner 2049 ou The Revenant. Mais dans les prochaines années, les sorties de titres 4K recommandables devraient se banaliser.
On trouve également des films et séries 4K sur divers services de VOD : Orange, Apple, Google, Netflix notamment, à condition de disposer d’un lecteur 4K compatible, ce qui est rare. Notre lecteur Blu-ray Panasonic UB700 étant certifié Netflix, nous avons pu vérifier la qualité des images 4K du service de VOD américain. Elles sont clairement plus nettes.
Cils et sourcils sont beaucoup plus définis en 4K qu’en Full HD. / Nicolas Six / Netflix
Leur qualité n’équivaut cependant pas celle d’un Blu-ray 4K UHD. Pour passer à travers les tuyaux d’Internet, ces vidéos sont rapetissées, et cela nuit à leur qualité.
Vraie ou fausse 4K ?
Le projecteur PX727 mérite-t-il l’étiquette 4K ? Celui-ci triche notoirement pour fabriquer ses images en 4K. Comme tous les projecteurs à moins de 4 000 euros, il emploie une mystérieuse technique de « wobulation » pour inventer des pixels qui n’existent pas.
Dans ses entrailles se cache en effet une puce de projection « DLP » ressemblant énormément à un banal modèle Full HD. Cette puce n’est équipée que de deux millions de miroirs, dont le rôle est de masquer la lumière, ou de la réfléchir, en changeant de position plusieurs dizaines de fois par seconde.
Les micro-miroirs du PX727 ont cependant une faculté étonnante. Lorsqu’ils laissent passer la lumière, ils sont capables de modifier leur orientation très légèrement, et à très haute vitesse, pour afficher sur l’écran quatre images distinctes, très légèrement décalées d’une fraction de millimètre. C’est là le secret de la mystérieuse « wobulation ». Grâce à ce tour de passe-passe, ces projecteurs sont capables d’afficher 8 millions de pixels, exactement comme un modèle doté d’une vraie puce 4K. Le compte y est, mais la séparation entre ces pixels n’est pas parfaitement claire. Les projecteurs dotés de huit millions de micro-miroirs font mieux mais coûtent quatre fois plus cher.
Quelle taille d’image viser ?
A partir de quelle largeur la 4K révèle-t-elle son plein potentiel ? Tout dépend de la distance à laquelle on s’assoit. Installé à trois mètres de l’écran, l’image doit mesurer deux mètres de large au minimum pour que la 4K fasse une vraie différence. C’est justement la taille d’image qu’on obtient lorsqu’on place le projecteur au plafond, juste au-dessus du canapé placé à cette distance.
L’installation est beaucoup plus compliquée lorsqu’on souhaite projeter une image de trois mètres de large. Il faut placer le projecteur deux mètres derrière le canapé. Quand le canapé est collé au mur, ça n’est pas possible, et c’est particulièrement dommage, car c’est cette largeur d’image qui révèle le plein potentiel de la 4K.
Plusieurs projecteurs 4K à moins de 2 000 euros offrent une image un peu plus large que le Viewsonic. Mais aucun ne produit une image de trois mètres de large quand on le place à trois mètres du mur. Il faudra attendre l’émergence de projecteurs 4K courte distance, ou « short throw », pour diffuser des images immenses dans les pièces où le canapé est collé au mur. A noter, le calculateur sophistiqué du site Projectorcentral permet de prévoir le positionnement du projecteur sans se tromper, pour des centaines de références de projecteurs.
En conclusion
Avec sa remarquable qualité d’image et son tarif mesuré, ce projecteur Viewsonic fera date dans l’histoire du cinéma à domicile. Son image relègue aux oubliettes celles des projecteurs Full HD, floues, plates, empêchant de rentrer complètement dans le film. Avec un projecteur 4K, on a enfin l’impression d’ouvrir une immense fenêtre sur une autre réalité, au beau milieu du salon.
Un vidéoprojecteur est hélas beaucoup moins pratique qu’une TV. La première installation est complexe : il faut fixer l’appareil au plafond en l’alignant parfaitement face au mur. A chaque lancement de film, il faut plonger la pièce dans le noir complet. La 4K ajoute une nouvelle contrariété : il faut dénicher les films et séries pas si courants qui font honneur à ses huit millions de pixels. Pour un cinéphile exigeant, ces contraintes s’effacent devant la récompense d’une image totalement immersive.
C’est plutôt pour vous si…
- Vous rêvez de plonger au cœur des films
- Vous avez de bons yeux ou de bonnes lunettes
- Vous avez deux mètres de dégagement derrière votre canapé
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
- Vous fuyez les grosses productions aux images léchées
- Le tournevis vous fait des cales aux mains et vos volets sont cassés
- Vous ne voulez pas vous endetter pour un vidéoprojecteur