« BambinO », œuvre pour bébés du Scottish Opera. / JAMES GLOSSOP

Séances de brainstorming, recherches techniques, répétitions générales… Le Scottish Opera a travaillé par étapes pour créer BambinO, un opéra pour bébés, qui arrive à Paris. En apparence, la forme est celle, classique, d’un petit opéra. Deux actes, un entracte, une histoire portée par une partition… Sauf que les spectateurs de BambinO possèdent une singularité : ils ont entre 6 et 18 mois. Cette production pour bébés débarque à Paris, programmée par le Théâtre du Châtelet et accueillie au Centquatre.

En 2009, l’institution écossaise avait déjà mis en scène BabyO, un spectacle d’initiation musicale. Cette fois, le projet est plus ambitieux. Jane Davidson, chargée de l’éducation artistique au Scottish Opera, lance, début 2016, l’idée d’une véritable pièce pour les tout-petits. « La commande était claire : une partition opératique, avec un cadre narratif qui puisse être compréhensible par les bébés, raconte le compositeur Lliam Paterson, 26 ans, espoir de l’opéra britannique. Avec le metteur en scène, Phelim McDermott, nous avons commencé par un brainstorming pour établir l’histoire. » Centrée sur l’oiseau Uccellina (Charlotte Hoather), elle déroule, en onomatopées et quelques mots d’italien, une intrigue simple : la naissance de son enfant Pulcino (Timothy Connor), l’exploration de la terre, l’envol du petit qui doit finalement quitter le nid pour le ciel…

« C’est un spectacle qui permet d’initier à l’opéra des très jeunes et qui prouve que la musique est universelle, par-delà les langues et les âges. » Ruth Mackenzie, directrice du Théâtre du Châtelet

« Avant de m’atteler à la composition, j’ai lu beaucoup d’ouvrages scientifiques sur le développement auditif. J’ai décidé de privilégier des sons évolutifs qui varient de l’aigu au grave, de mettre en valeur les voyelles… Des éléments plus faciles à mémoriser et à reproduire pour les bébés. » Pour nourrir sa créativité, il se tourne vers Verdi ou Puccini. Une fois la musique établie, un séminaire d’une semaine se tient à Glasgow, en décembre 2016, permettant de tester l’opéra sur dix petits cobayes volontaires. « Nous avons observé leurs réactions et demandé un retour à leurs parents, explique Lliam Paterson. Pour moi qui ne suis pas père, c’était instructif et ça m’a confirmé que nous étions sur la bonne voie. » Au fil des quelques ajustements, la mise en scène se rode. Il est décidé d’installer les spectateurs en culottes courtes à même le plateau – leurs accompagnants étant assis tout autour, en léger retrait – et de les laisser libres de chanter, parler, se déplacer, toucher les interprètes ou les accessoires.

Après la première, donnée au Manchester International Festival en juillet 2017, les critiques anglais applaudissent. Ruth Mackenzie, qui dirige le Théâtre du Châtelet, découvre la performance de trente-cinq minutes à Wigan. « Tout était limpide, pour les bébés comme pour les adultes, se souvient-elle. C’est un spectacle qui permet véritablement d’initier à l’opéra des très jeunes et qui prouve que la musique est universelle, par-delà les langues et les âges. » Sur son invitation, voilà la joyeuse troupe à Paris. Une façon éclatante de rafraîchir le public, alors que l’âge moyen du spectateur d’opéra en France affiche 51,5 ans (Les Forces musicales et Traces TPI, 2017). Même tous réunis, les trente jeunes chanceux qui pourront assister à chaque représentation n’atteignent pas un tel âge.

« BambinO », au Centquatre, 5, rue Curial, Paris 19e. Du 13 au 20 avril (complet). www.104.fr