Grèce : Tsipras annonce une hausse du salaire minimum et une baisse des impôts
Grèce : Tsipras annonce une hausse du salaire minimum et une baisse des impôts
Par Marina Rafenberg (Athènes, correspondance)
Le premier ministre grec a présenté son programme post-plan d’aide, samedi. A près d’un an des élections législatives, il a peu de temps pour convaincre les électeurs.
Le premier ministre grec Alexis Tsipras a promis samedi de baisser les impôts et d’augmenter le salaire minimum. / COSTAS BALTAS / REUTERS
Dans un discours fleuve de plus d’une heure, le premier ministre grec Alexis Tsipras a présenté samedi 8 septembre à la Foire Internationale de Thessalonique, événement économique le plus important de l’année dans le pays, son programme post-plan d’aide qui ressemblait fort à un lancement de campagne pour les élections de l’automne 2019.
« Après huit ans de crise, c’est la première fois que s’ouvre la Foire Internationale de Thessalonique sans l’ombre des mémorandums. Aujourd’hui, trois ans après ce difficile accord signé à l’été 2015, la Grèce est un pays différent et peut regarder vers l’avenir avec sûreté », a scandé le premier ministre face au secrétaire au commerce américain, Wilbur Ross, invité d’honneur, et à une foule de chefs d’entreprises, de diplomates, de journalistes.
Il y a quatre ans, Alexis Tsipras – encore candidat de la gauche radicale – assurait sur cette même tribune qu’il « déchirerait les mémorandums de l’austérité », qu’il s’opposerait aux créanciers du pays pour imposer un plan de croissance audacieux. La réalité a été bien différente avec un référendum où le vote des citoyens grecs n’a pas été respecté, l’application d’un contrôle des capitaux, et finalement la signature d’un nouvel accord avec les créanciers. Samedi soir, le premier ministre était de roc et n’a exprimé aucun regret : « Il y a trois ans nous avons signé un accord dur mais nous avons pris la bonne décision. »
Un programme ambitieux pour les électeurs déçus
Mais à quelques mois des élections européennes en mai et législatives à l’automne, Alexis Tsipras ne s’est pas seulement félicité de l’amélioration économique dans son pays, il a proposé des mesures concrètes pour consolider la croissance (prévision de 2,5 % de croissance en 2018). Tout en promettant « de respecter les engagements pris avec les créanciers », le premier ministre a annoncé l’augmentation du salaire minimum au cours de l’année 2019. Durant les trois plans successifs d’aide européens, le salaire minimum était tombé à 586 euros net contre environ 760 en 2009.
Il a également promis le retour des conventions collectives abolies depuis 2012. Lundi, la ministre du travail, Efi Achtsioglou, a rétabli avec les partenaires sociaux les conventions collectives de quatre secteurs, celui de la banque, de la marine marchande, des entreprises touristiques et agences de tourisme qui vont permettre d’augmenter le salaire minimum dans ces branches de 586 euros net à 800 euros.
A partir de 2019, le premier ministre s’engage à diminuer l’impôt foncier, devenu le cauchemar de nombreux Grecs ces dernières années, à baisser les cotisations sociales pour les travailleurs indépendants et les agriculteurs mais aussi les impôts sur les entreprises, à embaucher 3 000 auxiliaires de vie pour aider les personnes âgées et 4 500 personnes qualifiées dans l’éducation, et à soutenir la recherche avec un fonds de 410 millions d’euros. Un programme ambitieux financé grâce à une marge de manœuvre budgétaire d’environ 3,5 milliards d’euros et destiné à séduire les électeurs déçus de son parti, Syriza.
La reconstruction d’un Etat social
Surtout, le premier ministre a évoqué le sujet tabou d’une nouvelle diminution des retraites en 2019. Le gouvernement s’y était engagé auprès de ses partenaires européens. « L’objectif d’un surplus primaire de 3,5 % du PIB réclamé par les créanciers jusqu’en 2022 peut être atteint sans des baisses supplémentaires dans les retraites. C’est une mesure anti-croissance et nous allons en rediscuter avec la Commission européenne », a déclaré d’un ton assuré Alexis Tsipras. Les représentants des créanciers – qui se rendront en Grèce quatre fois par an pour surveiller les comptes publics – sont d’ailleurs de retour le 10 septembre et le sujet pourrait être débattu.
Pour Theano Fotiou, ministre adjointe chargée de la solidarité sociale, « sans un Etat social, qui protège les citoyens, il n’y a pas de croissance juste. Nous avons reçu en 2015 un Etat en faillite, nous avons dû en peu de temps le reconstruire. Notre défi maintenant est de continuer sur ce chemin à protéger le plus grand nombre de nos concitoyens frappés par la crise ». Le budget de son ministère est passé entre 2015 et 2018 de 789 millions d’euros à 2 milliards d’euros.
« En renforçant nos politiques sociales, nous pensons que la pauvreté d’ici 2022 va passer en dessous du seuil de celui d’avant crise en 2008. La pauvreté infantile est passée de 26,6 % en 2015 à 24,5 % en 2016 et nous voulons la faire passer à 20 % en 2022, estime la ministre prête à mener la bataille pour les prochaines élections. Nous avons un an devant nous et chaque jour nous allons montrer par des actions concrètes à nos concitoyens que nous reconstruisons pas à pas cet Etat social mis à mal par l’austérité, et que nous allons surmonter cette crise. »