L’équipe de France doit affronter l’Afrique du Sud, le 10 novembre, en match préparatoire au Tournoi de six nations. Elle rencontrera ensuite l’Argentine, le 17 novembre, puis les Fidji, le 24 novembre. / BENOIT TESSIER / REUTERS

Dans les brasseries, on appelle cette période happy hour, une heure heureuse, synonyme de verres pour pas cher. C’est un peu ce à quoi en est réduite la Fédération française de rugby (FFR). Du lundi 5 au jeudi 8 novembre, entre 12 heures et 14 heures, elle brade une partie des billets pour le test-match de samedi 10 novembre entre la France et l’Afrique du Sud, au Stade de France, à Saint-Denis : moitié prix pour ceux de troisième catégorie, qui passeront de 50 à 25 euros.

La ristourne, sous son apparence festive, trahit un phénomène moins riant : la désaffection d’une partie du public pour les matchs du XV de France, et les difficultés de la Fédé à appâter le chaland. Même pour l’affiche contre les « Boks » sud-africains, pourtant la plus relevée de cette tournée d’automne, préparatoire au Tournoi de six nations, qui verra ensuite les Bleus affronter l’Argentine au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq (Nord), le 17 novembre, puis les Fidji, de nouveau au Stade de France, le 24 novembre.

A l’exception des matchs contre les célèbres All Blacks de Nouvelle-Zélande, cette difficulté à attirer le public préoccupe. Surtout à cinq ans de la Coupe du monde en France et à un an de celle au Japon.

Contre-performances

Déjà en 2017, à la même période de l’année et dans le même lieu, les statistiques officielles faisaient état de seulement 55 000 spectateurs pour la précédente rencontre contre l’Afrique du Sud. C’est peu, pour une enceinte dyonisienne qui peut en contenir près de 80 000. Et très peu, si l’on tient compte des places distribuées gratuitement : au moins « 12 000 invitations » avaient été transmises, selon le trésorier de la FFR, Alexandre Martinez, qui confiait sa « peine » d’avoir à combler autant de places. Le genre d’astuce bien pratique, comme celle de peupler un rang sur deux en tribunes, pour créer l’illusion du remplissage devant les caméras de télévision.

Sans doute le dirigeant fédéral est-il aujourd’hui trop chagriné pour répondre à nouveau aux sollicitations du Monde. Les joueurs, eux, veulent bien parler du problème : « Sur le terrain, vous êtes vraiment dans votre bulle et vous ne pensez qu’à une chose : être bon. Et pas au fait de savoir s’il y a 50 000 ou bien 75 000 spectateurs en tribunes », assure le talonneur et capitaine, Guilhem Guirado.

Mathieu Babillot attribue cette désaffection aux contre-performances du XV de France : sur les dix derniers matchs, sept défaites, deux victoires et un match nul. « On a envie d’avoir de bons résultats pour que les gens nous suivent et reviennent au stade, on a envie de créer une émulation autour du rugby », précise le troisième-ligne de Castres, qui cite en exemple ses compatriotes footballeurs, champions du monde 2018.

La baisse de popularité du XV de France s’inscrit aussi dans un contexte d’affaires extrasportives. En février, 40 % des sondés avançaient cette raison, selon une étude de l’institut de sondage Odoxa pour RTL. Bernard Laporte, le président de la FFR, soupçonné de conflit d’intérêts envers le président du club de Montpellier, Mohed Altrad, fait l’objet d’une enquête du parquet national financier.

Depuis l’élection de Bernard Laporte, en décembre 2016, un poste de responsable optimisation billetterie a été créé. Près de deux ans plus tard, cela ne semble pas suffisant. En octobre, dans un courrier interne, les salariés de la FFR ont appris la création d’une autre fonction à rallonge : celle de directeur délégué aux affaires commerciales et sociales. Un rôle attribué à Julien Collette, ancien directeur général du palais omnisports de Bercy, jusque-là surtout habitué aux revers des tennismen qui y jouaient.