« Le Monde des lecteurs » : « L’allocation adulte handicapé et le revenu de solidarité active ne sont pas cumulables »
« Le Monde des lecteurs » : « L’allocation adulte handicapé et le revenu de solidarité active ne sont pas cumulables »
LE MONDE ECONOMIE
Aurore Simonetta espère une modification du dispositif qui exclut l’allocation adulte handicapé du revenu de solidarité active. Elle espère qu’Emmanuel Macron qui avait déclaré que le handicap serait une priorité de son quinquennat rectifie ce dispositif.
« Pour que l’AAH et le RSA soient cumulables en couple, que la personne handicapée ne soit obligée de couper en deux ces 820 euros qui normalement sont conçus dans le cadre du handicap d’une personne, ou de vivre seule, il faut que la loi change. » / Heinz Linke/Westend61 / Photononstop
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J’ai appris que le 3 décembre était la journée internationale des personnes handicapées. Je l’ignorais, et pourtant, je suis concernée, car étant moi-même handicapée, atteinte d’une sclérose en plaques, de quatre hernies aux cervicales, deux hernies aux lombaires, ainsi que du syndrome d’asperger [forme d’autisme sans déficience intellectuelle ni retard de langage N.D.L.R].
L’Allocation adulte handicapé (AAH) et le revenu de solidarité active (RSA) ne sont pas cumulables, même dans le cadre d’une vie de couple. C’est inscrit dans le code de la Sécurité sociale. Lorsque l’une des personnes du couple est handicapée et perçoit l’AAH soit 820 euros en octobre 2018, 860 euros à partir de novembre 2018, et 900 euros dès novembre 2019), si l’autre personne passe au RSA, son RSA est alors supprimé (avec des enfants également…). Le couple doit alors vivre à deux sur l’allocation de la personne handicapée. Il arrive que le couple n’ait pas le droit à la Couverture universelle médicale (CMU), et doive en plus payer une mutuelle !
Cela n’est pas pour cette raison que les services sociaux les aideront plus, le chômeur sans chômage devenant un bouc émissaire, le pauvre victime du système, un assisté. La santé de l’individu handicapé est fortement touchée, et aggravée au vu du peu de moyens que cette personne a pour vivre dignement. Alimentation médiocre, difficultés de logement, difficultés à l’achat de matériel [réellement] adapté à sa problématique de santé (literie, fauteuils/canapés d’un prix exorbitant…
Coupes budgétaires
Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et Les Maisons départementales des personnes en situation de handicap (MDPSH) n’accordent pas facilement des aides techniques et humaines. Selon les régions, ces aides sont acceptées, mais de plus en plus rarement, le pourcentage du handicap diminuant étrangement sur le papier. Dans les régions à l’économie rétrécie, depuis la loi obligeant les départements à être autonomes financièrement, les coupes budgétaires en sont ressenties drastiquement dans l’univers du handicap.
Selon les régions, l’individu est considéré ayant un besoin légitime de recevoir une aide technique, humaine, aux transports… ou non. Partager à deux une AAH, c’est forcément mettre la santé de la personne handicapée en danger et avoir là les conditions pour que son handicap augmente. Alors, il nécessite plus de frais médicaux, et possiblement un jour des frais relatifs à la perte d’autonomie. Imaginez le coût exorbitant d’une aide aux transports en Véhicule sanitaire léger (VSL), des Imageries par résonance magnétique (IRM) en plus, des séances de kiné quotidiennes, des séjours en instituts spécialisés, des hospitalisations supplémentaires, des traitements lourds ajoutés, () pouvant se rajouter suite à cette carence financière pour une personne handicapée.
Coûts revenant à la charge de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), cette dernière pourtant essayant à tout prix de faire des économies… Cette loi, ce vide juridique est de plus symbolique d’un refus du handicap, un mépris de cette minorité. Handicapé, cet humain là doit prendre financièrement en charge un individu alors que c’est la société à laquelle devrait incomber cette tâche ! Alors, la seule solution tant que celui en bonne santé n’a pas un travail stable, durable, est de se séparer. Les contrats étant de plus en plus précaires et en CDD, la vie chère, la séparation devient indispensable pour raisons économiques, afin que l’individu handicapé puisse bénéficier seul de l’AAH et vivre avec ces 820 euros, sans aggraver en plus sa santé.
Injustice
Chacun doit avoir un logement différent : la séparation devient indispensable, même si l’amour reste et que le couple a encore une relation amoureuse, tout en vivant chacun chez soit. Vivre seul pour une personne handicapée, c’est devoir assumer l’injustice et le poids moral du handicap. Le handicap vécu seul, sans pouvoir vivre avec l’être aimé, ajoute à l’injustice. Des gestes quotidiens difficiles et/ou impossibles, sont d’autant une problématique lorsque l’on n’est qu’un, sans le compagnon aidant et aimant.
Pourtant, le/la compagne devrait être remercié(e) et rémunéré(e) pour l’aide qu’elle amène à l’être aimé peu autonome, handicapé.
Elle devrait être considérée comme un être utile qu’elle est à l’autre, donc à la société, recevoir quelque chose systématiquement, ne serait-ce qu’un RSA, le strict minimum au moins. Ne souhaitons pas que la personne handicapée devienne apte à percevoir l’aide humaine trop tôt, celle-ci étant accordée lorsque la pathologie de l’individu diminue drastiquement l’autonomie de cet être différent.
Si l’impossibilité d’accéder à la propriété, celui qui devra louer, déménager, bénéficiera d’une
allocation logement, 250 euros, un peu plus d’argent sorti des caisses de la Sécurité sociale.
Car alors, si absence d’emploi durable (au moins CDI), obligation de séparation, chacun devant vivre séparément du moins, et alors et seulement là, la personne handicapée pourra bénéficier seule de l’AAH.
Changer la loi
Pour que l’AAH et le RSA soient cumulables en couple, que la personne handicapée ne soit obligée de couper en deux ces 820 euros qui normalement sont conçus dans le cadre du handicap d’une personne, ou de vivre seule, il faut que la loi change. Je constate que les politiques entendent rarement la minorité, et que lors d’interventions de grosses associations, et mieux encore, de journalistes, ils deviennent obligés d’agir et de modifier les lois. L’Etat fait la sourde oreille lorsqu’il reçoit la demande de changer les choses en notre faveur… En tous les cas sous le gouvernement Hollande, oui. Sous celui d’Emmanuel Macron, je l’ignore pour l’instant.
Emmanuel Macron promettait de faire du handicap une priorité de son quinquennat. Bien possible que lui ou la secrétaire au handicap ignorent cette loi, ce vide juridique. Si vous en avez le temps et le pouvez, la communauté du handicap vous sera extrêmement reconnaissante d’écrire un article révélant cette injustice. J’adorerais que cela fasse effet boule de neige et que d’autres médias, en plus de vous, s’emparent du sujet et dévoilent ce vide juridique cynique. Pourrez-vous profiter de cette journée du 3 décembre, journée du handicap, afin de dénoncer cet oubli curieusement refusé d’être étudié par nos politiques ?