« Fortnite », « PUBG », « League of Legends »… La DGSE s’intéresse aux jeux vidéo multijoueur
« Fortnite », « PUBG », « League of Legends »… La DGSE s’intéresse aux jeux vidéo multijoueur
Par Martin Untersinger
Le service de renseignement français veut pouvoir écouter les échanges entre joueurs dans les espaces de discussion internes à ces jeux.
Dans la série norvégienne « Occupied », le premier ministre en exil et ses sympathisants communiquent grâce au jeu « DayZ », au nez et à la barbe du pouvoir. / Capture d'écran
L’immense popularité de Fortnite, le jeu vidéo aux 200 millions de joueurs revendiqués, n’a échappé à personne. Surtout pas à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Le service de renseignement français s’intéresse à ce jeu de tir, et plus largement aux jeux vidéo multijoueur et à succès comme PUBG, World of Warcraft, League of Legends ou Counter Strike.
L’idée n’est pas de pimenter les pauses déjeuner des espions français. Elle est beaucoup plus sérieuse : la DGSE entend pouvoir écouter les échanges entre joueurs dans les espaces de discussion internes à ce type de jeux vidéo.
C’est ce qui ressort d’une offre de stage, transmise parmi des dizaines d’autres à des écoles spécialisées par le ministère des armées, comme c’est la tradition depuis quelques années. La DGSE veut recruter, pour six mois, un stagiaire pour dénicher d’éventuelles failles informatiques contenues dans ces jeux. L’existence de cette offre avait été évoquée par la lettre spécialisée Intelligence Online.
Ces jeux vidéo multijoueur, écrit le ministère des armées dans l’offre de stage, sont « détournés de leur utilisation première » : « les moyens de communication mis à disposition dans ces jeux sont utilisés de manière furtive afin d’échanger de l’information spécifique. »
Votre mission (si vous l’acceptez, pressez croix)
Trois missions incomberont au stagiaire : d’abord, « effectuer une cartographie » des principaux jeux multijoueur, et notamment identifier des failles informatiques déjà découvertes. Ensuite, de sélectionner un ou deux jeux particulièrement intéressants pour le service et de l’étudier, afin « d’extraire des signatures réseau », c’est-à-dire des éléments techniques permettant à la DGSE de reconnaître, dans la masse de données dont elle dispose et qu’elle collecte sur Internet, les échanges effectués dans l’espace de discussion du ou des jeux en question. Enfin, le stagiaire devra tenter de découvrir des failles informatiques, censées permettre à la DGSE d’accéder au contenu des discussions.
Il est possible que la DGSE soit déjà capable de pénétrer dans les canaux de discussion de certains jeux vidéo. Cette offre de stage pourrait être seulement destinée à attirer de jeunes candidats à fort potentiel technique. Le service de renseignement entend recruter 400 profils techniques, notamment dans les technologies numériques, en 2019. La DGSE multiplie les actions pour attirer les profils les plus pointus. Son directeur technique, Patrick Pailloux, était venu l’expliquer devant un parterre de spécialistes de la sécurité informatique réunis pour une conférence, à Rennes, au printemps : « J’ai besoin de vous, on a besoin de bras ! », avait-il lancé.