« Creed II » : le mauvais goût triomphe en match retour
« Creed II » : le mauvais goût triomphe en match retour
Par Thomas Sotinel
L’inventivité apportée par Ryan Coogler à la franchise « Rocky » n’est plus qu’un souvenir dans cette suite qui, sur un scénario de Stallone, aligne les clichés.
La réincarnation de Rocky en Creed constitue l’un des miracles attestés par les théologiens du cinéma. Le film de Ryan Coogler renouait avec la vigueur sans apprêt qui faisait le charme de la première apparition de Rocky Balboa à l’écran, en 1976, tout en y ajoutant une dimension politique. Une franchise dont on croyait la dernière goutte de sève exprimée reprenait vie.
Creed II apporte la preuve que les miracles ne sont pas reproductibles. Ryan Coogler a quitté la WBA pour le Wakanda avec Black Panther et son remplaçant, Steven Caple Jr., se contente, prudemment, de mélanger les ingrédients familiers d’un scénario coécrit par Sylvester Stallone (auteur du script de Rocky, en 1976). Handicap supplémentaire, ce script puise ses sources dans l’un des pires épisodes de la saga de Rocky Balboa, le quatrième. On y voyait Apollo Creed, père de l’actuel héros de la franchise, Adonis Creed (Michael B. Jordan), perdre la vie sur le ring et sous les points d’un tueur aux poings d’acier venu d’URSS, Ivan Drago.
Sorti en 1985, première année du second mandat de Ronald Reagan, pendant les derniers spasmes de la guerre froide, Rocky IV était un mélodrame invraisemblable qui faisait de la défaite de Drago (Dolph Lundgren) aux mains de Rocky, sur un ring moscovite, une célébration chauvine, dont le réalisateur – Sylvester Stallone – avait oublié d’enlever ses gants en passant derrière la caméra.
Invraisemblances pugilistiques
CREED II - Bande Annonce Officielle 2 (VF) - Michael B. Jordan / Sylvester Stallone
Durée : 02:40
Trente-quatre ans plus tard, Adonis Creed, fils d’Apollo, protégé de Rocky Balboa, doit affronter Viktor Drago (Florian Munteanu), fils d’Ivan (qui est également son entraîneur, Dolph Lundgren, qui fut jadis la version scandinave de Schwarzenegger, a plutôt bien vieilli), champion russe qui, pour des raisons mystérieuses, s’entraîne à Kiev. Un premier affrontement, à Las Vegas, tourne au désavantage d’Adonis Creed qui a commis l’erreur de se séparer de Rocky Balboa. Obsédé par l’idée de venger son père, le jeune boxeur afro-américain renoue avec le vieux pugiliste de Philadelphie pour gagner le match revanche, organisé à Moscou.
Il est peut-être injuste de juger le film de Steven Caple Jr. à l’aune de celui de Ryan Coogler. Mais au fil de la projection, les regrets s’accumulent : où est passé l’intérêt manifeste pour la réalité de la boxe, remplacé ici par une accumulation spectaculaire d’invraisemblances pugilistiques ? La relation entre Adonis et sa compagne Bianca (Tessa Thompson) prend cette fois le tour d’un mariage américain des années 1950 qui voit la musicienne sacrifier sa carrière à celle de son seigneur et maître. Finalement, les moments qui restent après la projection de Creed II sont les plus outrés, les plus risibles du film, comme les apparitions de Brigitte Nielsen, star des films d’action des années 1980, qui reprend – sans jamais prononcer un mot – le rôle de la compagne d’Ivan Drago.
Les films « Rocky » ne sont pas des films de boxe
Durée : 09:56
Film américain de Steven Caple Jr. Avec Michael B. Jordan, Sylvester Stallone, Tessa Thompson, Dolph Lundgren (2 h 10). Sur le Web : www.warnerbros.fr/articles/creed-2-confidences-casting, fr-fr.facebook.com/creedmovie et www.creedthemovie.com