Les dates qui ont marqué l’histoire de l’Opéra de Paris
Les dates qui ont marqué l’histoire de l’Opéra de Paris
Par Rosita Boisseau, Pierre Gervasoni
Une petite chronologie de ce lieu né en 1669.
1669 Naissance d’un opéra
Informé par Pierre Perrin, à travers Colbert, que, « depuis plusieurs années, les Italiens ont établi diverses Académies dans lesquelles il se fait des représentations en musique que l’on nomme Opéras », Louis XIV lui accorde le privilège (daté du 28 juin 1669) d’en développer l’équivalent en France, « en vers français », pendant douze ans.
1671 Une première salle rue Mazarine
Poète en grâce auprès de la maison d’Orléans, Pierre Perrin s’associe avec le compositeur Robert Cambert après avoir obtenu le privilège de fonder une Académie royale d’opéra. Leur première collaboration dans ce cadre aboutit à la création de Pomone, premier ouvrage lyrique en français, qui prend place en mars 1671 dans la salle du Jeu de paume de la Bouteille, aménagée en salle de spectacles par l’intendant des bâtiments du duc d’Orléans. Une plaque apposée au 42 de la rue Mazarine (actuellement dans le 6e arrondissement de Paris) rappelle aujourd’hui où se situait la première salle de l’Opéra.
Jean-Baptiste Lully (1632-1687), compositeur français. Gravure, BNF, photo colorisée. / ROGER VIOLLET
1672 Le règne de Lully
Criblé de dettes qui l’ont conduit en prison, Pierre Perrin, dit « l’abbé Perrin », vend son privilège à Jean-Baptiste Lully en 1672, lequel en usera jusqu’à sa mort en 1687. Commence un règne sans partage qui permet au Florentin de créer vingt partitions de son cru, ainsi que deux écoles, une de musique et une de danse.
1776 Médée et Jason, de Noverre
Premier ballet-pantomime présenté à l’Opéra de Paris et grand succès, il a été créé au Hoftheater de Stuttgart, par le chorégraphe et théoricien français Jean-Georges Noverre (1727-1810), auteur en 1760 des Lettres sur la danse et sur les ballets dans lesquelles il revendique la danse comme un art à part entière et pas seulement un intermède décoratif pour opéra. Il entend aussi faire reconnaître le chorégraphe comme un artiste. Il y jette les bases de cette fameuse danse d’action expressive qui utilise le mime pour accentuer les sentiments jusqu’à mettre en jeu tout le visage. Pour la première fois, le danseur Vestris y apparaît sans masque, accessoire de rigueur jusqu’à cette époque.
1780 Le roi reprend la main
Continuellement déficitaire, l’Opéra voit sa gestion reprise par le roi, le 17 mars 1780, après avoir été confiée en 1749 aux prévôts des marchands de la Ville de Paris. Considérant que « Sa Majesté ne saurait approuver qu’une partie de ce produit serve à subvenir aux frais des amusements de la classe la plus aisée », et persuadé « que l’Etat doit trouver dans ses fonds propres de quoi pourvoir à ses dépenses », Louis XVI confie à Papillon de La Ferté la mission d’équilibrer les comptes « sans nuire cependant, par une économie mal entendue, à l’éclat d’un spectacle qui, en contribuant à l’embellissement et aux plaisirs de la Capitale, y attire les étrangers ».
La danseuse Maria Taglioni (1804-1884) dans le ballet « La Sylphide », dans une chorégraphie créée pour elle par son père à l’Opéra de Paris, en 1832. / DE AGOSTINI / LEEMAGE
1832 La Sylphide, de Filippo Taglioni
C’est le chorégraphe Filippo Taglioni qui met en scène le premier ballet entièrement dansé sur pointes par sa fille Marie Taglioni. Créé à l’Opéra de Paris, sur la musique de J. M. Schneitzhoeffer, ce spectacle en deux actes, qui se déroule en Ecosse, raconte l’histoire d’une créature surnaturelle aux ailes de papillon, la Sylphide, dont tombe follement amoureux le jeune James. Pour ce ballet, le costumier Eugène Lami inventa des robes blanches qui allaient devenir les fameux tutus emblématiques du ballet.
La danseuse Maria Taglioni (1804-1884) dans le ballet « La Sylphide », dans une chorégraphie créée pour elle par son père à l’Opéra de Paris, en 1832. / DE AGOSTINI / LEEMAGE
1866 L’ère du directeur-entrepreneur
Par décret du 22 mars 1866, l’Etat rétablit le principe du directeur-entrepreneur. Administrateur depuis 1862 et gestionnaire au bilan positif, Emile Perrin devient aussi un directeur à succès sur le plan artistique. En témoignent, sur une période de huit ans (qui s’achève, en 1870, avec la chute de l’Empire), des créations aussi prestigieuses que celles des opéras L’Africaine (Giacomo Meyerbeer), Don Carlos (Giuseppe Verdi), Hamlet (Ambroise Thomas) et des ballets La Source et Coppelia, de Léo Delibes.
1875 Le Palais Garnier s’illumine
L’inauguration du bâtiment conçu par Charles Garnier a lieu, le 5 janvier, en présence du président de la république, Patrice de Mac-Mahon, et de nombreuses personnalités étrangères (dont le lord-maire de Londres et le roi d’Espagne). Le gala permet à la grande cantatrice Gabrielle Krauss de briller dans des extraits de La Juive, d’Halévy, et à la Fée Electricité d’en faire autant sur le plateau avec des effets « clair de lune ». En dépit de la nécessité d’engager de grands frais pour remplacer les décors et les costumes partis en fumée lors de l’incendie de 1873, Olivier Halanzier fut l’un des rares directeurs-entrepreneurs (1871-1879) à faire fortune.
1932 L’opéra à la maison
Le 19 août 1932 ont lieu les premières retransmissions radiophoniques – depuis l’émetteur de la tour Eiffel –, d’un opéra, Mârouf, savetier du Caire, d’Henri Rabaud. Un demi-siècle auparavant, en 1881, des micros placés dans le trou du souffleur et reliés à des fils électriques avaient déjà permis à quelques privilégiés de suivre à distance (dans le magasin des décors) une représentation des Huguenots de Meyerbeer.
1939 Le Front populaire s’en mêle
Décidé en 1936 par le Front populaire, le regroupement de l’Opéra et de l’Opéra-Comique aboutit à la création d’un établissement public, la Réunion des théâtres lyriques nationaux (RTLN), dont le statut est promulgué le 14 janvier 1939. Jacques Rouché, qui avait obtenu, en 1914, le privilège (assorti d’une subvention) de diriger l’Opéra, en devient l’administrateur général. Révoqué en 1945, il apparaît comme l’homme de la création : 71 ouvrages lyriques et 73 ballets ont vu le jour durant les trois décennies qui ont couvert ses mandats successifs.
1960 Le Lac des cygnes
Ce n’est qu’en 1960 que la version intégrale du Lac des cygnes, sur la musique de Tchaïkovski, dans la chorégraphie du Russe Vladimir Bourmeister, sera présentée à l’Opéra. A l’exception d’extraits, ce monument était resté absent des scènes parisiennes jusqu’alors. Créé en 1895 par le Français Marius Petipa pour la troupe du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg, Le Lac des cygnes est devenu l’emblème de la danse classique. Le prince Siegfried tombe amoureux d’un cygne qui est en réalité une princesse victime d’un sort jeté par le sorcier Rothbart. Depuis 1984, c’est la production de Rudolf Noureev qui a remplacé celle de Bourmeister.
1978 L’arrivée de Rolf Liebermann
A la suite du suicide, en 1977, du président de son conseil d’administration, Jean Salusse, la RTLN est supprimée le 8 février 1978 pour faire place à une nouvelle institution : le Théâtre de l’Opéra de Paris (TNOP). Nommé le 31 décembre 1972, lors d’une réorganisation de la RTLN, le Suisse Rolf Liebermann devient l’administrateur général du TNOP. Compositeur et chef d’orchestre, il redonne de l’éclat à l’Opéra Garnier par une programmation de prestige aux allures de « festival permanent » qui s’étendra jusqu’à la fin de son mandat en 1980.
L’arrivée du président Francois Mitterrand et de son épouse Danielle pour l’inauguration de l’Opéra Bastille, le 13 juillet 1989. / LE SEGRETAIN / SIPA
1989 Inauguration de l’Opéra Bastille
Construit pour répondre à la volonté du président François Mitterrand qui, dès 1982, avait voulu offrir à Paris un opéra « moderne et populaire », l’Opéra Bastille est inauguré le 13 juillet 1989 dans le cadre des commémorations du bicentenaire de la Révolution française.
2016 Iolanta/Casse-Noisette
Dans la mise en scène du russe Dmitri Tcherniakov, la soirée composée de l’opéra Iolanta puis du ballet Casse-Noisette revient sur les traces de leur création historique en 1892. Ils ont été tous les deux composés par Tchaïkovski et créés ensemble au Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg. Pour la partie ballet, Tcherniakov a fait appel à trois chorégraphes : le Portugais Arthur Pita, le Canadien Edouard Lock et le Belge Sidi Larbi Cherkaoui. Avec un casting de 180 chanteurs, danseurs, musiciens, artistes des chœurs et figurants, cet insolent projet a tenu ses promesses de phénomène.
Cet article a été réalisé dans le cadre d’un partenariat avec l’Opéra de Paris.