Jeu vidéo : « Super Mario Maker 2 », le Mario bricolo qui fait retomber en enfance
Jeu vidéo : « Super Mario Maker 2 », le Mario bricolo qui fait retomber en enfance
Par Corentin Lamy
Et si les trente dernières années n’avaient pas existé ? Une hypothèse séduisante qu’explore le nouveau jeu de construction de Nintendo.
Un jeu aussi beau et frais que vous l’étiez en 1990. / Nintendo
On ne compte plus les excellents jeux sortis dans l’indifférence générale entre 2012 et 2015 sur Wii U, la console de Nintendo boudée par le public, qui ont aujourd’hui droit à leur seconde chance sur Switch, sa petite sœur à l’insolent succès. Super Mario Maker est de ceux-là. Sauf que plutôt qu’une copie carbone, c’est une version enrichie – une suite en fait – que Nintendo a préféré sortir vendredi 28 juin.
Le principe est rigoureusement identique. Super Mario Maker 2 est une sorte de caisse de LEGO virtuelle, que l’on assemble librement pour fabriquer ses propres niveaux du jeu de plate-forme Super Mario. Comme son prédécesseur, Super Mario Maker 2 se présente au départ comme une grille vide, sur laquelle on va dessiner un parcours, poser des ennemis, élaborer des pièges et des passages secrets, en piochant dans les nombreux outils à notre disposition, tirés de certains des épisodes les plus connus de la série.
On peut ainsi créer ses niveaux inédits dans le style de ceux Super Mario Bros. (1985), Super Mario Bros. 3 (1988), Super Mario World (1990) ou du plus récent New Super Mario Bros. U (2012), les essayer immédiatement, et puis, évidemment, sans quoi cela n’aurait pas grand intérêt, les partager.
Super Mario Maker 2 - Bande-annonce (Nintendo Switch)
Durée : 01:29
Pour justifier le « 2 » de son titre, et convaincre les acheteurs du premier épisode de repasser à la caisse, Nintendo a tout de même enrichi la formule initiale. Déjà, en glissant dans la boîte de nouveaux outils, permettant de créer des niveaux encore plus variés. On citera donc, pêle-mêle, l’apparition des interrupteurs, des plates-formes inclinées, des niveaux semi-aquatiques, des stages avec « autoscrolling », de nouveaux objets bonus, on en passe, et des plus techniques.
Signalons quand même l’une des nouveautés les plus intéressantes : la possibilité d’imposer au joueur de remplir certains objectifs (ramasser un certain nombre de pièces, retrouver et escorter un personnage, etc.) pour accéder à la fin d’un niveau. On se félicitera aussi de l’apparition de stages dans le désert, la neige ou le ciel, portant à dix le nombre d’environnements. Voire vingt d’ailleurs, puisque chaque environnement possède désormais une alternative « nocturne » apportant son lot de variantes, comme par exemple la quasi-disparition de la gravité dans l’environnement « ciel » qui donne presque l’impression de jouer à Super Mario Galaxy.
Le plaisir de l’expérimentation
Enfin, terminons par l’arrivée remarquée d’un cinquième « style », en plus de ceux de Super Mario 1, 3, World et U : le style Super Mario 3D World, tiré du jeu de 2013 du même nom, avec ses costumes de chats et ses niveaux en trois dimensions. Pas de véritable progression en 3D ici, les niveaux se déroulent toujours sur un axe gauche droite, mais ce style offre néanmoins la possibilité d’utiliser de nombreux ennemis et outils inédits qui jouent avec la profondeur, comme ces canons en arrière-plan qui tirent sur le joueur.
Une bonne idée, mais qui a un coût : alors qu’il est toujours possible de basculer, à la volée, entre les quatre styles d’origine, il n’est pas possible de changer a posteriori le style d’un niveau créé avec les outils, les objets et les ennemis de Super Mario 3D World tant ils sont particuliers. Plus qu’un ajout, c’est presque un jeu dans le jeu – au détriment de la cohérence et de l’élégance de l’ensemble.
Les niveaux empruntant le style de « Super Mario 3D World » sont riches en nouveaux concepts mais s’accordent assez mal avec le reste du jeu. / Nintendo
Si on est ravi de voir Super Mario Maker arriver sur Switch, et qu’on apprécie la plupart de ces nouveautés, il faut reconnaître que le mode construction se prêtait tout de même mieux à la Wii U et à la 3DS. Deux consoles qui étaient, en effet, équipées d’un stylet, ce qui rendait l’élaboration de niveaux autrement moins laborieuse.
Là, avec ses gros doigts boudinés ou en passant par l’interface assez lourde de la manette, la construction est tout de même moins naturelle, et le plaisir de l’expérimentation moins immédiat. De quoi décourager les créateurs les moins acharnés.
Heureusement, les plus motivés, eux (peut-être parce qu’ils ont acheté pour 10 euros de plus l’édition collector qui embarque un stylet), n’ont pas traîné à inonder les serveurs de Nintendo en niveaux à télécharger. Le mode en ligne a d’ailleurs été revampé, proposant, outre un nombre virtuellement infini de stages, un mode multijoueurs à quatre, ou encore un système de recherche permettant d’être certain de trouver son bonheur. Dommage qu’il nécessite d’être abonné au service Nintendo Switch Online.
Comme si rien n’avait existé
C’est d’ailleurs peut-être pour proposer tout de même du contenu à ceux qui n’auraient pas les moyens de payer cet abonnement que Nintendo a décidé d’inclure dans ce nouveau Super Mario Maker des niveaux déjà préconstruits. Une centaine de niveaux donc, dont 70 dans le style des vieux épisodes des années 1985-1990. Plus qu’un lot de consolation, c’est en fait un véritable petit miracle.
Dans ce mode « histoire », le joueur est invité à fouiller ces niveaux à la recherche de pièces qu’il peut ensuite dépenser pour reconstruire le château de la princesse Peach.
Dans le mode « histoire », Mario a la lourde tâche de faire quelque chose sans le moindre intérêt. / Nintendo
Evacuons rapidement ce prétexte sans grand intérêt pour nous concentrer sur cette incroyable anomalie temporelle : avoir le luxe de découvrir, en 2019, des dizaines de nouveaux niveaux développés par les équipes de Nintendo pour Super Mario Bros., Super Mario Bros. 3 et Super Mario World. Et mis en musique, s’il vous plaît, par le compositeur original de la série.
Comme si les années 1990, 2000, 2010, n’avaient pas existé. Comme si en insérant la cartouche de Super Mario Maker 2 dans sa Switch, on ouvrait un portail vers une époque qu’on pensait révolue, perdue, et qu’on s’était presque un peu résolu à oublier.
Comme si on avait dix ans à nouveau, comme si tout ce qui était arrivé depuis – la PlayStation, la 3D, les lootboxes, le cloud gaming, les deux guerres en Irak, le 11-Septembre, les attentats en France, les responsabilités, la vie, la mort et les emmerdes – n’avaient été que de mauvais rêves.
Vu comme une capsule temporelle, Super Mario Maker 2 est une expérience régressive pour grands enfants donc, mais néanmoins une expérience de qualité, pleine de trouvailles géniales et totalement modernes, à même de satisfaire les joueurs exigeants que nous sommes devenus.
En bref
On a aimé :
- Des nouveaux niveaux pour les trois meilleurs Super Mario.
- Un mode en ligne renforcé, avec un nombre virtuellement infini de nouveaux niveaux.
- Un nouvel environnement (Super Mario 3D World).
On n’a pas aimé :
- Un seul nouvel environnement : où sont Super Mario Bros. 2, ou les Super Mario Land ?
- Moins évident à prendre en main.
- Bien moins intéressant si on ne paye pas d’abonnement.
C’est plutôt pour vous si…
- Vous avez découvert le jeu vidéo avec Super Mario Bros.
- Vous preniez votre goûter devant Super Mario Bros. 3.
- Vous avez raté vos premières booms pour jouer à Super Mario World.
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
- Vous préfériez Alex Kidd.
La note de Pixels
Super Mario Bros. 3/4