La zone euro enterre les promesses de campagne de M. Mitsotakis
La zone euro enterre les promesses de campagne de M. Mitsotakis
Par Sophie Petitjean (Bruxelles, bureau européen)
Les grands argentiers ont déjà fait savoir qu’ils refuseraient de renégocier avec la Grèce l’objectif d’excédent primaire de 3,5 %.
Le nouveau premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis sur le perron de la Villa Máximos à Athènes, le 8 juillet. / Thanassis Stavrakis / AP
Après les félicitations, les mises en garde. Au lendemain de l’élection de Kyriakos Mitsotakis, les Européens ont douché les espoirs du nouveau premier ministre grec de renégocier la trajectoire budgétaire de son pays, comme il l’avait pourtant laissé entendre pendant sa campagne. « Les engagements sont les engagements », a déclaré lundi 8 juillet le président de l’Eurogroupe, Mario Centeno. « Si on ne les tient pas, la crédibilité est la première chose qui s’effondrera. Cela amènera moins de confiance, moins d’investissement et à terme, moins de croissance », a-t-il poursuivi.
Même avis du côté français, où l’on estime que le nouveau pouvoir conservateur ne pourra pas revenir sur les engagements pris par la Grèce, sous peine d’une impasse pour le pays ou de difficultés pour la zone euro. « Tout retour à des tensions serait d’ailleurs rapidement sanctionné par le marché », a confirmé un haut responsable.
Des progrès limités
Les ministres des finances de la zone euro étaient réunis, lundi, à Bruxelles pour examiner la situation économique, fiscale et financière de la Grèce ainsi que le respect de ses engagements post-programme. Car Athènes a beau être sortie de sa mise sous tutelle en juin 2018, elle n’en reste pas moins soumise à la surveillance de ses créanciers de la zone euro (dix-neuf Etats membres de l’UE). Un « cadre de surveillance renforcée » qui permet notamment de conditionner les restructurations de dette préalablement actées au respect des réformes agréées ces dernières années.
Le dernier rapport soumis ce lundi aux ministres européens fait état d’un ralentissement des progrès en Grèce, dont la dette s’élevait l’an dernier à 180 % de son PIB. Il note que les baisses d’impôts et les aides aux retraités annoncées au mois de mai remettent en question la réalisation des objectifs budgétaires fixés avec ses créanciers de la zone euro. « Le rythme de la mise en œuvre des réformes s’est ralenti ces derniers mois et certaines mesures ne correspondent pas aux engagements pris auprès des partenaires européens », indique le document, qui constate que sur la quinzaine de mesures annoncées, plusieurs ont pris du retard.
On ne touche pas aux fondamentaux
Mais les institutions européennes s’inquiètent tout particulièrement des promesses de campagnes du tout nouveau premier ministre grec. Avant l’élection, le candidat de Nouvelle démocratie (droite) avait, à plusieurs reprises, exprimé son intention de renégocier l’objectif d’excédent primaire convenu de 3,5 % du Produit intérieur brut jusqu’en 2022. L’excédent primaire, c’est la différence entre les recettes et les dépenses sans tenir compte du service de la dette, des intérêts que l’Etat doit évidemment honorer. « Si nous arrivons à Bruxelles avec un plan de réformes raisonnables qui soutient la croissance, je pense que la discussion d’abaisser les objectifs d’excédent budgétaire demandés à la Grèce pourra être possible. Si nous présentons un plan qui assure que la croissance grecque sera de plus de 3 %, nos partenaires européens devraient voir cela d’un bon œil. », avait-il assuré dans nos colonnes.
A l’époque, les Européens s’étaient bien gardés de commenter. Mais au lendemain des élections, les félicitations passées, l’heure est à la fermeté : « L’objectif de 3,5 % est une pierre angulaire du programme d’aide depuis le début. C’est une condition sine qua non à des mesures supplémentaires d’allègement de la dette », a précisé Klaus Regling, le directeur du Mécanisme européen de stabilité, annonçant une première visite à Athènes la semaine prochaine. Et d’insister sur le fait que son institution est un « partenaire de long terme » de la Grèce, dans la mesure où les 200 milliards de prêts octroyés courent sur plus de 40 ans, et qu’elle suivra donc attentivement la situation. Il risque donc d’y avoir plus d’une promesse de campagne qui ne sera pas tenue.