En Seine-Saint-Denis, seulement un collégien sur deux sait nager
En Seine-Saint-Denis, seulement un collégien sur deux sait nager
Par Adrien Pécout
Une charte va être remise aux collectivités locales du département pour combler ses carences en matière d’accès à la natation.
Seul un collégien sur deux de Seine-Saint-Denis sait nager, selon une étude réalisée en 2013-2014 par la direction des services départementaux de l’éducation nationale.
L’heure est venue de se jeter à l’eau. En Seine-Saint-Denis, d’ici au mois de juin, une charte sera remise dans sa version définitive aux collectivités locales du département pour combler ses carences en matière d’accès à la natation. À l’origine du texte, un constat alarmant : à son entrée au collège, seulement un collégien sur deux du « 9-3 » sait nager. 47 % d’entre eux, plus précisément, selon une étude réalisée en 2013-2014 par la direction des services départementaux de l’éducation nationale.
Les grandes lignes de la charte « Tous nageurs en Seine-Saint-Denis » ont déjà été présentées, le 14 avril, à l’occasion d’un colloque organisé dans les locaux du conseil départemental de Seine-Saint-Denis. Parmi les organismes qui portent le texte, les sections locales du Comité national olympique sportif français (CNOSF), du Syndicat national de l’éducation physique (SNEP) ou encore de la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT).
« Tout a un coût, mais tout a un sens, aussi »
Pour remédier à la situation, le texte dresse une liste de préconisations « non exhaustives ». Est ainsi demandé aux communes du département, pour chaque écolier, d’assurer « au minimum 30 heures de pratique avant son entrée en 6e ». Autres solutions avancées : « l’entrée gratuite des enfants (de 5 à 16 ans) au sein des piscines » ainsi que « l’augmentation des créneaux ouverts au public ». Autant de propositions que les collectivités seront libres ou non d’appliquer.
« Tout a un coût, mais tout a un sens, aussi », estime Hugo Pontais, secrétaire départemental du SNEP. Professeur d’éducation physique et sportive dans un lycée de Pantin, le syndicaliste observe déjà à son niveau la bataille pour l’attribution des créneaux de nage entre écoliers, collégiens et lycéens, et grand public.
Si cette charte reste évidement facultative pour les collectivités, elle a déjà le mérite de dresser un état des lieux. Sans pour autant indiquer les statistiques des écoliers d’autres départements, le texte souligne un problème structurel propre à la Seine-Saint-Denis : la question du sous-équipement et du financement de nouvelles infrastructures. Dans ce département, l’un des plus pauvres de France, seulement 0,55 bassin pour 10 000 habitants. Un taux inférieur à la moyenne régionale (0,60 bassin) et nationale (0,94 bassin).
Un « plan piscines » déjà en cours dans le département
Cet état des lieux inquiète le président du conseil départemental, Stéphane Troussel. Interrogé par Le Monde, l’élu socialiste voit dans la charte « un point d’appui pour dire à l’Etat et à la région Ile-de-France : ’tous les acteurs de Seine-Saint-Denis sont prêts, engagez-vous à nos côtés’».
De son côté, le département a déjà lancé un « plan piscines ». « La Seine-Saint-Denis est confrontée, avec ses trente-six piscines et soixante-dix-neuf bassins, à un manque important d’équipements mais également à une inégale répartition », écrivait M. Troussel dans ce rapport rédigé en février 2015, déplorant que « les principales victimes » soient « les enfants et les jeunes ».
D’ici à 2020, le département prévoit ainsi la construction de cinq à huit piscines communales et la rénovation de dix à quinze autres. Reste à mobiliser les fonds nécessaires. L’apport du conseil départemental « se situerait entre 20 et 40 millions d’euros », indique le texte, qui précise que construction des piscines équivaudrait à elle seule à une somme comprise entre 60 et 100 millions d’euros. Un montant qui rend ce plan également « conditionné à la participation financière du ministère de la ville de la jeunesse et des sports, ainsi que de la région Ile-de-France ».
L’histoire ne dit pas si ce décompte inclut l’éventuelle piscine olympique (50 mètres de long) qui sera bâtie en Seine-Saint-Denis si Paris obtient, en septembre 2017, l’assurance d’organiser les Jeux olympiques 2024. Hugo Pontais se projette déjà :
« On ne peut pas imaginer que le département accueille à ce moment-là une partie du plus grand événement sportif au monde et que, dans le même temps, les écoliers n’aient pas accès à la pratique sportive. Et en particulier à la natation. »
Mais au-delà des collégiens de Seine-Saint-Denis, un dispositif national, « Citoyens du sport », a également déjà été lancé l’an passé à l’initiative du ministère de la ville, de la jeunesse et de l’éducation nationale. L’opération « J’apprends à nager » offre, dans ce cadre, dix séances d’une heure à chaque écolier qui s’inscrit à un stage d’initiation. Le principe, là encore : « chaque enfant qui entre en 6e doit savoir lire, compter, écrire… et nager. »