Turner Prize : qui sont les quatre candidats en lice
Turner Prize : qui sont les quatre candidats en lice
Par Emmanuelle Jardonnet
Les œuvres pour le prix d’art contemporain seront exposées à la Tate Britain, avant désignation du vainqueur en décembre.
Cette sculpture de plus de 5 mètres est l’interprétation par l’artiste, Anthea Hamilton, d’un projet des années 1970 de l’architecte italien Gaetano Pesce pour un immeuble de bureaux de Manhattan qui n’a jamais vu le jour. Les fesses devaient constituer la porte d’entrée du bâtiment. | ANTHEA HAMILTON
« Une sculpture de fesses et un petit-train », résume ironiquement le Guardian dans une association dont il fut question dans un colloque récemment organisé aux Beaux-Arts sur « L’irresponsabilité de l’artiste ». Le Turner Prize a annoncé, jeudi 11 mai, la liste des quatre jeunes artistes britanniques (il faut avoir moins de 50 ans et résider en Grande-Bretagne pour concourir) en lice pour l’édition 2016. Le choix des œuvres remarquées au cours de l’année ne devrait donc pas manquer, une nouvelle fois, de ravir autant que d’agacer professionnels, curieux et détracteurs. Voici qui sont ces figures émergentes retenues pour le prestigieux prix d’art contemporain :
- Anthea Hamilton
La Britannique Anthea Hamilton est l’une des quatre artistes en lice pour le Turner Prize. | TURNER PRIZE/TATE
Cette artiste de 38 ans est connue pour ses installations aussi humoristiques que théâtrales jouant sur le kitsch, la culture populaire et l’identité. Le corps est souvent au centre de ses mises en scène décalées, pleines de faux-semblants et d’effets de surprise. Son travail a déjà été montré en France au Palais de Tokyo et à la Biennale de Lyon, notamment. Elle est nommée pour son exposition au Sculpture Centre de New York au titre mémorable : Lichen! Libido! Chastity! (Lichen ! Libido ! Chasteté !), dans laquelle une sculpture de plus de 5 mètres représentant les fesses d’un homme nu, tenues entre ses mains, émergent d’un mur en briques. Une création qualifiée par le New Yorker d’« une des œuvres les plus bizarres visibles à New York cette saison ». Il s’agit de l’interprétation par l’artiste d’un projet des années 1970 de l’architecte italien Gaetano Pesce pour un immeuble de bureaux de Manhattan qui n’avait jamais vu le jour. Les fesses devaient constituer la porte d’entrée du bâtiment. Parmi les autres pièces de l’exposition : des ceintures de chasteté transformées en balançoires ou des tuyaux du bâtiment transformés en cigarettes géantes.
- Josephine Pryde
Les visiteurs parcouraient l’exposition « Lapses in Thinking By the Person I Am », de Josephine Pryde au CCA Wattis de San Francisco, assis sur un train à l’échelle 1/10e. | TURNER PRIZE/TATE
Cette photographe de 49 ans est probablement la plus connue des quatre candidats (elle était représentée dans l’exposition « New Photography 2013 » au MoMa, à New York). L’artiste fait régulièrement interagir son travail photographique avec des sculptures, dans des installations où elle explore des questions sociétales comme les codes de l’art contemporain. C’est le cas dans son exposition « Lapses in Thinking By the Person I Am » (erreurs de pensée par la personne que je suis), au CCA Wattis de San Francisco, pour laquelle elle a été retenue au Turner : les visiteurs étaient amenés à explorer l’accrochage photo, qui portait sur des mains de femme, assis sur un train à l’échelle 1/10e – une reproduction d’une locomotive de l’Union Pacific chargée de deux wagons de fret tagués.
- Michael Dean
L’artiste Michael Dean s’intéresse aux représentations physiques du langage, et crée des œuvres à partir de matériaux de construction ou de rideaux de fer de magasins. | TURNER PRIZE/TATE
Cet artiste de 39 ans a été retenu pour deux expositions : « Sic Glyphs » à la South London Gallery, et « Qualities of Violence » au De Appel Arts Centre d’Amsterdam. Dans ses sculptures, il s’intéresse aux représentations physiques du langage. Les textes se matérialisent ainsi sur ses œuvres créées à partir de matériaux de construction ou de rideaux de fer de magasins, notamment par le biais d’accumulation d’autocollants de sa fabrication.
- Helen Marten
Une sculpture de l’artiste britannique Helen Marten, en lice pour le Turner Prize. | TURNER PRIZE/TATE
C’est l’année de la consécration pour cette jeune artiste de 30 ans, puisqu’en plus d’être nommée pour le Turner Prize, elle est en lice pour le premier prix britannique dédié à la sculpture, le Hepworth Prize. Côté Turner, c’est son exposition « Eucalyptus Let Us In » à la galerie Green Natfali de New York, ainsi que son projet intitulé « Lunar Nibs », présenté à la Biennale de Venise en 2015, qui ont retenu l’attention des jurés. Elle assemble un grand nombre d’objets trouvés dans des sculptures denses, à la fois hétéroclites et sophistiquées, qui appellent à être observées de près. « Son travail défie la forme comme le sens : il attire et intrigue tout en résistant aux interprétations et catégorisations », peut-on lire sur le site de la Tate.
Le travail des quatre artistes sera exposé conjointement à la Tate Britain, à Londres, du 27 septembre au 8 janvier 2017. Le nom du gagnant sera annoncé en décembre au cours d’une cérémonie retransmise en direct de la Tate. Celui-ci recevra 25 000 livres, soit plus de 30 000 euros. En 2015, c’était un collectif d’architectes inclassable, Assemble, qui avait remporté le prix.
Cette année, les jurés sont Michelle Cotton, la directrice du musée d’art contemporain Bonner Kunstverein (Bonn), la commissaire d’exposition Tamson Dillon, Beatrix Ruf, la directrice du Stedelijk Museum (Amsterdam), et Simon Wallis, le directeur du musée d’art moderne et contemporain Hepworth, à Wakefield. Un jury présidé par Alex Farquharson, le directeur de la Tate Britain.