Le Conseil d’Etat rejette le recours déposé par la mosquée salafiste d’Ecquevilly
Le Conseil d’Etat rejette le recours déposé par la mosquée salafiste d’Ecquevilly
La mosquée d’Ecquevilly, dans les Yvelines, contestait sa fermeture ordonnée par le ministère de l’intérieur dans le cadre de l’état d’urgence, le 2 novembre.
L’ancienne mosquée d’Ecquevilly, dans les Yvelines, aujourd'hui fermée. | NICOLAS KRIEF POUR LE MONDE
Le Conseil d’Etat a rejeté, mardi 6 décembre, le recours déposé par la mosquée salafiste d’Ecquevilly, dans les Yvelines. L’association islamique Malik Ibn Anas (AIMA), gérante de la salle de prière d’Ecquevilly, demandait l’annulation de sa fermeture administrative décidée par le ministère de l’intérieur, le 2 novembre, dans le cadre de l’état d’urgence.
La mosquée d’Ecquevilly avait appelé lundi à ne pas confondre rigorisme religieux et sympathies djihadistes. Les autorités l’accusent d’incitation à la haine et d’apologie du terrorisme. En cause, la teneur des discours de son populaire imam, Youssef Abou Anas.
« Troubles à l’ordre public »
Le 17 novembre, le tribunal administratif de Versailles, saisi au nom de la liberté de culte par l’association islamique Malik Ibn Anas, qui gère la mosquée, avait confirmé sa fermeture. Ses avocats avaient fait appel devant le Conseil d’Etat. La mosquée est « un lieu de référence influent de la mouvance salafiste, prônant un islam rigoriste, appelant à la discrimination et à la haine, voire à la violence à l’encontre des femmes, des juifs et des chrétiens », écrivait le préfet dans son arrêté.
« L’imam qui choisit de relayer ces paroles » a une « responsabilité à attiser des comportements anti-républicains », et de ce fait « compromet le vivre-ensemble », génère des « troubles à l’ordre public » et potentiellement des « violences », a insisté la représentante du ministère de l’intérieur sur les bancs de la plus haute juridiction administrative. Ces discours ont « un retentissement sur la société d’Ecquevilly », 4 000 habitants, assure-t-elle, affirmant que « des enfants refusent des enseignements trop occidentalisés à l’école ou s’en prennent à leurs camarades musulmans modérés ».
William Bourdon et Vincent Brengarth, défenseurs de l’association, ont souligné que les preuves manquaient. « Les gens ont peur » de témoigner, a rétorqué le ministère, sous l’œil de plusieurs fidèles venus écouter les débats. L’avocat, Me Bourdon, a dénoncé aussi une lecture « décontextualisée, de mauvaise foi » des propos de l’imam, qui « doivent être pris dans la complexité indivisible de tout le prêche ».
Le salafisme n’est pas interdit
Youssef Abou Anas est également accusé par les autorités d’avoir « légitimé dans un prêche » du 20 novembre 2015 les attentats parisiens perpétrés quelques jours plus tôt : « Ces actes étaient un suicide qui ne respectait pas les règles de la religion, mais en temps de guerre, ce n’est pas mauvais en soi. » C’est une « source humaine » des renseignements, « présente au prêche », « qui l’a entendu », affirme le ministère. La défense de l’association réfute : « Cette phrase, vous l’avez inventée. » Elle répète que la mosquée a condamné les attentats, de manière « réitérée », « dès 2013 ».
Me Bourdon s’emploie à rappeler que si le salafisme est « rigoriste, conservateur, prend des positions dans notre République que nous avons le droit de considérer comme détestables », notamment sur les droits des femmes, ce courant fondamentaliste sunnite n’est pas pour autant interdit.
Une vingtaine de mosquées et salles de prières présumées radicalisées ont été fermées depuis l’instauration de l’état d’urgence après les attentats du 13 novembre 2015. La France compte quelque 120 mosquées et salles de prière salafistes ou sous influence du salafisme.