Emmanuel Macron est sorti de son silence sur les « gilets jaunes ». En visite d’Etat en Belgique, mardi 20 novembre, le président de la République, qui participait à un débat avec quelque 800 étudiants de l’université de Louvain-la-Neuve, a tenté, pour la première fois depuis le début des blocages samedi, de défendre la position de l’exécutif, alors que le gouvernement continue de chercher une porte de sortie au conflit.

« C’est dans le dialogue qu’on peut en sortir, dans l’explication, dans la capacité à trouver à la fois le bon rythme et les solutions de terrain », a-t-il jugé. Interrogé sur les effets de la transition écologique, Emmanuel Macron a reconnu que « ces transformations ne sont faciles pour personne (…). Cela suppose de faire de la pédagogie, d’avoir des mesures d’accompagnement sociales, économiques, et de ne céder à aucun lobby. » Le gouvernement a déjà annoncé un plan d’aide de 500 millions d’euros pour les foyers les plus modestes.

Dans les prochains jours, François de Rugy, le ministre de la transition écologique, pourrait présenter quelques autres mesures. Mais personne n’imagine aujourd’hui au sommet de l’Etat qu’elles permettront d’éteindre la colère des « gilets jaunes ». « C’est une colère dirigée contre les élites et qui remonte loin. Elle ne se fixe pas sur une revendication précise, mais sur une inefficacité de l’action publique qui n’est plus supportable », analyse Gilles Le Gendre, président du groupe LRM à l’Assemblée.

« Le cul sur le baril »

A Paris, Edouard Philippe, en première ligne depuis les manifestations du 17 novembre, continue à chercher une issue à la crise. Le sujet a été abordé, mardi matin, lors du petit-déjeuner traditionnel entre les poids lourds de la majorité, sans qu’une solution ne se dessine. « Le mouvement bénéficie d’un fort soutien de la population. On attend de voir ce qui se passe samedi », explique un participant, alors que les « gilets jaunes » appellent à une manifestation nationale dans la capitale en fin de semaine. « Pour l’instant, le mot d’ordre c’est fermeté », poursuit-il. Le mouvement a déjà fait deux morts et 530 blessés, et le gouvernement juge qu’il est en voie de « radicalisation ».

A Matignon comme à l’Elysée, on consulte et on cherche une manière d’apaiser le débat. « Cette histoire sera une tâche dans le quinquennat, il nous faut en sortir sans laisser les choses pourrir », juge un proche du président de la République. « L’élection de Macron n’a pas été un mouvement massif d’optimisme. On est passé à deux doigts de la victoire du pessimisme et ce mouvement nous le rappelle. On avait le cul sur le baril, ça n’a pas pété mais le baril est toujours là », poursuit-il.

Comme l’a répété Edouard Philippe devant les députés LRM mardi, il faut « garder le cap ». « On se fait engueuler, (…) la situation est tendue », a-t-il constaté, avant d’estimer : « On a beaucoup essayé le zigzag dans ce pays (…) Je pense que nous gagnerons collectivement par la cohérence, la constance et la détermination. »

Le chef du gouvernement a en revanche incité les élus de la majorité à monter plus souvent au créneau pour défendre la politique de l’exécutif. « Dans le plus fort de la mobilisation, avons-nous su occuper le terrain ou répondre aux critiques ? Trop peu », a ainsi jugé le premier ministre. Un reproche que Gilles Le Gendre juge injustifié. En revanche, précise le patron des députés LRM, « nous devons rectifier le tir sur la manière dont nous parlons aux Français. Leur expliquer mieux où nous voulons les emmener. Nous ne transformerons pas le pays sans eux mais avec eux. »

Malgré les critiques dans la majorité, Edouard Philippe a répété devant les députés LRM qu’il n’envisageait pas d’organiser un nouveau Grenelle de l’environnement, comme le suggère Laurent Berger, le patron de la CFDT. Il a en revanche évoqué une « discussion territorialisée », sans en dire plus sur ses intentions. « L’idée, c’est de voir comment on peut mener le débat et la concertation de manière décentralisée dans les régions », explique-t-on à Matignon. L’exécutif compte aussi sur la loi d’orientation des mobilités et la programmation pluriannuelle de l’énergie, respectivement présentées lundi 26 et mardi 27 novembre, pour mieux expliquer son action en matière de transition écologique.