Partie de cash-cash pour le « Boléro » de Ravel
Partie de cash-cash pour le « Boléro » de Ravel
Par Renaud Machart
Un documentaire revient sur l’imbroglio lié à l’œuvre du compositeur, qui entre dans le domaine public le 1er mai (dimanche 1er mai, à 9 h 25, sur France 5).
Maurice Ravel, en 1928. | © 18ème District
Un documentaire revient sur l’imbroglio lié à l’œuvre du compositeur, qui entre dans le domaine public le 1er mai (dimanche 1er mai, à 9 h 25, sur France 5).
Le Boléro de Maurice Ravel (1875-1937), scie musicale au principe simple et à la réalisation géniale – un ostinato de percussion et de pizzicati de cordes soutenant une mélodie répétée au fil d’un gigantesque crescendo orchestral –, tombera dans le domaine public le 1er mai. C’est donc avec un parfait à-propos que, ce jour même, France 5 consacre un documentaire fouillé à ce qui est d’ordinaire considéré comme la pièce de musique savante la plus jouée dans le monde.
Les droits générés par les palanquées d’enregistrements parus depuis celui qu’a dirigé Albert Wolff en 1930 – et non le compositeur lui-même, erreur que reproduit hélas Qui a volé le « Boléro » de Ravel ? de Fabien Caux-Lahalle – auront été une formidable machine à sous pour les héritiers et les éditeurs de Ravel. A quoi s’ajoutent les interprétations en concert, les arrangements de tout acabit et l’utilisation de l’œuvre au cinéma – comme par Claude Lelouch dans Les Uns et les Autres (1980).
Une longue dispute judiciaire
Plus que les effarants chiffres de royalties, c’est l’opaque imbroglio juridique associé au Boléro qui laisse pantois : célibataire sans enfants, Ravel laisse son héritage à son frère Edouard ; à la mort de ce dernier, une longue et rhizomatique dispute légale débute, faisant s’affronter ou s’allier un cousin tromboniste, une masseuse et son mari chauffeur de maître, un éditeur compromis pendant l’Occupation, un ancien directeur juridique de la Sacem, qui finit par mettre la main sur une grosse partie du magot et parvient à le dissimuler au fisc par des sociétés de complaisance offshore. Tout le monde voulait décidément toucher à ce grisbi-là.
Si Fabien Caux-Lahalle appuie son enquête sur de nombreux entretiens avec des spécialistes du droit d’auteur (avocats, représentants de la Sacem, personnalités politiques) ainsi que sur des documents légaux et des articles de presse, il s’est essentiellement fondé sur une longue enquête publiée en 2000 dans Le Point. Celle-ci, pour la première fois, tentait de décrypter cet écheveau qui demeure bien embrouillé.
Des archives audiovisuelles rares ou inédites apportent beaucoup à l’agrément du téléspectateur, notamment les arrangements – ou plutôt les dérangements – en reggae ou en folklore mexicain…
« Qui a volé le “Boléro” de Ravel ? », de Fabien Caux-Lahalle (Fr., 2016, 60 min). Dimanche 1er mai, à 9 h 25, sur France 5.