Prix Nobel de littérature : Bob Dylan, un homme de paroles
Prix Nobel de littérature : Bob Dylan, un homme de paroles
Par Bruno Lesprit
S’il est souvent dit de Dylan que sa force incontestable réside dans ses textes, c’est généralement l’argument qu’utilisent ses réfractaires pour mieux le tenir à distance.
De « Song to Woody » (1961) à « It’s All Good » (2009), Bob Dylan a écrit un bon demi-millier de chansons officiellement recensées, ce qui constitue un des corpus les plus impressionnants de la musique populaire. | ISTVAN BAJZAT / AFP
Comme pour Georges Brassens (1921-1981), s’il est souvent dit de Bob Dylan, qui s’est vu décerner le prix Nobel de littérature jeudi 13 octobre, que sa force incontestable réside dans ses textes, c’est généralement l’argument qu’utilisent les réfractaires pour mieux le tenir à distance, en déplorant, chez l’un comme chez l’autre, un accompagnement musical jugé fruste et monotone.
Brassens et Dylan ont souffert de cette mauvaise réputation qui leur a été faite, alors que tous deux sont également de grands mélodistes. Si on peut effectivement les lire, il faut d’abord les entendre. Ils sont des hommes de paroles (de chansons). Et comme ils ont pris soin de les écrire et de les déposer, elles ne s’envoleront pas.
De Song to Woody (1961) à It’s All Good (2009), Bob Dylan a écrit un bon demi-millier de chansons officiellement recensées, ce qui constitue un des corpus les plus impressionnants de la musique populaire. Le seul, en tout cas, dans lequel ont puisé à la fois Marlene Dietrich, Nina Simone, Elvis Presley, Bob Marley, les Rolling Stones, Stevie Wonder, les Guns & Roses et Norah Jones.
Une veine frontale ou surréaliste, satirique ou symboliste
Ce n’est pas étonnant, en soi : on peut trouver dans ce songbook ce que l’on cherche. Une veine frontale ou surréaliste, satirique ou symboliste, et bien davantage, d’humeurs joyeuse ou mélancolique, tendre ou féroce, mystique ou nihiliste. Une diva du jazz peut s’emparer de son répertoire au même titre qu’un groupe de death metal.
En cinq décennies de carrière, le musicien a alterné des « périodes » qui peuvent aller du noir le plus intense aux couleurs les plus solaires, avec le bleu du blues toutefois comme dominante.
Dylan a depuis longtemps suscité un débat : quel statut exact faut-il lui donner ? Un simple (pour ne pas dire vulgaire) chanteur ? Un poète de l’oralité, dans la tradition des ménestrels du Moyen âge ? Un écrivain ?
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Ce texte est extrait d’un numéro hors-série du Monde, « Bob Dylan, à la poursuite d’une légende »