Fillon, une riposte aux allures d’opération survie
Fillon, une riposte aux allures d’opération survie
Par Matthieu Goar, Alexandre Lemarié
François Fillon, candidat de la droite en sursis, devait s’exprimer, lundi 6 février, pour tenter de sauver sa campagne.
La contre-attaque a des allures d’opération survie. François Fillon veut tenter de reprendre la main lors d’une semaine qui s’annonce décisive, après dix jours de tempête née des soupçons d’emplois fictifs au bénéfice de sa femme et de deux de ses enfants. Fragilisé par cette affaire, le candidat – en sursis – s’est résolu à donner des explications plus poussées aux Français. Il devait s’exprimer rapidement, lors d’une intervention médiatique que son entourage voulait garder secrète le plus longtemps possible. Il a finalement opté pour la tenue d’une conférence de presse, lundi après-midi, conjuguant un exercice d’explication et de contrition, afin de tenter de solder la séquence.
Dos au mur, François Fillon paraît décidé à mettre cartes sur table pour sauver sa tête. Alors qu’une partie des parlementaires LR jugent sa situation intenable et appellent à son retrait, il a voulu prendre de court les députés de son camp, à la veille de leur réunion mardi à l’Assemblée, qui ressemblait à une mise à mort. Même s’il leur avait demandé, le 1er février, de le soutenir encore « quinze jours », certains élus de droite sont très remontés et ne veulent pas attendre, après un week-end dans leur circonscription, où ils ont parfois dû affronter la colère de leurs électeurs. Dimanche, le président du MoDem, François Bayrou, qui exclut désormais toute alliance avec M. Fillon, a considéré que le député de Paris « n’a pas d’autre solution » que de se retirer.
Celui qui faisait figure de favori pour la présidentielle dégringole dans les sondages. Il est désormais donné éliminé dès le premier tour de la présidentielle dans plusieurs enquêtes, au profit de Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Sur la défensive et inaudible, M. Fillon sait qu’il doit interrompre sa descente aux enfers. Alors il a décidé de multiplier les déplacements cette semaine : il ira mardi à Troyes (Aube), à la rencontre du maire de la ville, François Baroin… qui fait partie des potentiels « plans B » ; puis mercredi à Juvisy-sur-Orge (Essonne), au côté du jeune maire LR Robin Reda ; jeudi dans la Vienne pour une réunion publique en compagnie de Jean-Pierre Raffarin ; avant un déplacement prévu du 11 au 13 février à La Réunion.
« Chasse à l’homme »
Ses soutiens le poussent à mener campagne de manière active, en affichant sa détermination à aller jusqu’au bout. « Il ne faut surtout pas qu’il soit balayé comme un fétu de paille, juge son conseiller politique, Eric Woerth. L’important est de reprendre de la hauteur en parlant de son projet et de commencer la campagne maintenant et à fond. Au début, il ne sera pas audible mais petit à petit, ça émergera. »
L’équipe du candidat s’est montrée rassérénée par un sondage IFOP du Journal du dimanche selon lequel 64 % des électeurs de droite sont pour le maintien de sa candidature – contre 68 % de l’ensemble des Français qui ne le souhaitent pas – en y voyant le signe que le noyau dur tient bon. Samedi, M. Fillon a fait distribuer des tracts pour accréditer l’idée d’un supposé complot visant à l’abattre. Ces tracts, proclamant « Stop à la chasse à l’homme ! Trop c’est trop », ont été tirés à trois millions d’exemplaires. Signe de sa volonté de contre-attaquer, il a adressé la veille un message vidéo à ses troupes, sur Facebook, pour tenter de les rassurer en assurant qu’il « tiendrai[t] bon ».
Cette vidéo a été diffusée après la rencontre, selon son équipe, avec les ténors LR Gérard Larcher, Xavier Bertrand, et des appels avec Nicolas Sarkozy, Laurent Wauquiez, François Baroin, Christian Jacob et Jean-Pierre Raffarin. « Ils ont tous admis qu’un plan B était impossible », se réjouit l’entourage de Fillon. Telle est la raison du sursis accordé par les dirigeants de LR à M. Fillon : aucun candidat de substitution ne s’impose suffisamment pour éviter une nouvelle guerre des chefs.