Saakachvili, ex président géorgien, tente de rentrer en Ukraine
Saakachvili, ex président géorgien, tente de rentrer en Ukraine
Le Monde.fr avec AFP
Le président Petro Porochenko l’a privé de sa nationalité en juillet. Aujourd’hui apatride, Mikheïl Saakachvili va se présenter à la frontière polono-ukrainienne.
Mikheïl Saakachvili tenant son passeport ukrainien le 9 août. / JANEK SKARZYNSKI / AFP
L’ex-président géorgien Mikheïl Saakachvili, aujourd’hui apatride, tente ce dimanche 10 septembre de rentrer en Ukraine pour chercher à recouvrer la citoyenneté ukrainienne dont l’a privé le président Petro Porochenko.
M. Saakachvili, 49 ans, qui doit arriver à la frontière polono-ukrainienne par la route, risque d’être interdit d’entrée en Ukraine et refoulé vers la Pologne. « Je connais leur scénario », a-t-il dit aux journalistes vendredi à Varsovie. « Ils cherchent à envoyer (à la frontière) quelques jeunes filles pour m’accueillir avec le sourire et avec un très ferme refus ». « Je veux dire à ces jeunes filles et aux autres gardes-frontières : n’obéissez pas à des ordres illégaux. Appliquez la loi. (...) Et la loi est de notre côté », a déclaré M. Saakachvili.
Probablement refoulé
Un responsable des gardes-frontières ukrainiens, Oleg Slobodian, a laissé entendre que M. Saakachvili serait refoulé. « La raison de base pour qu’une personne passe la frontière, ce sont des documents valides. Si la personne n’a pas de documents valides, elle n’est pas fondée à traverser la frontière d’Etat, point final », a-t-il dit à la BBC.
Les gardes-frontières ont ajouté que si un voyageur présente au contrôle un document invalide, ce document est confisqué et son détenteur est renvoyé vers le pays d’où il vient.
M. Saakachvili détient toujours son passeport ukrainien, qu’il a montré à Varsovie aux journalistes, en indiquant qu’il allait le présenter à la frontière, « avec d’autres documents légaux ». Mais il est probable que ce passeport ne sera pas jugé valide par les autorités ukrainiennes.
Il rappelle qu’il a passé en Ukraine quatorze ans de sa vie d’adulte et a participé aux deux soulèvements pro-occidentaux de Maïdan, puis à la lutte contre la corruption en tant que gouverneur d’Odessa à partir de 2015.
« Apatride en Ukraine »
Au même moment, en 2015, il a acquis la citoyenneté ukrainienne, ce qui lui a fait perdre son passeport géorgien, la Géorgie n’admettant pas la double nationalité.
Des responsables du Haut-Commissariat aux Réfugiés de l’ONU à Genève lui ont confirmé, a-t-il précisé, qu’il était « apatride en Ukraine », autrement dit qu’il avait le droit de s’y trouver pour faire appel de la décision prise à son encontre en juillet dernier par le président Petro Porochenko, alors qu’il se trouvait aux Etats-Unis. Kiev l’a justifiée par « des renseignements inexacts fournis dans sa demande de citoyenneté ».
Elle était intervenue dans le sillage de la détérioration des rapports de M. Saakachvili avec le pouvoir de Kiev, après sa démission de son poste de gouverneur en novembre 2016, qu’il avait expliquée par les difficultés rencontrées pour combattre la corruption.
Recherché pour « abus de pouvoir »
Plusieurs personnalités politiques et membres du parlement ukrainien doivent venir l’accueillir à la frontière, a par ailleurs annoncé M. Saakachvili, dont l’ancienne Première ministre Ioulia Timochenko et l’ancien ministre de la Défense Anatoli Hrytsenko. Ainsi que des centaines, voire « des milliers », selon M. Saakachvili, de sympathisants du parti politique – le Mouvement des Forces nouvelles – qu’il a créé en Ukraine.
Charismatique réformateur arrivé au pouvoir en Géorgie à la suite de la Révolution de la Rose en 2003, M. Saakachvili a dirigé ce pays pendant une décennie. Critiqué pour son style autoritaire et surtout pour la guerre désastreuse avec la Russie en 2008, il est désormais recherché par la justice géorgienne pour « abus de pouvoir », une accusation qu’il dénonce comme politiquement motivée.
La Géorgie a demandé à Kiev de l’arrêter et de l’extrader, ont annoncé mardi les autorités ukrainiennes. Mais M. Saakachvili se dit déterminé à retourner en Ukraine, à participer aux élections et à poursuivre la lutte pour les réformes, dont il a dénoncé à Varsovie le « recul », avec « la répression des activités anti-corruption ».