Des panneaux de signalisation à Saint-Jean-d’Illac, près de Bordeaux. / RÉGIS DUVIGNAU / REUTERS

L’association anticorruption Anticor a porté plainte pour « favoritisme », dénonçant le marché des radars automatiques qui équipent certains véhicules banalisés conduits par des sociétés privées. L’association a saisi le 18 janvier le parquet national financier (PNF) pour demander une enquête sur les conditions d’attribution de ces contrats qui externalisent certains contrôles de vitesse.

La plainte d’Anticor, révélée mercredi par L’Express, soutient que « deux marchés publics faramineux » auraient été passés avec la société Fareco, filiale du groupe de BTP Fayat, « en violation totale de la législation en matière de marchés publics ». Déposée contre X, la plainte viserait indirectement le ministère de l’intérieur, ainsi que l’entreprise.

Anticor dénonce notamment un contrat de 53,8 millions d’euros passé le 1er février 2017 par la Place Beauvau. Selon l’association, ce marché a été remporté en dehors de tout appel d’offres, « au motif que la société était la seule à détenir un certificat d’homologation » des véhicules, comme l’explique l’avocat d’Anticor, Jérôme Karsenti. Selon le ministère, ce problème juridique rendait impossible toute concurrence. Il est contesté par l’association.

Externalisation des contrôles de vitesse

Fareco affirme fournir la moitié des 700 radars de franchissement de feux rouges installés sur le territoire. L’entreprise doit déployer environ 300 véhicules de contrôle de vitesse automatisé selon les informations disponibles sur son site Internet.

L’externalisation d’une partie des contrôles de vitesse effectués à bord de véhicules est destinée à libérer les forces de l’ordre de cette tâche, afin qu’elles se concentrent « sur leurs tâches prioritaires », selon Gérard Collomb, le ministre de l’intérieur. Elle a fait l’objet d’une expérimentation à partir de février 2017 en Normandie, avant d’entrer en vigueur dans cette région en décembre.

Alors que les opposants s’inquiètent de cette « privatisation », le gouvernement rappelle que les employés de sociétés privées se contenteront de piloter les voitures. Les contrôles de vitesse seront effectués automatiquement par le matériel embarqué. L’association Anticor, par l’intérmédiaire de son avocat, voit elle aussi dans ce mouvement « une dérive vers une privatisation de la justice qui verrait l’Etat transférer peu à peu sa souveraineté sur ses missions régaliennes à des personnes privées ».

Anticor avait déposé une plainte similaire dans une autre affaire, en novembre 2015, accusant la société de services numériques Atos d’avoir été favorisée dans l’attribution de quatre marchés publics concernant le parc des radars automatiques. Le parquet national financier avait ouvert une enquête pour favoritisme en mars 2016.