Thierry Bolloré, actuel directeur délégué à la compétitivité de Renault, en septembre 2017, à Francfort, en Allemagne. / TOBIAS SCHWARZ / AFP

Ainsi va le destin des grands règnes : la préparation de la succession n’est pas la période la plus tranquille. Le principat de Carlos Ghosn à la tête de Renault et de l’alliance avec Nissan et Mitsubishi n’échappe pas à cette règle. Jeudi 15 février, un numéro deux du groupe au losange – et par conséquent successeur potentiel de M. Ghosn – va être désigné par le conseil d’administration, réuni à la veille de la publication des résultats financiers.

Dans cette perspective, discussions et tractations vont bon train depuis le mois de juin 2017, quand le processus de désignation a été lancé. A quelques jours de la date, les choses se sont, semble-t-il, accélérées. L’agence Reuters a annoncé, vendredi 9 février, le départ imminent de l’Allemand Stefan Mueller, directeur délégué à la performance de Renault. « C’était l’un des dauphins présumés les plus motivés, explique un bon connaisseur de la maison Renault. Si sa démission est avérée, cela éclaircit le paysage pour la suite. »

Avec cet abandon, la voie se libère pour Thierry Bolloré, directeur délégué à la compétitivité de Renault, qui était le grand rival de M. Mueller au sein du groupe au losange. M. Bolloré fait désormais figure de favori pour être nommé directeur général (DG) délégué, poste qui n’était plus pourvu depuis le départ de Carlos Tavares en 2013.

Ultimes mouvements

Dans ces ultimes mouvements, la question de la nationalité du futur numéro deux de Renault a-t-elle joué ? Du côté du ministère de l’économie et des finances, on rappelle que l’Etat (actionnaire à 15,01 % de Renault) reste « attentif à ce que l’ancrage français de Renault perdure ». « L’Etat est surtout concentré sur l’actionnariat, explique-t-on dans l’entourage de M. Ghosn. Le fait qu’un Allemand soit nommé numéro deux n’aurait pas posé plus de problème que n’en avait posé la nomination d’un Portugais du temps de M. Tavares. »

Quel que soit le DG délégué désigné, il semble bien que M. Ghosn reparte pour un nouveau mandat de quatre ans – son dernier – comme PDG du groupe Renault. La situation ne sera pas similaire à celle de Nissan, où M. Ghosn n’est plus que président du conseil d’administration. Selon Reuters, le plan initial prévoyait un schéma équivalent chez Renault, mais il a été refusé par Bercy.

Nombreux recours

Pour ajouter aux secousses, l’ex-PDG de Total, Thierry Desmarest a démissionné de ses fonctions d’administrateur indépendant du groupe automobile la semaine dernière. Une démission que des sources anonymes de l’agence Reuters attribuent à des interrogations au sein du conseil sur le processus de recrutement du numéro deux de Renault.

Reste la question de savoir si la personne désignée jeudi sera bien le vrai dauphin. Les précédents Patrick Pélata et Carlos Tavares, successeurs quasi officiels en leur temps, incitent à la prudence. De nombreux noms ont circulé dans le mercato Renault ces dernières semaines, et qui peuvent constituer des recours.

Sont ainsi cités des extérieurs, comme le Français Didier Leroy, patron de Toyota Europe ; des candidats venus de Nissan, comme l’Espagnol Jose Munoz, homologue de M. Mueller dans le groupe japonais ; des chevilles ouvrières de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, comme Arnaud Deboeuf, qui seconde M. Ghosn dans le pilotage des trois entreprises. Un nom revient aussi avec insistance, celui de Denis Le Vot, qui dirigeait la région Eurasie chez Renault et qui vient d’être propulsé patron de Nissan Etats-Unis, un poste jusqu’ici confié aux plus hauts potentiels de l’alliance.