La confédération CFDT a été condamnée mercredi 14 mars par le conseil de prud’hommes de Paris pour non-respect de ses obligations d’employeur envers sa salariée cadre Josette Méhat, secrétaire confédérale. Le bureau de jugement, composé de deux conseillers salariés et de deux conseillers employeurs, a dès lors prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme Méhat aux torts de l’employeur, le GIE Belleville, structure qui salarie les permanents et autres personnels de la CFDT. Il lui accorde la somme de 40 000 euros environ. Le jugement écrit n’étant pas disponible avant plusieurs semaines ou mois, il n’est pas possible pour l’heure de connaître exactement les motivations retenues par les conseillers.

Mme Méhat estimait que son employeur avait manqué à son obligation légale de préservation de sa santé physique et mentale, face à ce qu’elle dénonce comme un « harcèlement moral » de la part de son supérieur, un secrétaire national en charge des questions de santé au travail à la condéfération. Même si le tribunal a ordonné le versement d’une somme trois fois plus faible au montant qu’elle demandait, elle se dit « soulagée. Enfin, on reconnaît ce que j’ai subi . La CFDT n’est pas au-dessus des lois. »

« Souffrance morale au travail »

Mme Méhat travaillait depuis 2010 en tant qu’« assistante politique » de son supérieur. Elle avait été embauchée en 2008 à la confédération, après 10 années en tant que permanente dans diverses structures de la CFDT. En dépression, Mme Méhat est en invalidité de 2e catégorie depuis le 1er juillet 2016. Son état a été qualifié d’« anxio-dépressif réactionnel » lié à une « souffrance morale au travail » par le médecin expert de la caisse primaire d’assurance maladie. Un lien que la CFDT conteste.

Tout allait bien jusqu’au retour des congés d’été de 2014, relate Mme Méhat qui décrit ainsi l’attitude de son supérieur : « Il ne me disait pas bonjour, me faisait des remarques désagréables.» Cette situation a perduré. « En novembre 2014, j’en informe Laurent Berger [secrétaire général de la CFDT]. Il me dit d’en parler avec mon supérieur. J’ai essayé. Ce dernier m’a juste dit que je n’étais “pas assez présente”. Pour moi, ce n’est pas la raison de son comportement. J’ai tenté de tenir, je ne voulais pas que ce problème s’ébruite. Je suis une militante avant tout. » Pour le même motif, avance-t-elle, elle ne fera pas état de son mal-être lors de son entretien professionnel en novembre 2014 avec le responsable des ressources humaines, Didier Cauchois.

« J’allais faire une grosse bêtise »

Son chef l’installe dans un bureau voisin. « Les relations avec lui continuaient de se dégrader. Et peu à peu, mon poste s’est vidé. » Mme Méhat dit avoir alerté à nouveau Laurent Berger qui l’aurait renvoyé encore à une discussion avec son chef.

Le 10 mars 2015, à 8 heures du matin, elle se retrouve au 8e étage, sur la terrasse du bâtiment confédéral. « J’ai réalisé que j’allais faire une grosse bêtise », se souvient-elle. Le lendemain, elle informe par courrier M. Berger qu’elle exerce son droit de retrait à compter du 15 mars 2015. « J’ai découvert le problème ce jour-là, assure M. Berger. On l’a mise aussitôt dans un autre bureau, on lui a même proposé un autre poste.» Mais quelques jours après, Mme Méhat est mise en arrêt maladie. M. Berger affirme que son supérieur « est tombé de l’armoire » quand il a parlé de ce problème avec lui. « Je ne conteste pas le mal-être de Josette mais son imputabilité » aux conditions de travail, souligne M. Cauchois, jugeant sa démarche « vénale ». « Il n’y a pas l’ombre d’un témoignage de faits de harcèlement » dans le dossier de la salariée, dit-il, se « réservant » la possibilité de faire appel après la lecture du jugement.