TV – Dowland, le chantre de la mélancolie
TV – Dowland, le chantre de la mélancolie
Par Renaud Machart
A voir et à écouter. Le luthiste Thomas Dunford rend hommage au grand compositeur élisabéthain au Wigmore Hall de Londres, soirée filmée par le site Culturebox.
Dowland : Thomas Dunford & Lestyn Davies - Wigmore Hall - Full Concert 2018
Durée : 01:10:03
Une heure et quelques de délices affligées, d’effusions lamentables : c’est à quoi invite le subtil luthiste Thomas Dunford, qui donnait, le 20 avril 2017, un beau récital au mythique Wigmore Hall (la Salle Gaveau de Londres, en quelque sorte). On emploie le mot « lamentable » dans un sens archaïsant qui convient à la musique de John Dowland (1563-1626) : celui dont le blason était « Semper Dowland Semper dolens » (« Toujours Dowland, toujours souffrant ») fut le chantre de la lamentation, de la mélancolie, de la larme devenue emblème (il publia notamment, en 1607, un cycle sublime de pièces nommées Lachrimae ou Sept larmes).
Sa musique se fait cependant parfois gaie, d’une verdeur populaire, leste même. Mais, pour l’essentiel, Dowland demeure le maître par excellence de l’expression élégiaque typique de l’époque élisabéthaine – pendant le règne de la reine Elizabeth I (1558-1603) –, d’une intense richesse culturelle.
La musique de Dowland inspira notamment Benjamin Britten (1913-1976), qui écrivit deux pièces importantes développées à partir des chansons de son grand aîné : ses Lachrymae op. 48 (1950), pour alto et piano (ou cordes), ainsi que sa grande pièce pour guitare, le Nocturnal op. 70 (1963).
Accompagné d’un contre-ténor
Cette dernière composition a d’ailleurs été enregistrée (pour Alpha) au théorbe (grand luth de la période baroque) par Edin Karamazov,avec qui le chanteur anglais Sting a gravé pour Deutsche Grammophon, en 2006, un étonnant album consacré à Dowland. Le récital du luthiste franco-américain ThomasDunford inclut deux Toccatas de Giovanni Kapsberger (ca. 1580-1651), un Italo-Allemand dont la musique pour le luth et le théorbe recèle aussi des trésors élégiaques et de surprenantes chicanes harmoniques.
En avant-goût d’un récital qu’ils devaient donner ensemble trois jours plus tard,Thomas Dunford (qui présente en anglais, de manière assez amusante, certaines des pièces jouées) appelle sur scène le contre-ténor britannique Iestyn Davies pour une Frog Galliard (« La gaillarde de la grenouille »), faisant resurgir que Dowland passa, encore adolescent, trois années à Paris.
Récital John Dowland, transmission réalisée par Frédéric Caillierez. Par Thomas Dunford (luth) etIestyn Davies (contre-ténor) (Fr., 2017, 70 min).