Les cotisations retraite vont-elles vraiment augmenter au 1er janvier 2019 ?
Les cotisations retraite vont-elles vraiment augmenter au 1er janvier 2019 ?
Par Aurélie Blondel
La fusion de l’Agirc et de l’Arrco rimera avec hausses de cotisations pour beaucoup de salariés. A l’inverse, elle se traduira pour certains par une hausse de pouvoir d’achat immédiate.
Pour les 18 millions d’actifs affiliés à ces organismes, la fusion Agirc et de l’Arrco s’accompagnera d’une refonte de l’architecture globale des cotisations. / Philippe Turpin / Photononstop
L’année 2019 débutera par un mariage. Le 1er janvier, l’Agirc (Association générale des institutions de retraite complémentaire des cadres) et l’Arrco (Association pour le régime de retraite complémentaire des salariés non-cadres), les régimes de retraite complémentaire des salariés du privé, ne feront plus qu’un. Pour les 18 millions d’actifs affiliés à ces organismes, cette fusion s’accompagnera d’une refonte de l’architecture globale des cotisations, qu’il a fallu harmoniser.
L’impact sur votre salaire net
Aujourd’hui, cadres et non-cadres ne cotisent pas de la même façon, même à salaire égal. Les seconds cotisent à l’Arrco sur la totalité de leur salaire ; les premiers sont affiliés à la fois à l’Arrco et l’Agirc (ils cotisent à l’Arrco sur la part de leur salaire ne dépassant pas le plafond de la Sécurité sociale, 3 311 € en 2018, et à l’Agirc au-delà). Mais qui dit régime unifié dit modalités de cotisations identiques : en 2019, cadres et non-cadres seront donc soumis aux mêmes taux et à la même répartition des prélèvements entre employeurs et employés. (Retrouvez ici les nouveaux taux.)
Concrètement, la majorité des salariés verront leurs prélèvements Agirc-Arrco grimper, car les partenaires sociaux ont fait d’une pierre deux coups, en dessinant le nouveau système de cotisations, ils ont au passage relevé leur niveau global. A la clé : une perte de salaire net de quelques euros à plusieurs dizaines d’euros par mois, selon les profils.
Pour se faire une idée des conséquences de la fusion de l’Agirc et de l’Arrco sur les cotisations, Optimaretraite a réalisé pour Le Monde des simulations à plafond de Sécurité sociale constant et avec les niveaux de cotisations salariales appliqués dans le cas général. Voici les résultats :
– Léna est une salariée non-cadre au salaire annuel brut de 22 000 euros. Ses cotisations salariales de retraite complémentaire s’élèvent en 2018 à 858 euros 2019, ce sera 882,20 euros avec les nouvelles règles. Hausse annuelle : 24,20 euros (0,11 % de son salaire brut), soit 2,02 euros par mois.
– Alexandre est un salarié non-cadre au salaire annuel brut de 42 000 euros. Ses cotisations salariales de retraite complémentaire s’élèvent en 2018 à 1 753,67 euros. En 2019, ce sera 1 872,50 euros. Hausse annuelle : 118,83 euros (0,28 % de son salaire), soit 9,90 euros par mois.
– Linda est une cadre au salaire brut de 62 000 euros. Ses cotisations salariales de retraite complémentaire s’élèvent en 2018 à 3 567,46 €. En 2019, ce sera 3 844,50 euros. Hausse annuelle : 277,04 euros (0,45 % de son salaire), soit 23,10 euros par mois.
« On pourrait penser qu’une hausse de cotisations permet au salarié d’acquérir plus de droits à la retraite, et donc, à terme, une meilleure pension, mais ce n’est pas forcément le cas », alerte Dominique Prévert d’Optimaretraite. « Sans entrer dans des détails complexes, sachez que certaines de vos cotisations Agirc et Arrco vous apportent directement des points de retraite, alors que d’autres servent à financer le système en général. Or, les nouvelles cotisations dont il est question ici sont en partie des cotisations non génératrices de droits individuels. »
Une décision prise en 2015
« Oui, les cotisations vont globalement augmenter », note de son côté Frédéric Roullier, directeur retraite d’Humanis, un des groupes de protection sociale chargés de la gestion quotidienne des retraites Agirc et Arrco. « Mais il faut rappeler pourquoi cette décision a été prise. »
La mesure a été actée en 2015 à l’issue de négociations entre les partenaires sociaux qui copilotent ces régimes. Elles visaient à réduire les déficits de ces derniers, pour éviter qu’à terme, leurs réserves ne s’épuisent et qu’ils ne puissent plus verser l’intégralité des pensions dues. Elles ont débouché sur une série de mesures d’économies (instauration d’un bonus-malus, sous-indexation des pensions, etc.) et sur la décision de fusionner les régimes en 2019. Gain attendu des hausses de cotisation prévues : 1,7 milliard en 2020.
« L’objectif était de répartir l’effort financier entre retraités, actifs et entreprises, en veillant à ne pas affecter outre mesure le pouvoir d’achat des uns et des autres », souligne M. Roullier. « D’autre part, si les cotisations augmentent au niveau global, précisons qu’elles baisseront pour certaines catégories de salariés », ajoute-t-il.
Qui paiera ainsi moins de cotisations ? Les cotisants Agirc dont le salaire annuel brut est inférieur à un niveau « charnière », 43 977,84 euros pour 2018. Cotisent à l’Agirc les cadres et assimilés cadres, mais aussi, c’est moins connu, les non-cadres surnommés « articles 36 » (s’ils répondent à certaines conditions et que leur entreprise a souscrit un contrat prévoyant leur affiliation à l’Agirc).
La fin d’un dispositif dédié aux cadres
Prenons l’exemple de Céline, cadre au salaire brut de 32 000 euros. Ses cotisations salariales Agirc-Arrco s’élèvent en 2018 à 1 620,80 euros. En 2019, ce serait 1 283,20 euros. Elle profiterait d’une baisse de cotisations, donc d’une hausse de salaire net, de 337,60 euros sur l’année (1,06 % de son salaire). Soit 28,13 euros par mois.
L’explication ? Les salariés qui, comme Céline, gagnent moins que le salaire charnière (environ un tiers des cotisants Agirc), bénéficie actuellement d’une « garantie minimale de points » (GMP) : en échange d’une cotisation forfaitaire obligatoire (331,20 euros en 2018, pour la part salariale) leur sont attribués 120 points de retraite Agirc par an. Avec la fusion, le statut n’influera plus sur les cotisations, la GMP et sa cotisation forfaitaire ne pourront donc être conservées. D’où la baisse des cotisations.
« Les salariés concernés bénéficieront d’un gain de pouvoir d’achat immédiat mais perdront 120 points Agirc chaque année », rappelle toutefois M. Prévert. « A la valeur actuelle du point Agirc, 120 points représentent 52 euros de pension annuelle. Multipliés par 20 ans d’espérance de vie à la retraite, voilà 1 040 euros de pension perdus. La baisse de pouvoir d’achat à la retraite est trois fois supérieure au gain de pouvoir d’achat immédiat dû à la disparition de la cotisation GMP… »
Hausse ou baisse, l’évolution des cotisations sera cependant difficile à percevoir si vous êtes imposable car elle coïncidera, sur la fiche de paie, avec l’entrée en vigueur du prélèvement à la source.