Affaire Benalla : « La sécurité du président a été affectée », selon la commission d’enquête du Sénat

A l’issue de leurs délibérations, mercredi 20 février, les sénateurs de la commission des lois ont décidé de saisir la justice, à la suite de faux témoignages présumés d’Alexandre Benalla et Vincent Crase. L’ancien collaborateur d’Emmanuel Macron, qui dort depuis mardi 19 février à la maison d’arrêt de la Santé pour violation de son contrôle judiciaire, est soupçonné d’avoir menti sous serment sur l’utilisation de ses passeports, sur les motifs de sa demande de permis de port d’arme et sur son rôle dans le contrat passé avec un oligarque russe. Un dernier point sur lequel Vincent Crase est également visé.

Si les faits sont avérés, les deux hommes risquent jusqu’à cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende. Les sénateurs agissent en vertu de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

La justice va devoir déterminer si les propos d’Alexandre Benalla sont effectivement mensongers. Il avait notamment affirmé devant la représentation nationale qu’il avait laissé ses passeports diplomatiques à l’Elysée à la suite de son licenciement, alors qu’il a voyagé ensuite plusieurs mois durant avec ces documents. Selon lui, un membre de l’Elysée, qu’il a refusé de nommer, lui aurait rapporté ses effets personnels, parmi lesquels les passeports.

Contraire à tous les principes de sécurité

Les sénateurs le soupçonnent également d’avoir menti sur les réelles motivations de sa demande de permis de port d’arme. Alexandre Benalla avait affirmé sous serment qu’il s’agissait de se protéger lui-même. Les élus, eux, pensent qu’il assurait une mission de protection rapprochée officieuse du chef de l’Etat, contraire à tous les principes de sécurité à l’Elysée.

Enfin, l’affaire des « contrats russes » vient se surajouter à ce tableau. Alexandre Benalla avait démenti toute participation à la négociation du contrat entre l’oligarque Iskander Makhmudov et la société de Vincent Crase, baptisée Mars. Une version appuyée par son ami.

L’enregistrement de leur conversation, le 26 juillet 2018, publié par Mediapart le 31 janvier, tend à prouver le contraire : les deux hommes y discutent du meilleur montage possible pour brouiller les pistes autour des bénéficiaires réels de cette opération. Quelques jours plus tard, le patron de la société de sécurité Velours, utilisée comme sous-traitante, avait affirmé sur BFM-TV qu’Alexandre Benalla avait assisté à des réunions sur la négociation du contrat.

Alexandre Benalla et Vincent Crase ne sont pas les seuls à être dans le viseur des sénateurs. La commission des lois a écrit à Gérard Larcher, le président du Sénat, pour mettre également en cause trois membres de l’Elysée : le secrétaire général, Alexis Kohler, le directeur du cabinet, Patrick Strzoda, et le général Lionel Lavergne du Groupe de sécurité de la présidence de la République.

« Si les plus proches collaborateurs du chef de l’Etat, et en particulier M. Strzoda, directeur du cabinet, ont utilement contribué à la recherche de la vérité, sur de nombreux points, la présentation qu’ils ont faite des missions exercées par M. Benalla était contredite par les éléments de fait réunis au cours des travaux de la commission, qui témoignent d’une implication réelle de l’intéressé dans la mise en œuvre de la sécurité du président de la République », écrivent les sénateurs. Et d’ajouter : « Le procureur de la République de Paris devrait donc se prononcer sur ce point. »

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