Arte, vendredi 26 avril à 22 h 30, documentaire

« Un nom qui claque, des yeux qui tombent, un poing levé. » Le ton est donné, c’est une légende dont on parle, rien de moins. Pas un grand talent, pas une grande beauté, juste un gosse des rues de New York, devenu malgré lui l’incarnation du rêve américain – Rocky –, puis de son cauchemar – Rambo. Le tout sur fond de success story à l’hollywoodienne, avec muscles saillants, mariages ratés, choix de carrière douteux et come-back fracassants.

Réalisé par Clélia Cohen et Antoine Coursat, Stallone, profession héros retrace la carrière de cet enfant au faciès de guingois – conséquence d’une naissance au forceps –, et à l’élocution particulière, qui l’ont pendant longtemps fait passer pour attardé. « On m’a toujours dit que j’étais stupide, confie-t-il dans une interview à l’orée de sa carrière, parce que je n’avais pas l’air intelligent, alors j’ai tout misé sur mon physique. »

Après avoir flirté avec la délinquance à Hell’s Kitchen, le quartier malfamé de Manhattan qui l’a vu grandir, il découvre le théâtre à 20 ans et se lance dans une carrière d’acteur. Il rêve de Broadway mais il enchaîne les petits rôles ingrats et peine à faire oublier son physique si particulier.

Sans travail ni un sou en poche, bientôt père pour la première fois, il se fait scénariste et, inspiré par un combat de Mohamed Ali, écrit l’histoire d’un boxeur modeste qui finit par connaître la gloire. La suite est connue. Rocky Balboa vient de naître et Stallone a l’intelligence de s’imposer aux producteurs pour endosser le rôle. Malgré (ou grâce à ?) son petit budget, sa distribution peu prestigieuse et son message simple mais positif, le film triomphe en salle. La franchise « Rocky » se déclinera sur plusieurs décennies, rassemblant chaque fois un public fidèle et nombreux.

Personnages taiseux et musclés

Mais Rocky, son alter ego fictionnel, colle à sa peau. Il enchaîne ensuite les flops, devient imbuvable sur les tournages, fait la « une » des tabloïds. Stallone, l’interprète d’un seul rôle ?

Avec le personnage de Rambo, un vétéran de la guerre du Vietnam traumatisé par le retour à la vie civile, il renoue avec le succès mais alimente sa légende personnelle, celle d’un acteur qui compense son manque de talent par le choix de personnages taiseux et musclés.

Mais les années passent, le corps ne suit plus, l’archétype du héros bodybuildé et bas du front se ringardise. Sur le tard, l’acteur saura pourtant prouver, notamment en 1997 avec son rôle dans Copland, de James Mangold, qu’il vaut mieux que la caricature dont il fait l’objet.

Sylvester Stallone : « Je n’ai pas créé Rocky, c’est Rocky qui m’a créé »

Très classique dans sa forme, un peu court pour raconter une carrière de plus de quarante ans, ce documentaire a néanmoins l’avantage de titiller le cinéphile en nous et de donner envie de replonger dans la filmographie, particulière mais finalement assez riche, de ce « scénariste doué mais acteur complexé », dont la carrière a peut-être plus que toute autre épousé les années 1980 et ses questionnements.

Les fans et les curieux pourront à cette occasion voir en replay sur Arte.tv un numéro de « Blow up » consacré à l’acteur. A la question de savoir « C’est quoi, Sylvester Stallone ? », l’émission qui décortique le cinéma rappelle, en dix « madeleines », qui sont autant de films, les efforts déployés par Stallone pour se débarrasser de son image. Sans vraiment y parvenir, mais n’est-ce pas finalement ce qui fait l’intérêt de sa carrière ? « Je n’ai pas créé Rocky, c’est Rocky qui m’a créé », disait-il, lucide.

« Stallone, profession héros », réalisé par Clélia Cohen et Antoine Coursat (France, 2018, 53 min). « Blow up. C’est quoi, Sylvester Stallone ? », écrit et réalisé par Luc Lagier (France, 2018, 17 min), disponible sur Arte.tv.